Prime au mérite pour les agents hospitaliers : un collectif de soignants refuse "cette petite tape dans le dos"

Fin avril, le gouvernement a annoncé le déploiement d'une prime exceptionnelle destinée aux personnels hospitaliers mobilisés pendant la crise du Covid-19. Un collectif de soignants rouennais a lancé une pétition contre cette prime au mérite et pour davantage de moyens à l'hôpital public.

500 euros de prime pour tout le personnel hospitalier, soignant ou non, 1500 euros pour ceux travaillant dans les établissements les plus exposés.

C'est l'une des mesures du deuxième budget rectificatif 2020 du gouvernement pour répondre à la crise économique engendrée par l'épidémie du Covid-19. La loi a été promulguée le 25 avril dernier.

Sauf que ces primes exceptionnelles, exonérées d'impôts et de cotisations, sont refusées par certains soignants.
Il y a deux semaines, un collectif de personnel soignant de Rouen composé de médecins, d'ambulanciers, d'infirmiers, d'aide-soignants ont rédigé et lancé sur internet la pétition Sauver l'hôpital public - #balancetaprime. 
Elle atteint presque aujourd'hui les 10 000 signataires. 

 

Nous, agents hospitaliers signataires de ce courrier refusons le principe de cette prime pour se taire. Nous exigeons un arrêt du démantèlement du système publique, un salaire décent pour chaque agent, et des moyens humains et matériels afin que perdure en France un accès aux soins de qualité pour tous.
 

Une petite tape dans le dos

La pétition a beau avoir été lancée par un groupe de soignants rouennais, elle a vite pris une ampleur nationale car l'idée avait déjà germé ailleurs.
Certains professionnels de santé des hôpitaux de Saint-Denis en région parisienne, ou encore de Grenoble, avaient aussi l'intention de réagir à ces primes annoncées par le gouvernement et ont donc suivi le mouvement normand, un mouvement qui n'est pas politique et se veut le plus généraliste possible.

On n’a pas envie d’être courageux, on a juste envie de faire notre boulot correctement.


Pour bon nombre de professionnels de santé, cette démarche est en décalage avec le manque de moyens de l'hopital public dénoncé depuis des années. "Ce qu’on voudrait nous c’est une augmentation de salaire pour les plus bas salaires, c’est des moyens pour faire notre travail correctement toute l’année", déplore l'un des médecins porte-parole du collectif d'agents hospitaliers à l'origine de la pétition joint par téléphone.

C'est le symbole qui nous importe. Cette prime au mérite, c'est un système qui ne nous convient pas.


Il insiste sur le fait que ce mouvement n'a pas été lancé pour critiquer la gestion de la crise épidémique par le gouvernement "Cette prime au mérite c’est un système qui ne nous convient pasLa démarche qu’on remet en question, c'est celle du gouvernement qui dit Bravo les gars, c’est super ce que vous avez fait, prenez 500 euros ou 1500 euros…Mais on n’a pas envie d’une petite tape sur le dos, on a envie de sauver le système public et c’est ce qu’on réclame depuis des années".
  

Refuser la prime, un luxe pour certains

500 ou 1500 euros, les sommes sont conséquentes pour les personnels soignants qui touchent les salaires les plus bas.

Il nous paraît possible de s’opposer au principe de cette prime et d’accepter cette prime.


Pour le collectif, il ne s'agit pas de demander à ces personnes de refuser de l'argent dont elles auraient besoin. Il incite les signataires qui voudraient conserver cette prime à le faire, "on ne force la main à personne. On comprend parfaitement que quelqu’un veuille garder 1500 euros qui tombent du ciel".

La pétition est relayée sur les réseaux sociaux et a fait l'objet d'article de la presse spécialisée.
 


Une prime pour diviser ?

Le hic pour le moment, ce sont les modalités précises d'attribution de ces primes. Tant que le décret ne sera pas publié, elles resteront floues.
Quand seront-elles versées, seront-elles vraiment destinées à tout le personnel des hôpitaux français, soignant ou non, quelques soient les services où il travaille ? ou le seront-elles au cas par cas ?

Ces primes créent encore des distensions. Tout le monde a travaillé main dans la main et ces primes nous paraîssent déplacées.


Pour le collectif, ces primes viennent surtout abîmer la forte solidarité qui s'est installée pendant les semaines de crise épidémique entre services de soins publics et privés français : "les cliniques privées ont repris pas mal d’opérations qui ne pouvaient plus être faites au CHU car il se concentrait sur le Covid. Il y a des anesthésistes réanimateurs du privé qui sont venus prêter main forte au CHU et ça s’est très bien passé. Ces primes créent encore des distensions là où il y a pas lieu. Tout le monde a travaillé main dans la main en tout cas à Rouen, et ces primes nous paraîssent déplacées".
 
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