Zoé de Soyres a décidé d'utiliser la caisse de résonance du concours de plaidoirie de Caen. Devant 3 000 personnes, elle évoque le viol et les agressions sexuelles. Elle encourage les victimes à "faire le choix de ne plus se taire".
Comme chaque année, le Memorial de Caen organise un concours de plaidoiries. Ce week-end, des avocats et des élèves-avocats prendront la parole sur des thèmes allant de "l'état d'urgence" à "l'hospitalisation sans consentement".
Ce vendredi, les orateurs sont des lycéens. Parmi eux, Zoé 16 ans. La jeune femme partage une expérience douloureuse avec l'assemblée. Son objectif : faire cesser le silence autour du viol. Son texte a happé une partie de l'auditoire.
Je choisis de briser le silence en mon nom et au nom de toutes celles qui se sont tues
Au début de sa plaidoirie, la jeune femme revient sur #balancetonporc et #metoo : "Il y a eu Lise, attouchée par son grand-père à 11 ans, Il y a eu Sophie, agressée par son ex-petit ami, saoul. Il y a eu Aude, battue par son conjoint. Il y a eu Aïcha, violée par son père durant toute son adolescence". Et elle ajoute : "Et il y a eu moi".
Quand elle cherchait un thème pour participer à ce concours, Zoé de Soyres n'a pas hésité une seconde : "le sujet m'est apparu comme une évidence et c'était avant la vague de #balance ton porc et #metoo , je le savais que j'allais parler de ça, c'était évident. Et cette médiatisation ça m'a plutôt confortée dans mon choix et elle m'a rendue service, d'ailleurs, parce que je me demande si vous auriez été prêt à entendre ce que j'ai dit aujourd'hui si il n'y avait pas eu ça".
Lucide, précise, la jeune oratrice ne joue pas de l'émotion et n'entend pas capter son public par l'affect. Aux faits, elle ajoute des chiffres. Implacables :
- 20% des femmes ont été où seront victimes d'agression sexuelle dans leur vie.
- seules 11% des victimes portent plainte.
- dans 75% des cas l'agresseur est un proche.
"Ca n'arrive qu'aux filles vulgaires"
Zoé parle naturellement de l'agression dont elle a été victime : de cet ami devenu un soir prédateur sexuel, du sentiment d'être devenue une "chose" et plus une personne. De la honte qu'elle a ressenti avant de pouvoir en parler. Et de la parole qui peut être salutaire.
Elle égrène les lieux communs sur les viols pour les balayer de sa seule présence, là, sur scène. Non, elle ne correspond pas au stéréotype de la femme agressée puisque de profil type, il n'existe pas.
Alors la lycéenne demande à l'Etat d'intervenir. Intervenir via un plan d'urgence, pour former les professionnels de santé ou de police, renforcer la prévention dans les écoles, les entreprises. Bref, de ne pas sous-estimer la gravité des faits et faire en sorte que tout cela cesse.
A la fin de sa plaidoirie, elle explique avoir pu se reconstruire grâce à la parole. Cette parole que les 3000 personnes présentes ont suivi avec une attention certaine. Le contrat est rempli pour Zoé : son message est passé et ne tombera pas dans l'oubli aussi vite.
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