"C'est inadmissible" : les joueuses de rugby du collège Jean-Guiton privées des phases finales du championnat de France UNSS

C'est une vraie désillusion pour l'équipe féminine de rugby du collège Jean-Guiton à Lagord, en Charente-Maritime. Pour des raisons de sécurité et de budget, elles ne pourront pas participer aux phases finales du championnat de France UNSS (Union nationale du sport scolaire).

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C'est une cruelle déception pour l’équipe féminine de rugby du collège Jean-Guiton, située à Lagord, en Charente-Maritime. À une semaine des phases finales du championnat de France UNSS (Union nationale du sport scolaire), elles ont appris qu’elles n’allaient pas participer.

"Des gamines sont rentrées chez elles en pleurant"

Le principal de l'établissement a déclaré forfait, faute de pouvoir financer un car en direction de la commune du Pontet, près d'Avignon, dans le Vaucluse, lieu de ces phases finales. Une inégalité criante pour leurs parents, alors que l’équipe masculine se déplacera dans l’Indre pour la même compétition. "On a eu des explications avec le proviseur, qui ne nous a pas convaincus", fulmine Fanny Sarrion, mère de l'une des joueuses de cette équipe. "Lorsque l’on parle de problème de budget, alors qu’il manquait 500, voire 1 000 euros, pour faire partir les filles, j’ai du mal à m’en contenter. Je pense que ce sont des sommes que l’on peut facilement trouver."

Comme les autres parents, Fanny Sarrion ne décolère pas face à cette décision jugée incompréhensible. "On reproche aussi le fait que l’équipe féminine ait été traitée à part, car son déplacement était plus loin. Mais on le savait à l’avance, puisque le lieu du championnat de France a été donné un an avant. Il y a un budget UNSS, il est global : on ne peut pas faire partir seulement une seule équipe. Quelle image renvoie-t-on à nos filles quand on leur dit : 'tu as 14 ans, les garçons partent et pas toi'. Ce ne sont pas les valeurs que je veux transmettre à ma fille."

Ne pas les envoyer jouer ces phases finales est comme recevoir un coup de couteau dans le dos pour les joueuses, mais aussi pour les familles. "À un mois du brevet, à 15 jours du championnat de France pour lesquels elles se sont préparées depuis trois voire quatre ans, c’est inadmissible. Des gamines sont rentrées en pleurant, et qui sont encore aujourd’hui très perturbées", évoque Benoît Durivaud, père de l'une des joueuses.

"Il y a plusieurs jeunes qui ont été dégoûtées, qui ne sont plus motivées, et qui ont dit à leurs parents que le rugby, c’était terminé. Certaines se projetaient d’aller en section rugby au lycée et qui ont laissé tomber. Elles ont perdu leur motivation, leur envie de jouer", conclut Fanny Sarrion.

Une décision sécuritaire, selon l'Académie

Sur les réseaux sociaux, les joueuses ont obtenu le soutien de fans de rugby comme de politiques locaux. Tous pensent qu’il y aurait dû y avoir d’autres solutions, comme Sylvie Guerry-Gazeau, vice-présidente de la Communauté d’agglomération de La Rochelle chargée de l'égalité femmes-hommes. "C’est une erreur grave, pas seulement pour cette équipe, mais aussi pour toutes les valeurs de l’Éducation, les valeurs du sport, du travail en équipe. On pousse les jeunes à s’engager, à travailler, à s’impliquer, à s’investir, pour finalement leur dire que ce n’est plus possible. Sans avoir passé de coup de fil pour obtenir des subventions, que ce soit de la commune, du Stade rochelais, ou lancer une cagnotte participative." 

"C’est bien la preuve qu’il n’y a pas encore de notions d'égalité garçons-filles dans le sport, y compris au niveau d’un collège et donc de l’Éducation nationale, ajoute Sylvie Guerry-Gazeau. J’imagine la frustration de ces jeunes filles, cela doit être terrible. Il s’agit d’une finale nationale, pas du département : pour motiver les jeunes, je trouve ça moche."

C’est une décision plutôt axée sur une problématique de sécurité.

Mahdi Tamene

Directeur académique des services de l'Education Nationale en Charente-Maritime

 

Si le Directeur des services académiques de la Charente-Maritime, Mahdi Tamene, admet une décision regrettable pour les élèves, il soutient le principal. "Il y a eu un désistement, en raison de problématiques financières et logistiques. Le chef d’établissement n’a pas décidé cela tout seul, il a un comité directeur à ses côtés qui gère l’ensemble des décisions importantes relatives aux sections sportives. Cette décision était fondée sur des éléments essentiels qui sont la sécurité, qui n’était pas assuré en raison des contraintes logistiques, et sur des contraintes financières." 

"Le projet, tel qu’il était monté, ne permettait pas de mettre les élèves en sécurité avec de nombreux chauffeurs dans des minibus sur un trajet extrêmement long de 10 heures de trajet, avec près de 700 km. C’est une décision plutôt axée sur une problématique de sécurité, précise Mahdi Tamene. C’est regrettable, ce n’est pas du tout la politique académique, qui défend l’égalité filles-garçons et qui défend le sport féminin. On fera mieux pour l’an prochain."

Pour les 16 joueuses du collège Jean-Guitton, cette fin de saison et de collège aura un goût amer. Certaines ont pris la décision de ne pas continuer le rugby l’année prochaine.

La Communauté d'Agglomération de La Rochelle apporte son soutien

Ce jeudi 30 mai, la Communauté d'Agglomération de La Rochelle a communiqué sur ce sujet : "Elles avaient gagné sur le terrain le droit de défendre leurs chances au plus haut niveau UNSS. Elles en ont été arbitrairement privées par une décision unilatérale, créant une opposition d’un autre âge entre filles et garçons. Le message envoyé par le retrait de cette équipe de la suite de la compétition ne s’accorde pas avec les valeurs d’équité et de sportivité qui sont au cœur de nos engagements en faveur du sport. Le sport féminin en est une composante essentielle."

"Les femmes et hommes élus du Bureau communautaire de l’agglomération de La Rochelle exigent que les équipes féminines de notre territoire soient toutes accompagnées dans la poursuite de leur parcours sportif et tiennent à apporter tout particulièrement leur soutien aux membres de l’équipe de rugby féminine du Collège Jean Guiton ainsi qu’à leurs proches face à ce forfait inacceptable."

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