Alors que leur profession représente 40% des effectifs des hopitaux publics, ces professionnels de santé demandent la mise en place du décompte horaire de leur temps de travail. En moyenne, ils effectuent 58 heures par semaine. Des journées à rallonge devenues insupportables.
48 heures de grève pour descendre à 48 heures de travail. À l’appel de l’Intersyndicale nationale des internes (ISNI), les internes en médecine sont en grève ce vendredi 18 juin et samedi 19 juin. Au CHU de Rouen (Seine-Maritime), les internes alertent depuis des mois sur leurs durées de travail excessives et dangereuses. Le voile se lève aussi sur les violences diverses exercées contre eux par des médecins durant leur stage d'internat.
"Aujourd'hui le travail des internes est estimé à 58 heures par semaine, ce qui est énorme. Nous demandons le respect du texte de loi qui indique qu'un interne doit effectuer 48 heures de travail", explique Alice Eynard, interne en médecine, représentante Intersyndicale Nationale des Internes.
Epuisement professionnel, tentatives de suicide...
Ce surplus d'horaires entraîne beaucoup d'épuisement professionel. "Tout cela développe des troubles mentaux chez les internes avec notamment des syndromes anxiodepressifs. Le plus graves : des tentatives de suicides chez certains d'entre nous, certains au sein même de l'hôpital !", s'indigne Alice Eynard.
Selon l’Intersyndicale nationale des internes, cinq internes ont mis fin à leurs jours depuis le 1er janvier 2021. A Rouen, en février dernier, nos confrères de Paris Normandie révélaient qu'un étudiant en médecine âgé de 28 ans, originaire de Rouen, s’était suicidé par pendaison. Ses parents dénoncent un « énorme dysfonctionnement dans l’encadrement, la gestion et le suivi des internes ».
"Internes épuisés, patients en danger"
Un épuisement qui peut avoir de lourdes conséquences sur leur propre santé, mais aussi sur celle des patients. "Quand on demande à quelqu'un d'effectuer des gardes de 24h, on n'a pas la même efficacité au bout de 22h de travail qu'au début de sa garde. Quand on est fatigué, on n'arrive pas à réfléchir de la même manière, ça peut mettre en danger les patients", poursuit Alice Eynard.
"Quand, en fin de garde, on a du mal à faire une phrase sujet-verbe-complément, j’aimerais bien qu’on m’explique comment on peut prendre en charge un patient de façon optimale", alerte Gaétan Casanova, interrogé par l’AFP, président de l’Intersyndicale nationale des internes, lui-même interne en anesthésie réanimation.
En mai 2021, une étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) concluait que le fait de travailler cinquante-cinq heures ou plus par semaine était associé à une hausse estimée de 35 % du risque d’AVC et de 17 % du risque de mourir d’une cardiopathie ischémique.
"Un manque de financement de l'hopital public"
Pour Laura Maerten, représentante intersyndicale nationale des internes, le problème vient des financements des hôpitaux et d'un manque de personnel. "Il y a un besoin qui n'est pas fourni par l'hôpital. Ce sont les internes qui compensent, ce qui explique l'étirement des temps de travail des internes. Il faut que l'hôpital finance plus, on n'y arrivera pas sinon."
On ne demande pas à être payés pour nos heures supplémentaires, on demande juste à être plus nombreux pour équilibrer le temps de travail.
Au CHU de Rouen, il y a 520 internes. Cela représente 40% des employés de l'hôpital. Une manifestation nationale aura lieu samedi 19 juin 2021 à Paris, à 13 h.