L'incendie puis l'effondrement de deux immeubles vides mais truffés d'amiante est-il dangereux pour la santé des riverains ? Dans une salle bondée, les questions adressées au maire et au bailleur "Rouen Habitat" ont fusé.
Chaleur lourde dans la salle du comité de quartier qui donne côté cour sur les immeubles "verre et acier" désaffectés qui sont encore debout.
Les deux grandes tours effondrées le 30 septembre sont un amas de décombres vaporisés en permanence par 4 brumisateurs géants. Une précaution utile pour plaquer la poussière. Les immeubles des années 70 étaient truffés d'amiante.
La ville de Rouen a organisé une réunion publique ce dimanche après-midi ( 8 octobre). Le maire de Rouen et président de la métropole Nicolas Mayer-Rossignol est accompagné de plusieurs adjoints et conseillers municipaux.
La représentante du bailleur social "Rouen Habitat" est en retrait. On ne l'entendra pas durant cette réunion.
Pour les habitants, la pollution est évidente et l'état d'abandon des immeubles était dangereux
Des "verrues", "des poubelles", les riverains percevaient ces 2 immeubles vides depuis 2018 comme une nuisance et aussi une menace. Ils connaissaient la vulnérabilité des "verre et acier aux incendies, des châteaux de cartes qui s'effondrent. La présence d'amiante était aussi notoire.
Lors de la réunion, les habitants ont dit qu'ils voyaient des squatteurs, des gens qui dormaient dans des voitures en bas des immeubles malgré les barricades. "C'est nous qui devions faire la police !" s'exclame un participant.
Après l'incendie, une riveraine raisonne : "s'il y a de l'amiante trouvé dans l'école, il y en a aussi chez nous".
Une question revient : "pourquoi ne nous a-t-on pas évacués ?"
Un jeune homme, père d'un enfant de 10 mois explique sa détresse face à la pollution.
"Comment je fais avec mon enfant, jusqu'à maintenant je suis à l'hôtel parce que j'ai peur de revenir chez moi."
Un riverain des immeubles "verre et acier"
Une jeune femme demande l'installation de manches à air, pour voir la direction du vent et savoir quand elle peut aérer.
Les habitants veulent que des prélèvements de poussières et d'air soient faits à l'intérieur de leurs logements sans tarder.
Ils veulent aussi que les débris tombés chez eux soient collectés plus rapidement par une entreprise mandatée par les autorités.
Les moyens mis en œuvre pour mesurer la pollution et le risque amiante
Le maire socialiste de Rouen est Normalien et ingénieur des Mines, il a détaillé avec pédagogie toutes les mesures prises et son exigence de transparence.
Avec son adjointe d'astreinte le week-end dernier, Fatima El Khili, ils ont, expliquent-ils, insisté pour que le risque amiante soit pris en compte dès les premières minutes de l'incendie.
"Cet incendie est un traumatisme. On peut avoir des critiques, être en colère. Ce que l'on essaie de faire depuis le début c'est être absolument transparent. Toutes les études que nous avons, vous les avez"
Nicolas Mayer-Rossignol, maire de Rouen et président de la Métropole
Nicolas Mayer-Rossignol a répondu à de nombreuses interrogations :
- Le feu est déclaré éteint par les sapeurs-pompiers depuis vendredi 6 octobre à 18 heures
- Aucune victime directe de l'incendie n'a, à ce jour, été retouvée
- Les causes de l'incendie : l'hypothèse des conséquences d'un squat est possible
- Évacuation des décombres : une réunion aura lieu ce lundi 9 octobre pour définir la méthode. Ce sera un chantier avec les protections liées au risque amiante.
- Campagnes de prélèvements pour détecter la pollution : une 4e campagne commence dans les espaces publics du quartier.
- Pollution de l'air : les capteurs d'Atmo Normandie sont installés dans le quartier.
- Pollution de l'eau potable : pas de pollution selon l'agence régionale de santé. le maire indique que les résultats pour la recherche d'amiante dans l'eau sont attendus.
- Collecte des résidus chez les particuliers : 130 sur les 371 demandes reçues.
Où vont aller les 350 élèves de l'école fermée ?
Le groupe scolaire des Pépinières voisin des 2 immeubles ne rouvrira pas lundi 9 octobre. Des prélèvements faits vendredi soir ont détecté des poussières d'amiante dans 8 échantillons sur 35.
Le maire a expliqué que l'école avait fait l'objet d'une nouvelle campagne de nettoyage durant le week-end.
L'accueil des enfants aura lieu lundi dans l'école Rosa Parks (quartier Saint-Sever) pour les élèves de maternelle.
Pour les CP et CE1, le gymnase Nelson Mandela est réaménagé avec des cloisons pour créer des classes.
À Rouen, encore un collectif d'habitants touchés par une pollution
Dans la salle de réunion publique, les riverains des immeubles brûlés ont pu compter sur la présence et l'expertise de Gérald Le Corre du "collectif unitaire Lubrizol Bolloré and Co".
Ce militant également inspecteur du travail juge qu'"il est urgent qu’une nouvelle campagne de tests surfaciques soit réalisée tant en extérieur qu’à l’intérieur des logements et des entreprises".
Les habitants du quartier viennent eux aussi de créer un collectif nommé "collectif incendie pépinières 30 septembre 2023".
"Ce collectif, c'est pour se faire entendre, on est inquiets pour notre santé, notre environnement et aussi en colère"
Nathalie Jamin, "Collectif incendie Pépinières 30 septembre 2023"
Le collectif aura bientôt une page Facebook et peut-être contacté par le mail collectifincendiepepinieres@gmail.com
Les incendies de Lubrizol-Normandie Logistique, du stockage de batteries Bolloré et cet incendie marquant de deux tours sont des chocs qui renforcent la méfiance des habitants et leur font aussi craindre de souffrir de maladies directement liées à ces pollutions.