À partir de septembre, la ville de Rouen teste la vidéoverbalisation. L’objectif affiché : lutter contre les incivilités et infractions qui rendent les rues dangereuses, notamment pour les cyclistes.
Verbaliser à distance grâce aux caméras de vidéosurveillance déjà installées dans les principales rues de la ville, c’est la mesure votée jeudi 27 juin 2024 en conseil municipal à Rouen.
Pour protéger les piétons et les cyclistes
En ligne de mire : les infractions et incivilités du quotidien comme le stationnement sur les pistes cyclables, les trottoirs, les passages protégés, les voies piétonnes, mais aussi la circulation en sens interdit ou le non-respect d’un feu rouge ou d’un stop.
"Nous avons mené une réflexion pour protéger les usagers des mobilités douces, à savoir les piétons et les cyclistes", explique Kader Chekhemani, adjoint au maire de Rouen en charge de la tranquillité publique et du stationnement.
Il arrive souvent qu’aux abords d’une école, un véhicule pressé, qui ne trouve pas de stationnement, se gare sur un passage piétons. Les enfants et les parents qui traversent en dehors des clous se mettent alors en danger. Le temps que les agents se déplacent, le plus souvent, le véhicule est déjà reparti. C’est ça, l’intérêt de la vidéoverbalisation.
Kader Chekhemani, adjoint au maire de Rouen en charge de la tranquillité et du stationnement
Cinq sites concernés
Une dizaine de voies a été listée par la mairie et l’association Sabine, qui promeut l’usage du vélo en ville notamment. "Ce sont des rues où il y avait à la fois, des pistes cyclables, des entrées d’écoles, des rues étroites et des caméras de vidéoprotection déjà installées", poursuit l’élu.
Les rues concernées sont :
- rue Jeanne d’Arc (portion Théâtre des Arts/rue Lecanuet),
- rue Lecanuet (portion rue Jeanne d’Arc/place du Général-de-Gaulle),
- rue de la République,
- rue Saint-Vivien,
- quais rive droite (quai de Paris/quai Pierre-Corneille/quai de la Bourse/quai du Havre/quai Gaston-Boulet/Avenue du Mont-Riboudet),
- rue Lafayette.
Le procès-verbal du conseil municipal du 27 juin 2024 précise toutefois : "Ces lieux sont ceux qui seront les plus contrôlés par les agents en charge du contrôle des caméras. Néanmoins, la vidéoverbalisation est réglementairement possible sur l’ensemble de la Ville."
Comment ça marche ?
En France, la vidéoverbalisation existe depuis 2008. Grâce aux caméras vidéo implantées sur la voie publique, les agents assermentés constatent sur un écran de contrôle l’infraction commise. À Rouen, c’est au Centre de Supervision Urbaine que cette mission est réalisée.
L’image du véhicule est alors capturée et permet d’identifier la marque et la plaque d’immatriculation. Ensuite, l’agent édite par voie électronique un PV, transmis au Centre national de traitement de Rennes qui adresse alors un avis de contravention au propriétaire du véhicule. Les photos prises à partir des vidéos sont conservées jusqu’à la fin de la procédure.
D’après le site de la sécurité routière, douze catégories d’infractions routières peuvent être vidéo verbalisées :
- Le non-respect d’un feu rouge ou d’un stop
- Le non-respect des vitesses maximales
- Le non-respect des distances de sécurités
- L’usage de voies réservées à certaines catégories de véhicules (piste cyclable, voie de bus…)
- Le défaut de port de ceinture de sécurité
- L’usage du téléphone portable
- La circulation ou le stationnement sur les bandes d’arrêt d’urgence
- Le franchissement des lignes blanches
- Le non-respect des règles de dépassement
- Le non-respect des sas vélos
- Le défaut de port du casque pour les deux roues motorisés
- Le défaut d’assurance
Mais la mairie assure restée focalisée sur les infractions dangereuses pour les cyclistes et les piétons. En cas de contestation de l'amende, la démarche est la même que pour les radars automatiques.
Grâce à la vidéoverbalisation, la municipalité de Rouen espère dissuader les automobilistes de commettre des infractions mais aussi libérer les Agents de Surveillance de la Voie Publique (ASVP), les policiers municipaux et la police nationale pour d’autres missions de terrain.
"La vidéoverbalisation est un outil complémentaire au travail des agents. Nous avons augmenté nos effectifs de police municipale de 20 %. Entre 2020 et 2024, nous sommes passés de 42 à 125 caméras à Rouen", détaille Khader Chekhemani.
Notre objectif n’est pas de verbaliser, c’est de dissuader suffisamment pour qu’à terme les infractions ne soient plus commises.
Kader Chekhemani, adjoint au maire de Rouen en charge de la tranquillité et du stationnement
Une phase de pédagogie
Des panneaux seront installés pour prévenir de l’utilisation de la vidéoverbalisation. À partir de septembre et jusqu’à la fin de l’année, la mairie envisage une période de pédagogie. Communiquer, sensibiliser avant de verbaliser à partir de 2025.
Un point sur lequel a insisté Sabine. "Comme de nombreuses communes, Rouen est construite sur un modèle d’après-guerre autour de la voiture", explique Guillaume Grima, responsable légal de l’association.
Aujourd’hui, les tissus urbains sont en mutation. Une mutation qu’il faut accompagner et expliquer pour permettre à chacun de s’approprier le sujet. Et ce avant de verbaliser.
Guillaume Grima, responsable légal de l'association Sabine
Une fois acté qu’aucune dépense publique supplémentaire ne serait réalisée pour installer de nouvelles caméras, l’association a également plaidé auprès de la mairie pour que l’une des priorités soit la lutte contre le stationnement sur les pistes cyclables, particulièrement celles à double sens.
Ce type d’aménagement se retrouve dans des rues à sens unique pour les voitures. "Résultat, quand un véhicule stationne sur la voie dédiée aux vélos, le cycliste qui déboîte pour l’éviter, peut se retrouver en choc frontal avec la voiture qui arrive face à lui, détaille Guillaume Grima. C’est une situation extrêmement dangereuse, notamment pour les enfants. Et c’est déjà arrivé à plusieurs reprises, dans le quartier de la Croix de pierre, à Rouen par exemple."
Une phase de test durera jusqu'à la fin 2025. Rouen n’est pas la seule à se lancer dans la vidéoverbalisation. En Normandie, plusieurs communes ont déjà passé le pas, après des phases de test jugées fructueuses. C’est le cas notamment de Saint-Etienne-du-Rouvray en Seine-Maritime, Vernon dans l’Eure, Caen et Ouistreham dans le Calvados.