Les gérants du Cuba Libre, condamnés à trois ans de prison ferme en octobre 2019, ont bénéficié d'une libération conditionnelle en janvier. L'incendie avait fait 14 victimes dans le sous-sol du bar à Rouen. Une nouvelle difficile à accepter pour les familles des victimes....
Ils avaient été condamnés à 5 ans d'emprisonnement dont 3 ans ferme. Finalement, les gérants du Cuba Libre à Rouen n'auront fait que quelques mois de détention. Comme le révèlent nos confrères de France Bleu Normandie, ils ont bénéficié d'une libération anticipée et sont sortis de prison le 12 janvier dernier.
En octobre 2019, le tribunal correctionnel de Rouen avait condamné les deux frères pour "homicide involontaire par violation délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence", suite à l'incendie qui avait fait 14 victimes dans le sous-sol de leur bar en août 2016. Dans le code pénal, la peine maximale pour ce genre de condamnation est de 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende.
"Les deux hommes étaient incarcérés à la maison d'arrêt du Havre depuis la fin 2019, mais ils n'ont été détenus qu'un peu plus d'un an en réalité", précisent nos confrères. Pourquoi sont-ils "déjà" sortis de prison ? On vous explique.
Une libération sous conditions
En janvier 2020, les deux frères ont fait une demande de libération conditionnelle. Comme toutes les personnes condamnées à de la prison ferme, la loi autorise un détenu d'être libéré avant la fin de sa peine, à certaines conditions. La demande peut se faire à partir de la moitié de la peine, si le détenu manifeste des efforts sérieux de réinsertion. Le détenu qui bénéficie de libération conditionnelle est libre, mais il doit respecter les conditions qui lui ont été imposées lors de sa libération.
Dans le cas des gérants du Cuba Libre, "le juge de l'application des peines les avait admis en libération conditionnelle lors d'un jugement en novembre 2020, en considerant qu'ils remplissaient les conditions légales. Ils avaient commencé à indemniser les victimes et ils ont trouvé un travail à durée indéterminée", indique Frederic Benet-Chambellan, procureur général de la cour d'appel de Rouen. Les deux hommes devront en effet payer plusieurs centaines de milliers d’euros aux nombreuses parties civiles.
Mais le Parquet du Havre a aussitôt fait appel de cette décision de libération anticipée, la considérant "prématurée au regard de l'émoi suscité par le drame dans l'opinion publique". C'est donc la cour d'appel de Rouen qui a tranché le 15 février et confirmé la décision du juge de l'application des peines. "Elle a jugé que les frères Boutrif remplissaient toutes les conditions", explique le procureur général près la cour d'appel de Rouen. Les deux hommes sont finalement libres mais porteront un bracelet électronique.
Après leur libération, les condamnés sont suivis par un juge de l'application des peines et par un conseiller pénitentiaire d'insertion et de probation. Ils sont soumis à une ou plusieurs mesures de suivi socio-judiciaires parmi la liste suivante :
- Exercice d'un emploi
- Obligation de suivre des soins
- Restrictions à sa liberté de mouvement
- Obligation d'indemniser les victimes
Les condamnés restent soumis à ce suivi durant la durée de la peine qu'il leur reste à effectuer. Si les obligations ne sont pas respectées, les personnes condamnées peuvent retourner en prison pour y effectuer le reste de leur peine.
Une nouvelle difficile pour les familles des victimes
Du côté des familles des victimes, la pilule est dure à avaler... Émile a perdu son frère Romain dans l'incendie, il avait 21 ans. "Je suis blasée.. je m'étais dit qu'avec ces 3 ans ferme il y avait une justice. Et maintenant on apprend qu'ils sont relâchés au bout de moins d'un an et demi'", indique la jeune femme qui a appris la nouvelle par la presse.
Ils ont la mort des 14 victimes sur la conscience. Ils vont vivre avec ça jusqu'à la fin de leur vie, c'est déjà une grosse peine psychologique. Mais ces 3 ans ferme étaient symboliques pour nous.
"En rentrant le soir, je ne verrai pas mon frère à table. Eux vont retrouver leur famille. C'est ça le plus dur à vivre."