Poubelles : mieux comprendre le montant des taxes sur les ordures ménagères

Inciter les citoyens normands à mieux trier leurs déchets, selon le principe du pollueur-payeur. C’est la volonté de la Région, qui se lance dans une promotion de la tarification incitative auprès des communes. Un système déjà mis en place par quelques communautés de communes du Calvados. 

Le principe du pollueur-payeur appliqué aux poubelles des particuliers. Déjà en vigueur dans quelques communes du Calvados, l’objectif de la Région est d’atteindre 30% de la population touchée par la tarification incitative d’ici 2025. Un objectif ambitieux : en 2015, seuls 3% des Normands étaient concernés par cette tarification. Cinq ans plus tard, ils ne sont que 5%.

Aujourd’hui la plupart des communes font payer la même taxe ou la même redevance sur les ordures ménagères à tous leurs habitants, quel que soit le volume de déchets qu’ils mettent à la poubelle chaque année.

La tarification incitative vise à faire payer le citoyen en fonction de ce qu’il produit réellement comme déchets.

Si le principe est simple,  les communes ont le choix entre différents systèmes pour l’appliquer. (Et c’est là que cela se complique un peu. )

Les poubelles sont un sujet très sensible entre les administrés et leur maire

Eric Prud’homme, directeur régional délégué de l’ADEME en Normandie

« De nombreuses personnes pensent que ce service est gratuit »  estime Eric Prud’homme, directeur régional délégue de l'ADEME (Agence de la transition écologique) en Normandie. Mais non, tous les foyers paient pour l’enlèvement de leurs ordures ménagères, et les communes peuvent inciter leurs administrés à mieux trier et ainsi alléger leurs poubelles.

Comment les communes peuvent inciter à moins sortir les poubelles

  • La REOMI (Redevance  d'Enlèvement des Ordures Ménagères incitative) est comme son nom l’indique une redevance : l’habitant paie un abonnement en fonction le plus souvent du nombre de personnes dans le foyer. Une part variable y est ajoutée ( le plus souvent le nombre de levées de bac supplémentaires). L’usager paie directement à la collectivité le service qu’il utilise.

C’est le système pour lequel a opté la communauté de communes Pré-Bocage Intercom. De 2013 à 2019, la part variable de la redevance était calculée en fonction du nombre de sacs ordures ménagères payants utilisés par foyer. Depuis cette année, la part variable est calculée en fonction du nombre de fois où le bac ordures ménagère du foyer est collecté. Au-delà de 18 vidages par an, un tarif dissuasif s’applique : pour un foyer de 2/3 personnes, c’est 2,80€ la levée pour un bac de 120l , jusqu’à 4€ si l’usager sort plus de 25 fois sa poubelle par an.

  • La TEOMI (Taxe d'Enlèvement des Ordures Ménagères incitative) est une taxe dont la part fixe est calculée sur le foncier (plus la maison est grande, plus c’est cher) et prélevée par les impôts (la classique taxe sur les ordures ménagères), à laquelle on ajoute une part incitative (on paie en fonction du nombre de levées).

C’est le choix de la communauté de communes Cœur de Nacre. Mis en place depuis 2019 d’abord avec 3 communes, ce système concernera les 12 communes au 1er janvier 2021. Chaque administré paie donc une part fixe en fonction de son foncier ; et chaque levée est payante. Par exemple pour un bac de 120l , le tarif est fixé à 2,10€ par levée.

Un système plus juste mais pas forcément moins cher

Ces différentes options sont des choix politiques. Quelle que soit l’option retenue, c’est un sacré changement dans la vie des administrés.

Pour qu'il porte ses fruits, il faut un système acceptable

Nicolas Delahaye, maire d'Anisy (14) et vice-président de la communauté de communes Cœur de Nacre

Nicolas Delahaye est vice-président de la communauté de communes Cœur de Nacre en charge de la gestion des risques et des déchets. La communauté de communes a réfléchi plusieurs années avant d'opter finalement pour la mise en place d'une TEOMI. « Si l’on avait opté pour la REOMI, certains auraient payé une redevance supérieure même s’ils avaient réalisé des efforts importants.» 

Et selon cet élu, l’erreur à ne pas commettre est celle de faire croire aux gens qu’ils vont payer moins cher. « L’objectif est de diminuer la quantité de déchets à traiter, car les coûts de traitement explosent pour les collectivités» explique Nicolas Delahaye. Si le maire d’Anisy avait un conseil à donner à un élu qui voudrait se lancer dans une taxe incitative ce serait : « de ne pas partir du principe que l’on va faire des économies : cette promesse ne pourrait pas être tenue et les gens seraient déçus. »

Or l’objectif de la Région, c’est bien que les Normands se mettent au tri et diminuent leurs déchets, et plus vite que ça.

Valoriser les poubelles : la preuve par l’exemple

Ce jeudi 10 décembre, à l’occasion de la signature de la convention de partenariat entre la Région, l’ADEME et Citeo (entreprise proposant des solutions de recyclage et de tri), plusieurs élus ont pu faire part de leur témoignage. Et selon Eric Prud’homme, il n’y a que les élus qui peuvent convaincre les élus.

Avec moins de 5% de citoyens incités à maîtriser leur production de déchets, la Normandie n’est pas dernière de la classe, mais elle accuse un certain retard. « D’autres comme l’Alsace, la Bourgogne- Franche Comté ou les Pays de Loire affichent des taux de 35% » explique Eric Prud’homme. Le directeur régional délégué de l’ADEME en Normandie raconte que partout en France « les élus appréhendent la mise en place de ces nouveaux systèmes, mais il suffit que l’un s’y mette et cela fait tâche d’huile rapidement.»

 

Surtout si les premiers résultats sont positifs. Ainsi, dans la communauté de communes Pré-bocage Intercom les collectes d’ordures ménagères ont diminué de 27 % depuis la mise en place de la redevance incitative en 2013.

Dans la Communauté de communes Vallées de l'Orne et de l'Odon (toujours dans le Calvados), la collecte d’ordure ménagère a chuté de 29% entre 2011 et 2019, toujours grâce à une redevance incitative.

Reste à s’y mettre donc… Ce 10 décembre, le délégué régional de l’ADEME a senti un mouvement d’adhésion à ce principe de pollueur-payeur qui fait si peur aux administrés et aux élus . « De nombreux élus présents se sont engagés à enclencher une étude de faisabilité » affirme Eric Prud’homme. Pour atteindre l’objectif de 30% fixé par la Région en 2025, de nombreuses communes devront franchir le pas. 

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