Que les amateurs de vin se rassurent, les professionnels n'ont aucune inquiétude pour la production mondiale, en hausse en 2013 malgré le recul des superficies de vignobles et les sombres prédictions de l'étude de la banque américaine Morgan Stanley.
Selon l'Organisation internationale du vin (OIV), contredisant les craintes émises mercredi par les banquiers new yorkais sur une possible pénurie et une hausse des prix, la production viticole augmente partout chez les principaux producteurs et atteindra 281 millions d'hectolitres (Mhl) cette année contre 258 en 2012.
"Pourquoi cette étude arrive-t-elle aujourd'hui ", s'interrogeait jeudi Stéphane Héraud, vice-président de la fédération des caves coopératives d'Aquitaine. "La tendance de la baisse de la production mondiale est lancée depuis une dizaine d'années maintenant". "La consommation qui baissait au niveau mondial depuis des décennies, a, depuis cinq à six ans arrêté de décroître et même repris son augmentation sur la Chine et les USA. Mais de là à parler de pénurie, c'est peut-être beaucoup". M. Héraud consent cependant à un possible "déséquilibre" dû à un manque d'offre du millésime 2012 et une montée ponctuelle des prix.
Par exemple en Bordeaux, "cela peut entraîner une surchauffe sur les prix avec une rétention du produit par les producteurs, et derrière ça entraîne une catastrophe en terme de perte de part de marché car on est décalé par rapport à la concurrence".
A chaque petite récolte de Bordeaux, note-t-il, "en 84, 91 et 2003, chaque fois il y a eu spéculation et montée des prix, de 40 à 50%. Mais à la campagne suivante on a reperdu ce qu'on a pu gagner. Les à-coups ne sont jamais bons pour la filière".
Pierre Genest, directeur général adjoint de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux en France (FEVS), juge aussi que parler de "pénurie" est un peu fort : "Si on regarde 2013, confie-t-il, on retrouve une courbe où le niveau de production est supérieur à la consommation" alors que depuis 2007, le solde production moins consommation était négatif. "La taille du vignoble européen baisse mais dans le reste du monde elle augmente. Et si les surfaces diminuent, on peut penser que les évolutions technologiques vont permettre d'augmenter les rendements, ce qui compensera".
Pour l'OIV, la consommation tend à se stabiliser cette année - même si les principales données se concentrent habituellement sur les trois derniers mois de l'année. Pour rappel, elle atteignait 243 Mhl en 2012.
De l'Europe du Sud (dont la France, +7% à 44 Mhl) aux États-Unis, au Chili ou à la Nouvelle-Zélande, l'optimisme est de mise malgré une recul constant des surfaces de vignes: 300.000 ha perdues depuis 2006 et encore 15.000 ha rien que sur l'année, en particulier chez des producteurs historiques comme l'Espagne et l'Italie, selon l'OIV.
Mais grâce au ciel et aux progrès, l'essentiel est sauvé, remarque le directeur général de l'OIV cité dans la note annuelle de son organisme, Federico Castellucci: "La récolte en 2013 a été assez importante, grâce à une productivité qui continue à progresser et malgré le coup d'arrêt que les conditions climatiques adverses avaient provoqué en 2012".