Mise en examen, la société dont l'usine rouennaise a pris feu le 26 septembre 2019, avait déposé une requête en nullité auprès de la cour d'appel de Paris. Le recours a été rejeté.
La cour d'appel de Paris a rejeté mercredi 30 juin le recours de Lubrizol qui dénonçait des irrégularités dans l'enquête sur l'incendie de son usine à Rouen en septembre 2019, confirmant ainsi la mise en examen de la société.
Une demande de requête en nullité en août 2020
Lubrizol France, mise en examen pour les dégâts environnementaux provoqués par l'incendie, avait déposé une requête en nullité en août 2020 devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel pour "dénoncer des irrégularités de procédure dont elle a été victime et solliciter la nullité de divers actes de procédure et de sa mise en examen". La société estimait avoir été mise en examen sur la base de non-conformités qui n'auraient pas été dénoncées, voire rejetées par les inspecteurs de la Dreal (Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement) juste après l'incendie, avant d'être enregistrées dans un procès-verbal un mois plus tard.
Pour Lubrizol, la Dreal a eu "l'intention de caractériser a posteriori et fictivement des non-conformités à l'encontre de Lubrizol France, dans un contexte de pression médiatique particulièrement problématique".
A l'audience le 31 mars, le parquet général s'était opposé à la demande de la société tandis qu'une dizaine de personnes manifestaient devant la cour d'appel de Paris, accusant Lubrizol de vouloir "fuir son procès".
"Nous devions soulever ces irrégularités de procédure et certaines incohérences, notamment chronologiques dans le cadre de la procédure d'inspection qui a suivie l'incendie. ", souligne Maître Bénédicte Graulle, avocate de Lubrizol. "C'est extrêmement important pour Lubrizol, c'est un droit fondamental de se défendre."
Lubrizol était légitime à soulever ces irrégularités de procédure et certaines incohérences.
Pour les avocats des victimes de l'accident - plus de 500 plaintes ont été déposées - les inspecteurs de la Dreal ont au contraire fait preuve de prudence sur ces "non-conformités" immédiatement après l'incendie, faute d'avoir pu à ce moment-là analyser tous les éléments en leur possession.
"Lubrizol gagne du temps"
Lubrizol France est mis en examen à Paris depuis le 24 février 2020 pour "exploitation non conforme d'une installation classée" ayant provoqué des dégâts environnementaux, et "déversement de substances nuisibles dans les eaux", étape préalable à un éventuel procès.
Pour l’Union des victimes de Lubrizol, "c'est une bonne nouvelle pour la justice et la population qui a été souillée. Mais Lubrizol gagne du temps et sait que plus les mois passent, plus les gens comme nous risquent de leur lâcher les baskets. Ca va durer 10-15 ans parce qu'il y aura des rebondissement pour ruser et essayer de gagner quelques mois supplémentaires. La preuve, avec ce recours ils viennent de gagner un an", indique Christophe Holleville, secrétaire de l'association.
L'origine de l'incendie toujours inconnue
L'incendie, survenu le 26 septembre 2019 sur un site classé Seveso seuil haut en zone urbaine et dont l'origine reste inconnue, avait provoqué un immense nuage de fumée noire de 22 km de long. Près de 9.505 tonnes de produits chimiques avaient brûlé dans ce site de lubrifiants automobiles et sur le site voisin de l'entreprise Normandie Logistique. L'incendie n'avait fait aucune victime.
Après 21 mois d'investigations, l'incertitude la plus totale demeure quant aux causes et origines du sinistre.