Erosion du littoral : un casse-tête pour les maires

Alors que de forts coefficients de marées sont prévus à partir de vendredi soir, les mairies sont encore en alerte. Le coût humain et financier est incalculable dans les municipalités le long du littoral occidental français. Des décisions d'urgence doivent être prises et d'autres pour l'avenir.

Du Nord-pas-de-Calais au Pays basque, c'est le quotidien de tous les maires : l'érosion du littoral sur la côte ouest, qu'elle concerne des plages sableuses ou des falaises de craie, grignote le budget des communes comme le temps des élus.

Quatre ans après la tempête "Xynthia", qui avait fait 47 morts en février 2010, et alors que de violentes intempéries se sont succédé en début d'année, nombre de maires de communes côtières dressent un constat identique: la protection durable du littoral est devenue un casse-tête pour les élus, sur fond d'inquiétude croissante des habitants, alors que l'Etat, en raison de ses lourdeurs administratives, est perçu davantage comme un obstacle qu'un allié.

Permanences lors des intempéries, agents mobilisés pour les pompages d'eau ou le nettoyage des dégâts, travaux de réensablage ou de ré-enrochement, temps consacré à monter les dossiers de financement...: si la problématique varie d'une commune à l'autre  (recul de dunes ou de falaises, menaces d'invasion marine de polders, consolidation de digues mises à mal par les tempêtes), les municipalités se retrouvent désormais en première ligne.
"Avec Xynthia, on a vu revenir des événements qu'on connaissait, mais qu'on avait oubliés, ainsi que les risques qui vont avec. En montagne, les maires n'ont jamais oublié cette gestion du risque", analyse Lionel Quillet, maire de Loix (690 habitants) et président de la communauté de communes de l'Ile de Ré (Charente-Maritime), dont les digues ont considérablement souffert en 2010 et qui voit son cordon dunaire régulièrement attaqué.

Les élus dans un étau

Face à ces enjeux, les élus se retrouvent, selon lui, "dans un étau"."Pris d'un côté par la demande des administrés qui veulent être protégés" et "de l'autre dans un bras de fer avec l'Etat" qui, s'il a pris en charge les travaux les plus urgents après la tempête, est depuis moins prompt à mettre la main à la poche.
Avec, en plus, dénoncent nombre d'élus, des réglementations, notamment environnementales, qui ne sont pas forcément adaptées à la problématique des dispositifs de protection contre la mer, rallongeant parfois de plusieurs années l'instruction de demandes de financement. A tel point qu'en octobre, le ministre de l'Ecologie, Philippe Martin, a demandé aux préfets concernés de simplifier les procédures pour "accélérer les travaux" post-"Xynthia".
 
"On n'a jamais été paralysé autant par des études de papier que depuis Xynthia", peste Jean-Yves Gagneux, maire de Bouin (2.000 habitants) en Vendée, où des digues protégeant des polders ont été endommagées par la spectaculaire tempête et qui bataille depuis pour leur consolidation.

Même sentiment à Charron (Charente-Maritime), village de 1.800 habitants, où trois personnes sont mortes en 2010. Après des premiers travaux d'urgence, lasse d'attendre l'aval de la préfecture, la municipalité a lancé en octobre, sans autorisation, la construction d'une contre-digue de protection. Résultat: 120.000 euros imputés au budget de la commune, une dépense que le maire, Jérémy Boisseau, espère voir validée dans le cadre du 
Programme d'action et de prévention des inondations.

Déresponsabilisation de l'Etat

Dans ce contexte, Lionel Quillet dit avoir constaté une double dynamique: "On assiste à une déresponsabilisation de l'Etat et une accélération de la prise de responsabilité des élus", dénonce-t-il, alors qu'il y a "55 ans de retard à rattraper" pour l'entretien des dispositifs de protection. Avec le risque, souligne-t-il, que les petites communes, moins bien dotées financièrement et en ressources humaines, soient "moins défendues" que les autres face aux risques littoraux.

Devant la complexité du phénomène et les enjeux financiers, les maires demandent à être épaulés. A Capbreton, station balnéaire des Landes, où la municipalité a investi trois millions d'euros dès 2008 dans un système de "transfert hydraulique de sable" pour endiguer l'érosion des plages, le maire,
Patrick Laclédère, se félicite d'avoir le soutien technique et financier d'un Groupement d'intérêt public (GIP) Littoral, créé dès 2006 en Aquitaine, pionnière en la matière.

Une solidarité qui apparaît à terme indispensable: "Après la gestion des déchets, la gestion des risques du littoral sera sans doute le deuxième acte fondateur d'intercommunalités", estime Lionel Quillet. D'autant que si le logement ou l'emploi restent la préoccupation principale des électeurs, la conscience des risques grandit chez les habitants du littoral, témoignent plusieurs élus. Et lentement s'immisce dans les campagnes électorales.
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