Depuis ce lundi, Pierre Thépot est en déplacement à Kiev pour rencontrer les médecins ukrainiens, et faire le point avec eux sur leurs besoins, notamment matériels, alors que le conflit avec la Russie a profondément bouleversé leur métier et leur quotidien.
Lorsque son téléphone sonne, Pierre Thépot est hésitant. Une alerte vient de retentir, il est encouragé à rejoindre un abri. Arrivé depuis lundi, il découvre le quotidien des habitants et des habitantes de Kiev.
En tant que bénévole pour le Secours Populaire français, il a pris quatre jours de congés pour venir à la rencontre de ses homologues ukrainiens. Le directeur général du Groupe Hospitalier Littoral Atlantique cherche les moyens de poursuivre l'aide de son association envers cette zone de guerre européenne.
Dès le début du conflit, Pierre Thépot a rassemblé une série de matériels médicaux réformés suite à l'achat de nouveaux moyens pour les hôpitaux de Charente-Maritime. Après avoir consulté les besoins des Ukrainiens, le Secours Populaire a pu les acheminer et les livrer à l'Hôpital régional de Kiev en juillet dernier.
Un système hospitalier traumatisé, mais efficace
Pierre Thépot tenait à voir par lui-même l'utilité de l'aide apportée par son hôpital et le Secours Populaire. Habitué des zones de conflit, comme l'Afghanistan ou le Tchad, il a découvert un hôpital qui fait face à la pénurie de personnel et au manque de moyens, mais cet hôpital tient debout : "l'Hôpital Régional de Kiev, c'est comme un CHU, c'est un hôpital de référence," explique-t-il. "L'hôpital s'est retrouvé à traiter de 20 à 90 % d'urgences, c'est poignant, dès le 24 février et la déclaration de guerre, les personnels sont venus comme ils ont pu et ils sont restés plusieurs semaines sans sortir pour soigner les blessés." Il note l'organisation qui règne sur place, héritée d'un "modèle de santé de l'Union Soviétique", et d'après lui, l'action des ONG doit répondre à des demandes très précises : "ils n'ont pas besoin qu'on leur explique comment faire les choses, ils ont juste besoin d'aides concrètes."
Il tient à souligner l'engagement des soignants et des soignantes : "Tous ont un fils, un gendre, un membre de leur famille au front, et ils ne savent pas s'ils le reverront." Pour ce directeur d'hôpital, il est très important de prendre en compte l'impact que ce conflit aura sur eux. Il aimerait développer une aide au long terme pour les accompagner psychologiquement : "soigner des soldats, c'est normal, mais soigner des civils avec des blessures de guerre, un peu moins."
Une visite qui le marquera
En quatre jours, Pierre Thépot aura rencontré les médecins des différents services, en traumatologie et en chirurgie maxillo-faciale, "le service des gueules cassées". Ému de ce temps passé avec le directeur de l'hôpital ukrainien, il a pu constater la reconnaissance des équipes sur place pour l'aide apportée par la France : "ce qui m'a touché, c'est qu'à la fin de la visite, ils m'ont remis un drapeau signé par tous les patients du service," raconte-t-il. "Ils avaient à cœur de montrer qu'ils sont debout, qu'ils ont besoin de réconfort, de se sentir portés par la communauté internationale, et par les hospitaliers français."
Sa visite l'aura aussi mené à la rencontre des habitants de Bucha et d'Irpin, villes voisines de Kiev dans lesquelles il a découvert les immeubles éventrés et la résilience des Ukrainiens et des Ukrainiennes.
Pour rejoindre le terrain, seul, il a pris l'avion jusqu'en Pologne, puis une voiture avec chauffeur jusqu'à la frontière ukrainienne, avant de rallier la capitale en train. Il s'apprête à faire le chemin inverse ce jeudi, pour retrouver son bureau rochelais, dès vendredi.