Le tribunal correctionnel de Rouen (Seine-Maritime) a condamné à six mois de prison avec sursis un policier pour avoir frappé un gilet jaune lors d'une manifestation contre la réforme des retraites à Rouen en 2020.
"C'est un énorme soulagement pour mon client après quatre ans de procédure. Ça y est on a le sentiment que les rôles rentrent dans l'ordre, on reconnaît enfin la victime comme telle", nous a confié Me Chloé Chalot, l'avocate de la victime, après l'annonce de la décision du tribunal correctionnel de Rouen.
Le policier, aujourd'hui CRS, officiait à la Compagnie départementale d'intervention (CDI) au moment des faits. Il a été reconnu coupable d'avoir porté un coup de matraque et un coup de pied à un manifestant non-violent et a été condamné à six mois de prison avec sursis.
Une première plainte du policier
Tel est pris qui croyait prendre, c'est ainsi que l'on peut résumer cette affaire. En effet, le 29 février 2020, une manifestation de gilets jaunes est en cours dans le centre-ville de Rouen.
La victime, un homme de 39 ans, tente d'apporter secours à une femme, bousculé par deux policiers. C'est à ce moment-là qu'il reçoit un coup de matraque derrière la tête de la part d’un policier. À terre, il est frappé une nouvelle fois. Il sera ensuite interpellé et placé en garde à vue.
C'est très effrayant de savoir que sans la vidéo, il n'y aurait tout simplement pas eu de dossier.
Me Chloé Chalot, l'avocate de la victime
Le policier, auteur des coups, porte plainte pour violences, expliquant être intervenu car le manifestant était violent avec ses collègues. De son côté, le manifestant apprend à sa sortie de l'hôpital qu'une vidéo de la scène existe. C'est à ce moment-là qu'il décide également de porter plainte pour violences.
"Dans ce dossier, c'est le policier qui agresse et qui porte plainte contre la victime. Alors qu'il a porté des coups, il se signale en tant que victime. C'est inquiétant.", confie Me Chloé Chalot, avocate de la victime.
Une condamnation rare
Les affaires de violences policières sont souvent difficiles à prouver et engendrent rarement des poursuites judiciaires. L'avocate de la victime, Me Chloé Chalot, explique que les victimes doivent présenter de nombreuses preuves et que sans vidéos, celles-ci n'ont quasiment aucune chance.
"Ce genre de condamnation de policiers est très rare dans des cas de violences policières. Cette affaire illustre en creux toutes les procédures qui ne peuvent pas aller au bout. On va vous opposer des procès-verbaux, sans vidéos, c'est presque impossible", explique-t-elle.
Pas d'excuses
Pendant le procès, le policer accusé n'a pas formulé d'excuses. Une réaction décevante et incompréhensible pour la victime, selon son avocate.
Le prévenu a effectivement affirmé durant l'audience : "j'ai toujours respecté la déontologie, il a donné des coups de pied dans un bouclier de collègue. C'est du maintien de l'ordre." L'avocat du policier, Me Jonathan Proust, a également insisté dans sa plaidoirie sur le contexte difficile des manifestations des gilets jaunes pour les forces de l'ordre.