La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Poitiers se prononcera le 12 mai sur le dossier d'Innocent Bagabo. Son pays de naissance, le Rwanda, l'accuse d'avoir activement participé au génocide de 1994 et demande son extradition.
La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Poitiers doit se prononcer le 12 mai sur une demande d'extradition visant un Poitevin de 49 ans que la République du Rwanda, son pays de naissance, accuse de participation active au génocide de 1994.
Selon la justice rwandaise, Innocent Bagabo aurait massacré de sa main, à la machette ou à la grenade, des dizaines de Tutsis, hommes, femmes et enfants.
L'asile des autorités françaises
L'avocat général, Me Jean-Paul Garaud, a requis mardi le rejet de cette demande en invoquant la jurisprudence de la Cour de cassation qui interdit de facto toute extradition de personnes accusées de participation au génocide rwandais. La plus haute juridiction française estime en effet que le crime spécifique de génocide n'était, à l'époque des faits, pas inscrit dans le code pénal rwandais. Dès lors, seules d'éventuelles poursuites en France seraient possibles.Dans le cadre de la demande d'extradition d'Innocent Bagabo, les juges n'ont de toute façon pas à se prononcer sur les faits eux-mêmes. Me Garaud a rappelé, par ailleurs, qu'"une personne visée par le même acte a finalement été acquittée".
Et je ne peux pas ignorer non plus que les autorités françaises ont accordé l'asile puis la nationalité française à M. Bagabo
a-t-il également fait valoir.
Une machination ?
Le dossier instruit par les autorités du Rwanda à l'encontre de M. Bagabo présente de nombreuses faiblesses selon son avocat.C'est un dossier construit de toutes pièces, une machination. On a recueilli seize témoignages à charge en une semaine
fait valoir Me Arthur Vercken, un avocat pénaliste parisien.
Soutenu par Amnesty International, son client est tutsi par sa mère, dont toute la famille a été massacrée durant le génocide. Quant à son père, issu de l'ethnie hutu, et sa soeur, ils ont eux aussi été assassinés, mais par les troupes du Front patriotique rwandais (FPR), actuellement au pouvoir.
Réfugié en Tanzanie, Innocent Bagabo était rentré spontanément au Rwanda où il avait intégré un comité de réconciliation après la guerre civile, avant de devenir enquêteur des Droits de l'Homme. Mais il affirme que, quelques années plus tard, il avait refusé de porter de fausses accusations contre des suspects. Ce refus lui a valu les foudres du pouvoir rwandais, assure son avocat.