L'ex-avocat et mandataire de Liliane Bettencourt, Pascal Wilhelm, poursuivi à Bordeaux pour abus de faiblesse contre la milliardaire, s'est défendu jeudi de tout "conflit d'intérêt" ou contradiction dans cette affaire portant sur des centaines de millions d'euros.
Pascal Wilhelm est notamment soupçonné d'avoir poussé la richissime héritière de L'Oréal, alors qu'elle était affaiblie psychologiquement, à investir 143 millions d'euros dans une entreprise appartenant à l'entrepreneur audiovisuel Stéphane Courbit, lui aussi jugé par le tribunal correctionnel de Bordeaux pour "abus de faiblesse".Les deux hommes se sont connus en 2006, lors d'une affaire les opposant, avant que Me Wilhelm ne devienne en 2008 l'avocat de la société de jeux en ligne Betclic, propriété de M. Courbit.
M. Courbit a assuré jeudi au tribunal n'avoir rencontré Liliane Bettencourt qu'une seule fois, en décembre 2010, durant un bref rendez-vous. D'après le dossier d'instruction, celle-ci aurait d'ailleurs pris l'entrepreneur pour un "chanteur".
Le 23 janvier, la société Lov Group Industrie (Betclic, Direct Energie, MyMajorCompany, etc.) de M. Courbit a annoncé avoir conclu un accord pour la restitution des fonds investis par la milliardaire, qui a donc retiré sa constitution de partie civile à l'encontre de l'ancien associé de l'animateur de télévision Arthur.
Un conflit d'intérêts ?
Entendu pour la première fois par le tribunal qui examinait jeudi sa personnalité, Me Wilhelm a notamment dû s'expliquer sur un "conflit d'intérêt" mis en évidence par le tribunal.L'avocat d'affaires parisien de 53 ans est entré au service de Liliane Bettencourt à l'été 2010 sur les conseils de Patrice de Maistre, ancien gestionnaire de la fortune de l'héritière et autre prévenu de cette affaire, qu'il connaissait de longue date. Or Me Wilhelm a reconnu qu'il avait parallèlement conseillé Patrice de Maistre en juillet 2010 lors de sa garde à vue dans le cadre de l'enquête déclenchée par la plainte de Françoise Bettencourt-Meyers fin 2007.
"Mon cabinet a cessé toute activité pour Patrice de Maistre en octobre 2010", a assuré Me Wilhelm à la barre.
Le président Denis Roucou s'étonne de cette concomitance : il n'y avait pas "d'intérêts opposés à l'époque" entre Patrice de Maistre et Liliane Bettencourt, estime l'avocat, visiblement mal à l'aise. "Vous avez suivi des cours de déontologie ?", renchérit la défense des parties civiles.
Me Wilhelm se défend en indiquant avoir fait l'objet de procédures disciplinaires et déontologiques de l'ordre des avocats qui, selon lui, l'ont blanchi.
L'avocat doit également répondre de "complicité d'abus de faiblesse". Il est soupçonné, en tant que mandataire de Liliane Bettencourt, d'avoir facilité l'obtention par Alain Thurin, l'ex-infirmier de la vieille dame, d'un testament le désignant comme bénéficiaire de 10 millions d'euros.
Alain Thurin est entre la vie et la mort après une tentative de suicide le 25 janvier, la veille de l'ouverture du procès.
Me Wilhelm a assuré qu'il avait "confiance" en Alain Thurin. "Il éteignait les incendies!" estime l'avocat, pour qui "il y avait énormément de conflits entre les gens du personnel" et au sein de la famille dans l'hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine).
Durant l'instruction, l'avocat avait pourtant déclaré que "les deux pires de ceux qui essayaient de vampiriser Mme Bettencourt était la coiffeuse et Alain Thurin", a rappelé le tribunal.
Les audiences devaient se poursuivre jeudi après-midi par les examens de personnalité de Patrice de Maistre, puis de l'ex-ministre UMP Eric Woerth, poursuivi pour "recel".