Île d'Oléron : des capsules d'œufs de raie transformées en engrais pour le jardin

Dans le pays de Marennes-Oléron, l'étude scientifique sur les raies a débouché sur une trouvaille : un fertilisant naturel à base de poussière de capsules d'œufs de raie.

Courbés en deux, le regard vissé sur le sol. C'est une froide journée de décembre mais ils sont une quarantaine à arpenter les plages de l'île d'Oléron (Charente-Maritime). Répartis par petits groupes, ils fouillent cinquante kilomètres de côtes, dont l'immense étendue de sable et de galets de la plage des Huttes à Saint-Denis-d'Oléron. De temps à autre, l'un d'entre eux s'arrête et ramasse quelque chose qui ressemble à une algue un peu noirâtre, un peu soufflée en forme de scarabée. C'est une capsule d'œuf de raie.

Comme un cueilleur de champignon, Thierry a appris à les reconnaître au fil des mois. Bénévole comme tous ici, il sait aussi où les dénicher. "Je suis arrivé là, je n'y connaissais rien" explique-t-il "maintenant je sais qu'on en trouve le plus quand il y a de la laisse de mer parce qu'elles s'accrochent sous les algues". Et ce matin, la récolte est abondante. Il y en a des milliers échouées sur le rivage, vides de leurs petits occupants partis rejoindre le large. 

Ramasser les capsules d'œufs de raies, c'est une drôle d'histoire qui a débuté sur l'île d'Oléron il y a une dizaine d'années sous le nom de code "CapOeRa" (comme Capsules d'Œufs de Raies). Relayé par le CPIE local, le centre permanent d’initiatives pour l’environnement de Marennes-Oléron, basé à La-Brée-Les-Bains, le programme visait surtout à "améliorer nos connaissances sur ces espèces" explique le chargé de mission.

De la poussière de capsules

660.000 capsules de raies ramassées plus tard, les résultats sont là. "Aujourd'hui, on a une belle image de ce qui se passe dans l'océan, et peut-être qu'un jour, grâce à ces données, on pourra prendre des mesures plus adaptées pour préserver les raies" espère Nathan Ropers. 

Oui mais voilà, 660.000 capsules, cela fait beaucoup, beaucoup de volume. Et de poids. 800 kilos au total accumulés au fil du temps. La question taraudait donc l'équipe : que faire de toute cette matière organique ? 

"L'idée nous a trotté dans la tête pendant longtemps" reconnaît Zachary Godin, chargé de projet au CPIE. "Et puis on a trouvé une société qui a mis au point un procédé pour transformer les capsules en une poudre équivalente au broyat de corne de vache. Mélangé avec du terreau c'est un super fertilisant"

Unique au monde

Faire de l'engrais vert à base de poussière de capsules d'œufs de raie, il fallait y penser. "C'est vrai que c'est unique au monde" plaisante Zachary Godin. Comme beaucoup, il n'imaginait pas que l'étude scientifique participative puisse déboucher sur une telle "trouvaille". Et un tel succès. 

En quelques semaines, il s'est déjà vendu près de 300 sachets. Riche en azote et en potassium, la poussière de capsules a de solides arguments. "Pour un pot de fleur, il faut une cuillère à soupe. Pour les tomates, vous pouvez aller jusqu'à une poignée".

Convaincu par les conseils de l'équipe, Jo s'est laissé tenter. Après avoir participé au ramassage, il est reparti avec son petit paquet. "On va voir ce que ça donne" lance-t-il "mais si on fait son jardin soi-même, autant ne pas mettre de produits chimiques."

A cinq euros les 500 grammes, la recherche du gain n'est évidemment pas l'objectif de l'équipe du CPIE. "Nous ce qu'on veut c'est sensibiliser le plus grand nombre" assure Zachary Godin. "Si tout le monde pouvait avoir son petit pied de tomate ou sa jardinière fertilisé avec de la poussière de capsules, ce serait magique."

Dans le pays de Marennes-Oléron, l'étude scientifique sur les raies a débouché sur une trouvaille. ©Barbara Gabel, Killian Moreau et Martine Sitaud, France Télévisions

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