Attaque de la synagogue de Rouen : comment les Juifs s'organisent en attendant la restauration des lieux

Murs noircis, gravats, plafond et bancs couverts de suie : deux jours après l'incendie de la synagogue de Rouen, survenu vendredi 17 mai 2024, il est toujours impossible de célébrer le moindre office dans le bâtiment. Quelque 200 familles juives doivent ainsi se réorganiser pour continuer à pratiquer. Ils devraient bientôt pouvoir utiliser une salle appartenant à l'archevêché.

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Ce dimanche 19 mai, la vie doit reprendre son cours pour les Juifs de Rouen, au lendemain de shabbat et alors que le choc de l'incendie de la synagogue est encore très présent. La présidente de la communauté juive de Rouen, Natacha Ben Haïm, a rapidement réagi. Les enfants sont accueillis dans la salle Beth Rabat de l'association cultuelle. C'est là qu'ils font leur parasha de la semaine - la lecture d'une portion de la Torah. Là aussi qu'ont lieu les offices, faute de mieux.

De nombreux objets de culte sont quant à eux restés à la synagogue, toujours impraticable. C'est le cas des tsitsit. Ces vêtements tissés de fils, censés rappeler les mitsvot, les 613 commandements, sont nécessaires aux jeunes garçons pour pratiquer la brakha - la bénédiction. Ils sont restés dans une armoire de la synagogue et pourraient être endommagés. Alors, chacun s'adapte.

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Mieux protéger la synagogue

À 12h30, le Grand-rabbin de France, Haïm Korsia, s'est rendu à Rouen pour soutenir sa communauté. Il a félicité la réactivité de Natacha Ben Haïm, et a évoqué avec philosophie cet événement traumatique.

"Avec eux, je suis dans la souffrance", nous résume-t-il. "Après shabbat, je voulais venir. Mon premier sentiment, c'est une grande surprise. Beaucoup trop de journalistes parlent de tentative d'incendie. Je ne sais pas si c'est une tentative quand on voit la synagogue dans cet état ! C'est un incendie, qui avait vocation à effacer de la géographie de la ville ce lieu qui incarne la diversité de ce qu'est la République."

C'est assez terrible et en même temps, la structure a été préservée, les rouleaux de la Torah aussi. Ce qui a été touché, c'est le sentiment de sérénité du lieu. Il y aura besoin de se reconstruire mentalement dans un espace que l'on devra sans doute protéger un peu mieux.

Haïm Korsia, Grand-rabbin de France

à France 3 Normandie

"Vivre une expérience et ne pas la transmettre, c'est la trahir", poursuit-il, évoquant l'importance de sécuriser les lieux. "La force de résilience et la capacité à ne jamais abdiquer, c'est le cœur de ce que nous sommes, à la fois en tant que Juifs et en tant que citoyens. Cette expérience nous apprend à mieux protéger les accès à la synagogue et à faire appel à des modèles de caméras plus intelligents, pour anticiper et mieux réagir. On apprendra énormément de cette expérience."

Une salle prêtée par l'archevêque

En attendant, la solidarité interconfessionnelle s'organise. L'archevêque de Rouen, Monseigneur Dominique Lebrun, devrait ainsi prêter aux Juifs la salle des États, en attendant la restauration de leur lieu de culte habituel. "Il est venu me voir vendredi. Il était vraiment éprouvé par ce qui nous arrive", s'émeut Natacha Ben Haïm. "Spontanément, il nous a dit 'vous pouvez compter sur moi'. C'était très sincère."

Une démarche applaudie par le Grand-rabbin de France : "Je trouve ça lumineux. Le message, c'est 'Vous avez été agressé dans ce que vous portez comme distinction, comme différence, et moi dans mon culte je vais vous aider à vivre votre culte'. C'est pour moi l'exemple même de cette fraternité qui n'est pas qu'un gadget sur les bâtiments municipaux, et de la qualité des contacts avec les représentants des autres cultes. Ce sont ces gestes de fraternité qui nous donnent toujours à espérer."

Cette salle du palais archiépiscopal, propriété du diocèse de Rouen, permettra a minima d'accueillir le Grand-rabbin de France, de nouveau de passage dans quelques semaines. Reste à déterminer, pour la communauté juive de Rouen, si les offices habituels pourront également s'y dérouler.

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