L'auteur présumé de l'attaque de la synagogue de Rouen, qui a incendié le bâtiment religieux ce vendredi 17 mai 2024 à 6h30, avant d'être neutralisé par les forces de l'ordre, est bel et bien mort des suites des balles reçues dans le thorax. La garde à vue du policier qui a tiré a été levée dans la soirée.
La garde à vue du policier a pu être levée à l’issue de son audition et alors que les images de vidéoprotection de la ville de Rouen ont permis de confirmer qu’il a fait usage de son arme "dans des conditions permises par le code de la sécurité intérieure", a déclaré le parquet de Rouen dans un communiqué, publié ce vendredi à 20h. "Extrêmement courageux", il sera décoré, a promis Gérald Darmanin.
L'autopsie, réalisée vendredi après-midi, a quant à elle confirmé que l’auteur présumé de l’incendie était décédé des suites d’un choc thoracique lié aux tirs du policier.
Un seul départ de feu
"L’expert incendie a par ailleurs constaté l’existence d’un seul départ de feu, à proximité de la bima, table d’où est lue la Torah", a précisé le parquet. Selon toute vraisemblance, le feu aurait été allumé de l’extérieur par une fenêtre.
L’auteur présumé de cet incendie a été identifié. Il s’agit d’un homme de nationalité algérienne âgé de 24 ans, sans antécédent judiciaire mais en situation irrégulière comme l’a fait connaître le ministre de l’Intérieur. L'individu était inscrit au fichier des personnes recherchées depuis "quelques semaines", a souligné Gérald Darmanin. Il avait sollicité en 2022 un titre de séjour pour "étranger malade", qui lui avait été refusé, et avait été débouté de son recours fin janvier 2024.
C'était un individu particulièrement dangereux, particulièrement violent, mais qui n'était connu ni des fichiers de renseignement pour radicalisation, c'est-à-dire qu'il n'était pas fiché S, ni des services de police.
Gérald DarmaninLe 17/05/24, lors d'un point presse
Alors que de la fumée s'échappait encore de la synagogue, l'individu avait sauté du toit et s'était dirigé "en courant vers un policier en le menaçant du couteau qu'il porte, le bras toujours levé vers lui", a indiqué le procureur de Rouen, Frédéric Teillet. Après des sommations "restées sans effet", le policier menacé "aurait fait usage de son arme à cinq reprises, touchant l'individu quatre fois", selon le magistrat.
Une perquisition réalisée au domicile de l’oncle et de la tante qui l’hébergeaient "n’a pas apporté d’élément de nature à éclairer la motivation de l’intéressé", a ajouté le parquet.
Un rassemblement dans l'enceinte de la synagogue
Vendredi soir, quelque quarante personnes, dont des enfants, se sont réunies dans l'enceinte de la synagogue, dans une petite cour bétonnée protégée par un filet anti-projectiles.
Les dégâts dans la synagogue sont "énormes", a regretté auprès de l'AFP la présidente de la communauté juive de Rouen Natacha Ben Haïm. Certains, en passant une tête à l'intérieur de la synagogue, ont constaté à leur tour leur ampleur : des murs noircis, des gravats par terre, un plafond et des bancs couverts de suie.
Ça n'est pas anodin de mettre le feu à une synagogue. Nous, les Juifs, sommes habitués à la haine, mais pour la France, c'est inquiétant.
Yo'hanan Natansonà l'AFP
Impossible d'y prier. Les lourds rouleaux de la Torah ont été sortis dans la cour et très vite, comme le veut le rituel, dix hommes se sont réunis pour réciter la prière du shabbat, qui marque le début du jour de repos religieux. "On va faire shabbat ici, dans la cour, car à l'intérieur l'atmosphère est suffocante et la salle est plongée dans l'obscurité", a expliqué Yo'hanan Natanson, 69 ans.
Pour marquer sa solidarité avec la communauté juive sous le choc, le curé de Rouen, Geoffroy de la Tousche, s'est rendu à la synagogue avec une quinzaine de jeunes catholiques. "Nous allons prier tout le week-end pour les Juifs", a-t-il assuré. "Hier, c'était Saint-Étienne-du-Rouvray, aujourd'hui c'est une synagogue. Demain, ce sera une mosquée."
Deux enquêtes ouvertes
Deux enquêtes ont été ouvertes pour faire la lumière sur ce drame : l'une pour "incendie volontaire" visant un lieu de culte et "violences volontaires" sur les policiers et les pompiers, et l'autre sur les circonstances du décès de l'individu armé et confiée à l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), d'après le parquet.