Les Etats-Unis veulent exporter 300 000 tonnes de viande de bœuf par an en Europe.
La Fédération Nationale Bovine veut alerter élus, éleveurs et consommateurs dès la rentrée.
Les régions d’élevage et de production de viande de qualité comme le Limousin sont menacées.
Ces propos mentionnés par l’hebdomadaire agricole « Agra » ont le mérite d’être clairs. Ils auraient été tenus récemment à Bruxelles par John Brook, le représentant en Europe de la Fédération Américaine des Exportateurs de Viande (USMEF).« L’Union Européenne est mal barrée tant que les OGM et les hormones sont interdits. Elle est en train de s’isoler car le reste du monde les a acceptés » … « nous allons demander une ouverture du marché européen aux viandes bovines issues d’animaux élevés avec des hormones ».
Depuis le 8 juillet, américains et européens négocient âprement un vaste accord commercial pour faire tomber les barrières douanières et augmenter les échanges entre les deux continents.
D’énormes intérêts sont en jeu de part et d’autres de l’Atlantique, et pour l’instant, à la demande des français et non sans mal, seule la culture et l’audiovisuel ont été exclus du champ des négociations.
Il y a donc peu de chances que l’agriculture échappe à la moulinette.
Certains en France devraient y trouver leur compte comme l’industrie agro-alimentaire, les producteurs de fruits, de fromages ou de vin.
Crainte chez les éleveurs.
C’est une guerre entre deux modèles de production et de consommation de la viande totalement opposés qu’ils s’apprêtent à livrer. Un affrontement culturel autant qu’économique.
Jusqu’à présent, les Etats-Unis n’avaient le droit d’exporter vers l’ Europe qu’une très faible quantité de viande de bœuf « haute qualité », sans hormones, sans antibiotiques et sans OGM, une véritable exception qui ne concerne que 2% à 3% de la production de viande américaine.
Dans le cadre des négociations, les éleveurs américains veulent désormais multiplier par 20 le tonnage autorisé vers l’Europe pour atteindre 300 000 tonnes.
Et surtout, ils veulent exporter de la viande produite « à l’américaine » avec hormones de croissance, antibiotiques, nourriture à base d’OGM et nettoyage des carcasses à l’acide lactique.
Les animaux concernés sont élevés dans des « feed lots », des usines à viande pilotées par une dizaine de salariés, qui concentrent jusqu’à 100 000 bêtes dans des parcs boueux et sans herbe sur des centaines d’hectares.
L'élevage bovin comme variable d'ajustement pour les négociations
On est loin des conditions de production de la viande bovine en Limousin. Des conditions extrêmement réglementées pour garantir une traçabilité et une qualité chèrement acquises après des années d’effort.
Aujourd’hui, le président de la Fédération Nationale Bovine craint que ce modèle fragile soit submergé par l’afflux massif de viande américaine produite industriellement.
C’est tout une filière qui risque d’être déstabilisée, mais aussi tout l’espace rural d’une région comme le Limousin où l’élevage bovin fait vivre dans des conditions déjà précaire la quasi-totalité des agriculteurs.
Dès la rentrée, la FNB va entamer une vaste opération de lobbying et de mobilisation des éleveurs pour influencer les négociations. Il compte aussi s’appuyer sur les associations de consommateurs pour dénoncer la qualité de la viande américaine.
Intervenants : Fréderic Lascaud : éleveur à Magnac-Bourg (87), porte-parole Confédération Paysanne Limousin ; Pierre Chevalier : Pdt. Fédération Nationale Bovine ; Jean-Pierre Audy : député européen PPE, conseiller général UMP de Corrèze