Confiné, le rochelais Yannick Bestaven attend avec impatience de prendre le départ du Vendée Globe

C'est forcément dans une atmosphère particulière que sera donné dimanche le départ du Vendée Globe. En pleine crise sanitaire, les marins partiront en toute discrétion, sans public ni bateaux accompagnateurs. À La Rochelle, Yannick Bestaven se veut philosophe et pense déjà à sa navigation.

Dimanche, à 13h02, Yannick et ses 32 collègues marins largueront les amarres et partiront vers le tour de cette planète qui tourne si peu rond en ce moment. Dès que les équipiers du skipper charentais auront envoyé la grand-voile et quitter le bord en se jetant à l’eau, il laissera derrière lui le coronavirus, les États-Unis et le championnat de Top 14 de son cher Stade Rochelais. Il n’aura alors plus qu’une idée en tête : faire avancer son bateau et revenir le plus vite possible aux Sables d’Olonne. Circumnavigateur en solitaire, c’est forcément, par définition, un boulot un peu… égoïste. Même si, évidemment, à terre, ça ne se bouscule pas au portillon pour prendre leur place.

Joint par téléphone, il avait l’air plutôt détendu. Pourtant, on le sait, ce départ du « Vendée » sera exceptionnel. Pas de public sur les pontons ni sur la fameuse jetée du chenal, pas d’excitation médiatique, pas cette myriade d’embarcations qui accompagne les coureurs jusqu’à la ligne de départ, « pas de Vendée Globe » diront les amateurs frustrés. Yannick, lui, préfère rester zen.

Normalement je devrais être présent sur le village de la course, répondre à plein de médias, faire du «public relation » avec les sponsors et tous ceux qui nous ont aidés. Du coup, là, c’est plus calme. Les journées passent vite parce que j’avais pas mal de rangement à faire avant de partir (rires), ranger la maison, l’hiverner. J’ai fait un peu de sport, un petit tour sur Oléron, je me suis bien occupé l’esprit pour être le plus serein possible. C’est bizarre de toute façon parce que le fait de savoir que l’on part dans quelques jours pour deux mois et demi de mer, ce n’est pas anodin. Mais je ne me prends pas la tête avec cette histoire de départ à huis clos ou pas. Moi, je pars faire ma course et j’espère qu’on pourra emmener beaucoup de gens par procuration avec nous à bord et les faire rêver.

Yannick Bestaven, skipper de "Maître Coq" 

Et puis il y a cette maudite épée de Damoclès, ce test du COVID qu’il devra effectuer 48 heures avant le départ. Cela fait quinze jours que lui et toute son équipe se sont mis en mode « confinement ». Même Roland Jourdain est en quarantaine. C’est lui, « Bilou », qui, dans une hypothèse que personne n’ose imaginer (pas même lui), pourrait remplacer Yannick au dernier moment. « Je vais peut-être lui faire une petite blagounette ! », rigole le rochelais. Il faut bien s’amuser. Ça évacue la pression.

La pression ? Y en a un petit peu bien sûr, mais c’est nous qui nous la mettons tout seul. Il suffit de ne pas trop y penser. Cela fait trois ans qu’on travaille pour ça. Ce qui est sûr c’est que ça ira mieux le 9 novembre ! C’est un confinement « light ». Je suis sorti, je suis allé faire du sport, me balader sur la plage. J’étais avec mes filles pour leur dernière semaine de vacances avant la reprise de l’école. Mais déjà avant le confinement officiel, je n’allais plus dans les bars ou les lieux publics, je suis resté dans un cercle très fermé et là, je vais partir avec ma compagne aux Sables.

Yannick Bestaven, skipper de "Maître Coq"

Alors bien sûr, même s’il n’ose pas l’avouer, toute son attention va se tourner rapidement vers les cartes et prévisions météo les jours passant. En 2008 pour son premier Vendée Globe, un démâtage avait mis fin à son rêve de tour du monde dans le Golfe de Gascogne. A priori, ça devrait être plus calme douze ans plus tard.

Je regarde ça d’un œil même si c’est encore loin, mais ça devrait être des conditions agréables pour prendre un départ tranquille. Une dizaine de nœuds plutôt sud ce qui pourrait nous permettre  de nous mettre sur la route directe du Cap Finistere. On devrait « dégolfer » gentiment. On a beau faire les gros bras, la route est longue, c’est mieux de pouvoir se mettre en jambe comme ça pour tout le monde et de partir un peu plus décontracté.

Yannick Bestaven, skipper de "Maître Coq"

C’est sûr, à l’entendre au bout du fil, on comprend vite que le marin est déjà dans sa bulle.

Depuis quelques jours, oui, c’est sûr… il faut s’y mettre de toute façon. Tu te lèves le matin, tu penses à ça, tu te couches le soir, tu penses à ça, la nuit, y a des chances que tu y penses… mais oui, je suis déjà à moitié parti. J’espère qu’à notre retour ça ira beaucoup mieux et qu’il y aura beaucoup de monde à l’arrivée. Ce sera d’autant plus fort.

Yannick Bestaven, skipper de "Maître Coq"

Il le répète, en ces temps chaotiques, c’est un privilège que d’être sur cette ligne de départ. Beaucoup de gens ont travaillé dur pour qu’il y soit, beaucoup d’argent a été investi et lui y a mis toute son énergie. On ne peut que lui souhaiter bon vent et lui donner rendez-vous début 2021 sur la planète Terre.

Reportage de Tanguy Scoazec et Maud Coudrin
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