Pôle Nord, pôle Sud, tour du monde... les plaisanciers sont de plus en plus nombreux à tenter l'aventure. Sur le Grand Pavois, les chantiers de bateaux taillés pour le grand voyage doivent faire face à la demande.
Bien sûr, sur les pontons du Grand Pavois, l'essentiel des visiteurs ne font que rêver sur les bateaux qu'ils n'achèteront jamais. Beaucoup d'entre eux ne naviguent que quelques semaines par an dans les pertuis charentais. Et puis, il y a ceux qui, marins plutôt aguerris, ont de furieuses envies de larguer les amarres pour aller taquiner les glaçons des pôles, loin, longtemps. Dans le milieu maritime, on appelle ça "le grand voyage". Dans le temps, c'était cap sur les Antilles. Mais désormais, le Nord et le Sud ont de plus en plus d'adeptes. Mais, pour ces zones mal pavées (comme on dit), mieux vaut se munir d'une monture adaptée.
"Ils voyagent et ils travaillent"
Les connaisseurs feront donc forcément un détour sur le stand du chantier Alubat des Sables d'Olonne. Avec leurs coques 100% aluminium, les Ovnis sont clairement identifiés comme les bateaux de "grand voyage". Une réputation de voiliers performants et confortables qui séduit de plus en plus de marins prêts à changer de vie. La crise sanitaire, bien sûr, est passée par là. "Le covid a fait qu’on s’est habitué à télé-travailler donc c’est tout à fait possible de travailler à bord de son bateau", explique Hakim Rahmoun, le directeur général d'Alubat, "en 4G ou en satellite, les communications sont devenues accessibles et c’est une vraie tendance. Nos clients continuent leur vie professionnelle en achetant leur bateau et en habitant dessus, quitte à vendre leur maison. Ils voyagent et ils travaillent".
Paul Gury est journaliste spécialisé à Voiles Magazines. Lui aussi confirme cette tendance des navigations au long cours. "Aujourd’hui, il est possible de faire des tours du monde de façon simple et confortable", explique notre confrère, "larguer les amarres pour faire un grand voyage, il y a toujours une part d’aventure et c’est aussi ça qui attire les gens qui sont en quête de changement, de renouveau et de nouveaux paysages. Et puis la plupart des gens qui se préparent à un tel périple, travaillent sur leur bateau, l’équipent, l’achètent pour cette occasion et, au retour, le revendent presque plus cher avec les équipements et rentrent dans leur frais. Il y a tellement de demandes que certains bateaux font cinq fois le tour de l’Atlantique à suivre".
Un projet de vie
"Des tropiques aux grands froids, réalisez vos rêves d'aventure" : le chantier breton Boréal affiche lui aussi tout de suite la couleur. On le sait, malheureusement, à cause du réchauffement climatique, certaines zones de navigation sont devenues accessibles depuis quelques années et de nouveaux horizons s'offrent aux navigateurs. "On n’a jamais eu autant de demandes sur les bateaux de voyages", confirme Jean-François Delvoye, architecte et patron de Boréal, "grand Nord, grand Sud, maintenant les explorateurs ont fait leurs expériences, les aides à la navigation facilitent la chose et passage du Nord-ouest et Patagonie reviennent souvent dans les programmes de nos clients".
"On arrive à fournir, mais les délais qui étaient de deux ans, s’allongent un petit peu", poursuit son partenaire Ertic Vautrin, "mais ce qui est important, c’est vraiment de prendre la décision, d’acter quelque chose. Finalement, le Covid nous a embêté pendant deux ans mais a aussi permis à beaucoup de murir le projet. C’est quelque chose qui ne s’improvise pas, c’est un projet de vie et nous, on est content d’accompagner ces futurs propriétaires dans la réalisation de leur rêve".
"C'est maintenant qu'il faut agir"
La fonte des glaces et le dérèglement climatique, c'est aussi ce qui a poussé Sophie Simonin à mettre le cap sur le Groenland le 29 juin 2020. A bord du Northabout, son association Unu Mondo a embarqué des scientifiques et un photographe pour un premier périple qui leur a permis, entre autre, de documenter le phénomène.
"Tout a commencé en 2019 où on avait été invité sur le Grand Pavois pour présenter notre projet et ça a été un véritable tremplin", explique Sophie, de retour sur le salon nautique, "on a rencontré des partenaires, des entreprises qui nous ont aidés et des journalistes qui nous ont donné de la visibilité. C’est ce qu’on voulait faire, transmettre le message de ce qu’il se passe en arctique et sur le fait que c’est maintenant qu’il faut agir".
Le Northabout est le seul yacht à avoit fait le tour du pôle Nord deux fois. Il lui avait fallu quatre ans la première fois, il y a 20 ans. En 2016, racheté par l'aventurier Sir David Hempleman-Adams, il récidive mais, cette fois-ci, en seulement quatre mois. L'objectif de l'association est de réitérer l'exploit en 2024. "On veut repasser aux mêmes endroits et si possible aux même dates et constater, forcément, la fonte de la banquise", poursuit Sophie, "l’idée, c’est de discuter avec les habitants qui sont dans ces zones le long du passage du Nord-Ouest et du Nord-Est et de voir comment ils se sont adaptés à ce bouleversement". Encore de belles navigations en perspective.