Lits d'infortune sur le sol des parkings. Les personnes les plus vulnérables risquent leur vie par ces nuits de grand froid. La Croix-Rouge et l'Autobus Samusocial de Rouen font des maraudes chaque soir. Ils apportent l'essentiel et essaient de convaincre les sans-abri de venir dans des hébergements d'urgence.
Dans la nuit glaciale, les rues de Rouen sont quasiment désertes. Les personnes sans-abri n'en sont que plus visibles.
Près de la gare, une vision serre le cœur. Deux hommes sont endormis sur deux matelas posés côte à côte, recouverts de couvertures. Il y a une chaise, un cageot sert de tablette. Ces sans-abri ne bougent pas. Il fait moins 5°. Se réveilleront-ils ?
L'autobus Samusocial de Rouen s'est garé près d'eux. Les deux hommes viendront peut-être. D'autres personnes attendaient le passage du bus. Elles viennent prendre une boisson chaude et discuter.
Rester en mouvement pour ne pas geler
Place du Vieux-Marché, la camionnette rouge et blanche de la Croix-Rouge arrive. Un jeune homme avec un passe-montagne l'attendait. Il est sans domicile et décrit sa situation : "par ce froid, on reste en mouvement, mais c'est compliqué de faire la manche avec ces températures, y'a pas grand monde dans les rues".
Le jeune homme dort parfois avec des amis dans un squat. Ce soir, il a appelé le 115 mais il n'y avait pas de place d'hébergement.
La Croix-Rouge respecte le choix de chacun mais elle espère convaincre les sans-abri d'aller dormir au gymnase Graindor.
En plus de la maraude, on participe à la mise à l'abri des personnes sans hébergement. Il faut négocier avec les personnes, expliquer l'intérêt d'aller se mettre à l'abri au chaud, en sécurité. Une nuit de grand froid peut être mortelle pour eux.
Fabrice Blondel président de la délégation territoriale 76 de la Croix-Rouge
À Rouen, la nuit du 9 au 10 janvier, reportage de Stéphane Gérain et Stéphane L'Hôte :
Grâce à cette maraude, c'est peut-être le "bout du tunnel"
Les associations font plus qu'apporter de la soupe, des gants et des couvertures. Elles essaient de comprendre la situation de chaque personne et proposent d'autres types d'aides.
Carine est une jeune femme élégante qui est venue en train d'Evreux pour trouver une issue à sa galère. La rencontre avec l'équipe du Autobus du Samu Social de Rouen l'a plus que réconfortée.
On me permet d'avoir à manger chaud, deux nuits en sécurité. Une structure me prend en charge. J'ai des rendez-vous calés demain. Ce que vous voyez, c'est des larmes de joie. Je sens le bout du tunnel avec la petite lumière qui se profile à l'horizon.
Carine
Carine est venue avec une valise et son chien qu'elle a emmailloté dans un châle.
Elle esquisse l'histoire qui l'a menée dans une impasse : "Je n’ai pas le mode d'emploi de ma situation. En un claquement de doigts on peut très vite basculer. Pourtant j'ai fait des études."
À Rouen, environ 200 personnes sont sans domicile fixe.