A 31 ans, l’explorateur de Saint-Etienne-du-Rouvray, près de Rouen (Seine-Maritime), achève tout juste une expédition de 200 km sur le plus haut plateau d’Europe, l’Hardangervidda, en Norvège.
Changement de parcours
Il a accepté de nous livrer ses premières impressions par visio en direct d’Oslo en Norvège. Quelques heures seulement après la fin de son voyage sur ce plateau sauvage, à mi-chemin entre Bergen et Oslo. A cette saison, les températures peuvent atteindre les -40°C.
Contre toute attente, c’est une période de redoux qui lui a posé le plus de problème. "Une vague de chaleur assez imprévue a frappé la région peu après mon départ" explique le trentenaire. "Les températures ont atteint les 5 degrés pendant un certain temps. Deux jours après mon départ, j’ai dû rebrousser chemin car dans ces conditions, l'expédition devient un calvaire. Mon équipement n'est pas du tout fait pour la pluie. Pour progresser sur une neige aussi mauvaise, on fait du 0,5 km/h maximum. Je traversais les lacs avec les skis baignant dans l'eau".
Mais l’explorateur normand relativise : "je ne veux pas me plaindre parce que les conséquences les plus grandes sont pour la biodiversité. Quand il y a une alternance de pluie suivie de températures qui descendent de nouveau à -20 ° C, les lichens et les mousses se trouvent recouvertes de glace. Les animaux ne peuvent plus gratter sous la neige pour atteindre la nourriture puisqu’avec la pluie et le redoux elle s’est transformée en glace".
Finir ce qu’il avait commencé
Si Moufid Taleb est parvenu à relier Haukeliseter à l’ouest à Finse au nord est de la Norvège, distantes d’environ 200 kilomètres, les péripéties météorologiques l’ont contraint à changer de parcours. Trois ans après une première expédition dans cette région où il a failli mourir pris dans un ouragan qui a stoppé son périple, le normand s’est de nouveau confronté à cette terre qui se révèle parfois dangereuse.
"On m'a déjà demandé si je considérais ça comme une revanche. Pas vraiment.
L'idée c'était juste de réussir ce que je n’avais pas terminé en 2022. Je ressentais vraiment le besoin de revenir ici à cette période et je pense que ça m'a fait du bien.
En tout cas, je ne le regrette pas".
Voyez l'interview que Moufid Taleb nous a accordée alors qu'il était encore à Oslo ce dimanche 5 janvier à 12h.
Vivre sa passion
Moufid Taleb n’en est pas à son coup d’essai. Curieux, passionné par la science, la nature et les animaux, celui qui enfant dévorait les romans d’aventure décide de consacrer sa vie à ce qui le fait vibrer. Il multiplie alors les expéditions : 1 500 km à vélo pour relier l’Autriche à la Méditerranée par les Alpes, descendre la Seine en Kayak, traverser le parc national de Sarek en Laponie suédoise… rien n’arrête le normand.
Voyez la vidéo qu'il avait réalisé lors de sa traversée cycliste en Europe.
Pas même lorsque 70 cm de neige s’abattent sur sa tente en pleine nuit en Norvège. "Je n’ai pas beaucoup dormi ce soir-là. J’ai passé mon temps à évacuer la neige pour ne pas être enseveli sous ma tente".
Discipline et mental
Mais le reste du temps, Moufid Taleb s’est adapté aux contraintes. Car à cette époque de l’année, les journées sont très courtes dans cette partie du monde. Le normand évolue presqu’exclusivement le jour, en ski, tractant derrière lui son paquetage sur un traîneau. "Je mangeais en moyenne 6 à 7000 kcal par jour et j’ai perdu du poids" sourit-il, "les conditions sont plus difficiles que la dernière fois car là, on est en décembre-janvier. La météo est plus instable. Il y a plus de poudreuse. C’est donc compliqué de progresser surtout avec un peu plus de 70 kilos derrière moi".
Dans ces moments-là, c’est la discipline et le mental qui comptent. Et le trentenaire sait de quoi il parle. Ces expéditions, il les prépare plus d’un an à l’avance. En 2022, les équipes de France 3 Normandie l’avaient rencontré avant sa traversée du Groenland seul et sans assistance.
Déjà de nouveaux projets
Dans quelques heures, Moufid Taleb sera de retour en France. L’ultra-sportif ne se reposera pas longtemps. D’ici peu, il repartira en Arctique où il travaille comme guide polaire jusqu’au printemps. Avec déjà des rêves de nouvelles aventures… peut-être en groupe…pour partager cette joie et ce plaisir qui l’accompagnent chaque fois.