Pendant dix ans, Semra a subi les sévices d'un conjoint violent. Au Havre (Seine-Maritime) où elle reconstruit sa vie, elle partage son histoire avec l'espoir qu'elle donnera à d'autres victimes le courage de partir.
"Je ne voulais plus accepter la violence, les rabaissements et l'angoisse." Il y a cinq ans, Semra a tout quitté pour fuir les violences physiques et psychologiques que lui infligeait son ex-mari. Son calvaire a duré une dizaine d'années.
"J'étais en prison à la maison alors que je n'ai fait de mal à personne. C'est cette angoisse qui m'a poussée à quitter Paris, raconte à 36 ans cette mère de deux enfants, qui a reconstruit sa vie au Havre, en Normandie. Aujourd'hui, je n'ai plus peur".
Ouvrir "la petite porte"
En Normandie, Semra a trouvé la force d'avancer et d'ouvrir son propre restaurant, après des années à ne plus y croire. "J'essaye d'être un exemple pour les femmes qui ont subi des violences", explique-t-elle. "Elles peuvent réussir. Une fois qu'elles auront ouvert la petite porte, il y aura toutes les lumières et le soleil."
N'ayez pas honte de ce que vous avez vécu, vous n'y êtes pour rien. C'est aux responsables d'avoit honte de leurs actes.
Semra, victime de violences conjugales
La petite porte de Semra se nomme AFFD (Association des femmes et des familles en difficulté). À son arrivée en Normandie, l'association havraise l'a soutenue et hébergée dans un appartement sécurisé et anonyme, destiné aux femmes victimes de violences conjugales : "J'ai décidé de partir quand j'étais prête. Et en partant, j'ai compris que je n'étais pas seule".
Le poids des violences
Semra n'a jamais pu faire d'études, choisir ses vêtements ou ses amis. Pendant dix ans de mariage, elle a subi les coups et les critiques quotidiennes son conjoint.
J'ai pu réparer mes dents, mes cheveux, mon nez cassé mais mentalement, les violences psychologiques sont difficiles à réparer.
Semra, victime de violences conjugales
Grâce à son déménagement au Havre, elle met maintenant des mots sur les violences qu'elle subissait : "Le problème n'est pas qu'il nous manque quelque chose. C'est juste que les hommes violents se sentent bas et ils voudraient nous rabaisser à leur niveau. J'ai compris tout ça avec le temps".
Au fil des mois, malgré une adaptation difficile, Semra a réappris à vivre "comme tout le monde", sans le visage de son agresseur pour hanter ses nuits : "Il était comme un fantôme à me suivre tout le temps". En promenade sur les bords de mer, les yeux éblouis par le soleil et les cheveux au vent, la jeune femme recharge ses batteries, sur le chemin de la guérison.
Avec Marie-Charlotte Duluc et Marie Benoist.