Comme son projet sportif, récompensé par un très bon début de saison, La Rochelle, 3ème du classement, a construit pierre après pierre son modèle économique, dans le but de devenir à terme un "acteur majeur" du Top 14.
"Notre progression sportive et notre progression économique et structurelle ont été conjointes et s'entretiennent mutuellement", explique Pierre Venayre, le directeur général de ce club centenaire.
Une PME du rugby en copropriété
Avec un budget de près de 20 millions d'euros, les Maritimes sont dans le bas de tableau sur le plan financier (12e sur 14). Une PME du rugby en somme, "mais une PME avec un taux de croissance très rapide. On a doublé notre budget en cinq ans", rappelle Pierre Venayre, ancien centre du Stade lorsque le club était en Pro D2.
Loin du modèle des clubs détenus par un propriétaire ou une entreprise mécène comme le Stade Français, le Racing 92, Montpellier ou Castres, la Rochelle a "pris le parti d'avoir un club qui soit une copropriété", poursuit Pierre Venayre.
"Notre idée, c'est un peu ce que fait le Bayern Munich dont le capital est réparti entre ses partenaires principaux" développe-t-il.
Président depuis 25 ans, Vincent Merling, ancien joueur et patron du groupe de café éponyme, "aurait pu acheter le club 200 fois", selon Pierre Venayre. Au lieu de cela, il détient environ 10% des parts seulement, comme cinq autres entreprises partenaires, tandis que l'association du club est l'actionnaire principal avec 30%.
Les matchs à guichets fermés
La billetterie est une autre force du club, pour les joueurs mais aussi pour le budget, qu'elle alimente à hauteur de 20%. La Rochelle peut compter sur un public qui a fait de Marcel-Deflandre l'un des chaudrons du rugby français: avec 11.400 abonnés pour un stade de 15.000 places qui va passer à court terme à 16.000, le club est le numéro un du Top 14 sur ce plan et a joué ses douze derniers matches à guichets fermés.
"En 2011, quand on est remonté en Top 14 avant de redescendre immédiatement", souligne Pierre Venayre, "on a réalisé que le club avait un potentiel incroyable avec du public venant de Nantes, d'Angers, de Cholet", des villes qui n'ont pourtant pas la réputation d'être très passionnées de rugby. Une "zone de chalandise" de 1,6 million d'habitants, avec des entreprises plutôt florissantes, qui permet de compenser la faiblesse présumée d'une ville moyenne (environ 75.000 habitants).
Le club décide alors, comme une entreprise, de lancer des plans stratégiques. D'abord "Grandir ensemble 2015" pour remonter dans l'élite et s'y maintenir, puis "Écrire notre histoire 2020" pour faire de La Rochelle "un acteur majeur" du Top 14.
Pas de folie des grandeurs
Avec Patrice Collazo aux commandes sportives du navire rochelais au moins jusqu'en 2020, le club bénéficiera d'un centre d'entraînement flambant neuf qui doit être livré en juin: "Apivia Parc" du nom d'une mutuelle partenaire du club.
Un "naming sans lequel le projet n'aurait pas été viable financièrement", estime Pierre Venayre, qui explique que pour trouver leur inspiration, les dirigeants
du club ont visité les installations du Bayern, d'Arsenal ou de Tottenham avant d'imaginer un projet "à la dimension" du Stade Rochelais.
Bien ancrés dans le haut du classement, les Maritimes, qui ont franchi un palier en faisant venir cette saison le 3e ligne néo-zélandais Victor Vito, visent à terme un budget de 22 à 25 millions d'euros pour pouvoir recruter à hauteur du salary cap (10 millions d'euros).
"Notre politique ne sera pas celle du "star system", assure Pierre Venayre.
"Notre rêve, c'est d'avoir une équipe composée de jeunes formés chez nous et d'y adjoindre quelques joueurs de dimension internationale". Pas question donc d'avoir la folie des grandeurs.