A cause de ses phrases si longues, bon nombre de ses lecteurs n’ont jamais pu finir un de ses livres. Christian Clères n'aime pas l'écriture de Marcel Proust, et il en a fait le sujet de son dernier film. Un documentaire inédit à retrouver le lundi 28 octobre à 23h00 sur France 3 Normandie.
Quelques jours avant l'avant première de son film à l'Omnia samedi 12 octobre à 11h, nous avons rencontré Christian Clères le réalisateur qui n'aime pas Marcel Proust. L'occasion de lui poser quelques questions à propos de son dernier film.
Le documentaire s’appelle « J’aime pas Proust », vous n’aimez vraiment pas Marcel Proust ?
Je venais de faire un documentaire sur Michel Bussi et je cherchais une autre idée de film. J’ai passé ma vie à écrire donc j’ai une petite sensibilité la dessus. Après avoir fait un film sur un « top » de la littérature populaire actuelle, je voulais m’attaquer à un « top » de la littérature, comme Marcel Proust. Ça tombe mal parce que je n’aime pas Proust. C’est venu comme ça, instinctivement. J’ai tout de suite pensé que c’était fédérateur. Il y a quand même 95 % des gens qui ont du mal à lire Proust. Ce n'est pas une question d’aimer ou pas, c’est que ça nous tombe des mains, c’est désuet, etc... On est dans une époque qui réduit tout au strict minimum, « j’aime » ou « je n'aime pas ». Je me suis dit que c’était un moyen d’intéresser tout les gens, y compris ceux qui aime Proust. Ce monstre d’écriture ne me correspond pas. Je suis très sincère quand je dis que je n'aime pas Proust. Je pense que c’est nécessaire qu’au départ il y ai de la sincérité. C’est un film très grand public, ça ne s’adresse pas à des gens qui savent. Pourquoi un titre aussi provocateur ?
Les choses viennent naturellement. Moi, je n'aime pas Proust, c’est comme ça qu’il faut aborder le sujet. J’ai un esprit assez provocateur, sans être méchant. Ici, je n’ai pas vu le coté provocateur, je ne le vois pas. En fait, je dis les choses comme elles sont. Je n'aime pas Proust et je me rends compte que ça rassemble : ceux qui n'aiment pas disent « moi non plus » et ceux qui aiment disent « je ne comprends pas pourquoi vous n'aimez pas". C’est très important un titre de film.Moi qui n’aime pas Proust, je suis allé à la rencontre des Proustiens pour savoir pourquoi ils aimaient Proust
Vous dites que 95 % des gens n’aiment pas Proust, c’est difficile de rencontrer des gens qui assument de ne pas aimer cet auteur ?
Je me suis très vite aperçu en travaillant sur le film que les gens n’aiment pas Proust. Et, finalement, les arguments tombent vite : "C’est trop long", "les phrases sont trop longues ", "on n’arrive pas à comprendre"… Ça ne m’a pas intéressé d’aller rencontrer des gens qui n’aimaient pas. Le Pitch du film, c’est : "moi qui n’aime pas Proust, je suis allé à la rencontre des Proustiens pour savoir pourquoi ils aimaient Proust, comment il fallait l’aimer et pourquoi c’était important de l’aimer au 21e siècle". Il n’y pas de gens qui n’aime pas Proust dans le documentaire, puisque c’est moi qui les incarne. Dans le film, il y a par exemple Jean-Yves Tadier qui est sans doute la référence mondiale du "Proustisme". Il fallait être franc avec ces experts de l’auteur en leur présentant le film. De façon générale, ils ont bien aimé l’approche, car les Proustiens ont beaucoup d’humour. Dans le film, ce sont eux qui sont le plus sévère, ce n’est pas moi.
Quand est-ce que vous avez lu Proust pour la première fois ?
Je n’ai jamais réussi à lire Proust. À chaque fois que j’ai commencé je n’arrivais pas à aller au delà de la de la première phrase. J’ai été obligé de lire Proust pour faire le film. Je n’ai pas tout lu, mais 600 pages sur les 3 000, c’est déjà pas mal. À un moment, j’ai compris qu’il fallait suivre la ponctuation, c’est devenu fluide et limpide. J’ai compris que c’était très musical et j’ai demandé aux musiciens avec qui je travaille de composer un slam avec les mots de Proust. Le film d’ailleurs commence par un rappeur qui chante la première phrase d’À la recherche du temps perdu. Maintenant que j'ai réalisé ce film, je comprends Marcel Proust et je pourrais me plonger beaucoup plus facilement dans son œuvre.Quelle serait votre madeleine de Proust à vous ?
Ça dépend des moments de la vie. Peut-être que raconter des histoires, c’est ma madeleine parce que ça fait plus de 30 ans que je fais ce métier et je ne m’en lasse pas. Je me suis éclaté à faire ce film, à raconter cette histoire."J'aime pas Proust" de Christian Clères
Lundi 28 octobre à 23h00 sur France 3 NormandieAvant première à l'Omnia samedi 12 octobre à 11h
Production : Scotto Productions / Coproduction France 3 Normandie
Film soutenu à la production par la Région Normandie en partenariat avec le CNC et en association avec Normandie Images