Abeilles, vers de terre, hirondelles, coquelicots... Autant d'espèces en profond déclin en Nouvelle-Aquitaine. C'est le constat alarmant que dresse ECOBIOSE. Ce comité scientifique régional vient de rendre la première partie de son rapport sur les relations entre biodivesité et agriculture.
Plus de 150 chercheurs, un an et demi de travail. Et un premier constat alarmant : la biodiversité connaît en Nouvelle-Aquitaine, comme ailleurs, un profond déclin.
Dans sa configuration actuelle, la Nouvelle-Aquitaine (Aquitaine, Limousin, Poitou-Charentes) couvre désormais 1/8 du territoire national.
Partant de ce constat, le Conseil Régional a mis en place ECOBIOSE. Un comité scientifique régional interdisciplinaire, chargé d'évaluer les rôles de la biodiversité.
En clair, il ne s'agit pas seulement de dresser un état des lieux. Il faut aussi évaluer comment la biodiversité influe sur les écosystèmes et dans les sociétés humaines.
Les scientifiques ont présenté les premiers résultats de leurs travaux portant sur le "Rôle de la Biodiversité dans les territoires de plaine et de grandes cultures".
Écologue et directeur de recherche au centre d'études biologiques de Chizé (79), Vincent Bretagnolle coordonne ce travail de recherche.
La conclusion principale d'ECOBIOSE est que la biodiversité joue un rôle capital.
Non seulement dans l'économie de l'agriculture, en augmentant les rendements d'un certain nombre de cultures soit à travers la pollinisation soit à travers la qualité des sols.
Mais joue aussi un rôle fondamental sur les services "socio-culturels " comme par exemple la qualité des paysages pour l'écotourisme, ou les ressources de la biodiversité pour des activités comme la chasse ou la pêche.
Le constat est alarmant :
La biodiversité s'effondre dans les plaines agricoles en Nouvelle-Aquitaine : qu'il s'agisse des oiseaux, mais aussi des insectes, des serpents...
L'ensemble de la biodiversité, notamment dans les plaines agricoles intensives, est actuellement en déclin, ce qui à terme menace l'exploitation agricole, et les revenus des agriculteurs.
La chute du nombre de pollinisateurs (comme les abeilles, mais aussi la diminution des micro-organismes, des vers de terre ou des cloportes) pourrait expliquer la baisse de la qualité des sols constatée depuis une vingtaine d'années. Baisse, qui se traduit par une stagnation des rendements agricoles dans la culture, du blé, du maïs ou du colza.
Une sixième crise biologique majeure
Depuis 2015, de nombreux scientifiques alertent sur l'érosion de la biodiversité. Le taux actuel de disparition des espèces, provoqué par l'activité humaine, est entre 17 000 et 100 000 par an, selon les estimations..
Vincent Bretagnolle explique :
Il est difficile d'évaluer le nombre d'espèces qui disparaissent, car on ne connaît pas précisément le nombre d'espèces qui vivent sur Terre. Mais ce qui est certain, c'est qu'un grand nombre d'espèces disparaissent tous les jours, notamment des insectes à cause de la déforestation.
En Nouvelle-Aquitaine, aussi, le danger est réel. Les oiseaux, les papillons, les abeilles sont menacés.
Dans le cadre d'ECOBIOSE, nous nous sommes intéressés à la disparition lente mais massive, générale, de la biodiversité dans son ensemble, précise Vincent Bratignolle.
Un état des lieux régional, qui rejoint le bilan 2018 publié ce lundi par l'Agence Française pour la Biodiveristé.
Il décrit une baisse de ces espèces de 30 % entre 1989 et 2017.Les espèces d'oiseaux des milieux agricoles ont disparu à un rythme assez effarant depuis 30 ans, commente Julien Massetti, chef de projet à l'AFB.
Et les oiseaux ne sont pas les seuls menacés.
Les effectifs de chauves-souris, mammifères insectivores, ont diminué de près de 40 % en métropole en dix ans, selon l'Office National pour la Biodiversité.
L'OFB rappelle que "métropole et outre-mer confondus, près d'une espèce vivante sur trois est en danger de disparition".
L'Office pointe du doigt plusieurs menaces pesant sur les 180.000 espèces présentes sur le territoire français, en premier lieu l'utilisation des pesticides par l'agriculture.
En Nouvelle-Aquitaine, Vincent Bretagnolle plaide pour la promotion de l'agro-écologie :
C'est un type d'agriculture qui mêle agronomie et écologie et dont les solutions sont fondées sur la nature.
Les chercheurs impliqués dans le projet ECOBIOSE vont poursuivre leur travail. Ils publieront en avril 2019, un livre complet sur l'état de la biodiversité dans les 12 départements de Nouvelle-Aquitaine.