Franck Thilliez, romancier aux millions d'exemplaires écoulés en France, a passé quelques jours au Centre hospitalier du Rouvray en novembre pour une "immersion" dans une unité destinée à l'encadrement des maladies mentales difficiles. Rencontre.
Originaire du nord de la France, Franck Thilliez est un romancier spécialiste du thriller. Il est l'un des dix auteurs les plus lus dans l'hexagone avec des millions d'exemplaires écoulés. Le 22 novembre dernier, il était présent au centre hospitalier du Rouvray pour être au plus proche des malades difficiles. Il prépare son prochain ouvrage dont la publication est prévue en mai 2025.
Pourquoi avoir choisi le centre hospitalier du Rouvray pour cette immersion ?
Franck Thilliez : Ici, nous sommes dans une unité pour malades difficiles (UMD), il y en a onze en France. C'est un milieu qui se concentre sur la psychiatrie qui est très fermée. On y croise souvent des patients touchés par des maladies mentales assez lourdes telles que la schizophrénie. Parfois, il y a aussi du médico-judiciaire, c'est-à-dire des personnes qui ont commis des actes assez graves, et moi ça m'intéresse. J'aime écrire sur des grands sujets de société. En réalisant cette immersion, je peux véritablement me rendre compte de ce qui s'y passe, voir la prise en charge, les habitudes des patients, j'en avais besoin pour mon ouvrage.
Je passe ma journée avec les médecins, les infirmiers, les aides-soignants, ce n'est pas juste de l'immersion, c'est un échange. Je donne aussi des ateliers d'écriture, ce qui permet aux personnes ici d'accéder à un autre type de culture et mettre des mots sur leur situation. Ces moments permettent d'être au plus proche de la réalité d'un UMD et de la maladie mentale plus généralement.
À quel point l'immersion est importante dans votre processus créatif ?
Franck Thilliez : Ça permet de sortir des clichés. Pour les gens, ce genre d'endroit est synonyme de pure folie, on y enfermerait des monstres… Il y a cette image très sombre, mais simplement parce qu'on ne connaît pas, on n'y a pas accès. Alors que c'est complètement différent. J'avais moi-même ces images-là, que je ne pourrais jamais approcher les patients, qu'ils seraient tous à l'isolement, pourtant il y a des interactions. Être ici casse des barrières, c'est mon objectif en tant qu'auteur de rendre accessibles ces choses au grand public, je veux présenter la réalité d'un milieu. Par exemple, la schizophrénie est un mot qui effraie les gens, alors qu'il y a énormément de formes différentes. On peut l'expliquer et ça se soigne. Il faut casser les clichés.
Je suis très reconnaissant envers les personnes qui m'entourent pendant cette immersion. Quand on est extérieurs, on doit tout nous expliquer et les professionnels que j'ai rencontrés ici prennent le temps, ils m'ouvrent leur monde. Je deviens un intermédiaire pour ces personnes dont la voix n'est pas très présente dans la sphère sociale.
Alors, dites-nous en plus, de quoi va traiter cet ouvrage qui verra le jour courant 2025 ?
Franck Thilliez : Je suis vraiment dans cette phase de réflexion et de construction. J'ai déjà un ouvrage prévu pour 2024 donc je m'attelle au prochain d'où ma présence ici. J'ai déjà imaginé le début de l'histoire. Je reviendrai avec mon personnage principal habituel : Franck Sharko que les lecteurs connaissent, qui est policier à la brigade criminelle de Paris.
Il va y avoir un meurtre d'un côté et puis une psychiatre en Unité pour malades difficiles. Elle va accueillir un patient qui a été agressé et retrouvé errant. Il a des propos très étranges. Des liens vont se tisser entre l'enquête policière et la psychiatrie, ce qui se fait plutôt reflet de ce qui peut arriver dans la réalité. Il y a souvent la question de la responsabilité et l'irresponsabilité. Les responsables vont en prison alors que les irresponsables, par leur condition de malade, vont se retrouver dans ce type d'endroit. Comment la justice s'occupe de ces cas particuliers ? C'est un univers complet à faire découvrir aux lecteurs et lectrices.
Propos recueillis par Quentin Bral et Patrice Cornily.