Au lendemain de l'attaque, et de la tentative d'incendie, menées par un homme en mairie d'Angoulême, beaucoup se félicitent de cette particularité locale. Depuis 2016, dans cette commune de Charente, les fonctionnaires de police municipaux disposent d'armes à feu.
À l'heure de la pause déjeuner, les employés s'éclipsent rapidement devant notre micro. Quelques-uns acceptent de nous dire quelques mots. L'un d'eux salue le sang-froid de ses collègues, tant les assistantes que les policiers.
Ça confirme la nécessité d’avoir une police municipale armée, parce que, dans des circonstances comme celle-là, heureusement que c’était le cas ici à Angoulême.
SylvainEmployé municipal à Angoulême
Ce mercredi 21 août peu après midi, un homme, muni d'un bidon d'essence, a forcé le passage pour s'introduire au coeur des services municipaux d'Angoulême. Une fois arrivé au premier étage, il a répandu de l'essence dans quatre pièces différentes, bien décidé à déclencher un incendie. Nullement arrêté, ni troublé par la présence sur les lieux de deux secrétaires, il a poursuivi son entreprise sans un mot, mais avec un regard menaçant, aspergeant l'une d'elles de carburant. Une fois échappées de leur bureau, elles donnent, par leurs cris, l'alerte. Deux policiers municipaux tentent alors de maîtriser l'assaillant qui brandit une chaîne et des chiffons enflammés. C'est là que l'un d'eux tire à deux reprises avec son arme de service pour mettre fin à ses agissements.
Ce vendredi soir, la procureure de la République, par le biais d'un communiqué de presse, écarte le motif terroriste, évoquant je cite "l'hypothèse de reproches formulés par l'intéressé envers la mairie d'Angoulême sur fonds de troubles d'ordre psychiques".
>> Récit complet de cette attaque et des dernières évolutions dans cet autre article : https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/charente/angouleme/angouleme-forte-emotion-a-la-mairie-apres-une-attaque-menee-en-solitaire-et-un-debut-d-incendie-3020525.html
Lors d'une conférence de presse ce jeudi soir, le maire de la ville, Xavier Bonnefont, annonce que les policiers impliqués ont été mis au repos, tout comme les assistantes victimes de l'assaut. Il a également commenté l'équipement en pistolet de sa police municipale en ces termes :
Depuis toutes ces années, ils n'ont pas eu besoin d'utiliser leur arme à feu et je m'en réjouis. Cette situation vient confirmer, ou corroborer, que c'était une bonne décision dans une société qui a tendance à se durcir, avec des gens qui, au-delà de faits de délinquance, sont malades psychiquement, psychiatriquement.
Xavier BonnefontMaire d'Angoulême
"Je n'ai pas besoin de l'utilisation d'une arme pour démontrer que ce choix était judicieux, j'en étais convaincu en 2016. Cela ne faisait pas partie de mon projet politique au départ, c'était une demande de nos policiers, ils avaient besoin de se sentir sécurisés pour leurs missions" a-t-il précisé.
Une mesure rare à l'époque dans la région
En 2015, le maire d'Angoulême Xavier Bonnefont, alors récemment élu pour son premier mandat, décide effectivement d'armer ses fonctionnaires de police. Un an plus tard, ceux-ci reçoivent leurs revolvers. Depuis, ils s'entraînent au tir très régulièrement. Le port d'armes nécessite bien sûr une formation et une pratique régulière pour conserver "l'habilitation".
C'était, à ce moment-là, la première police municipale de la région Poitou-Charentes à s'équiper de la sorte.
>> Notre article sur ce sujet au moment de l'annonce : https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/charente/angouleme/la-police-municipale-d-angouleme-bientot-equipee-d-armes-letales-762416.html
Elle fut suivie, cette même année, par plusieurs communes de la Vienne, comme Chauvigny, Châtellerault. Une circulaire du socialiste Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, leur facilitait cette démarche, dans le contexte traumatique des multiples attentats sanglants commis en 2015 (janvier et novembre).
Actuellement, cet usage est beaucoup plus répandu dans chacun de nos départements, à diverses échelles (comme on peut le voir sur cette infographie de la Gazette des Communes, établie à partir des données de 2021).
Généralisation demandée
À la lumière de l'intrusion violente de mercredi à Angoulême, le syndicat de défense des policiers municipaux réclame la généralisation de ce port d'armes à toutes les brigades de polices municipales. Les mairies de certaines grandes villes, comme Bordeaux par exemple, s'y refusent toujours.
Pour vous faire une idée, voici l'évolution comparative du nombre d'agents armés et non armés sur une décennie.
D'après ce syndicat, en 2024, 65 % des policiers municipaux de France seraient équipés d'armes à feu. Son président, Cédric Michel, demande également que les fonctionnaires d'Angoulême soient décorés pour leurs actes.
Le préfet de Charente est venu les remercier pour leur intervention dès ce jeudi matin.
Ce jour, visite du préfet de Charente, Jérôme HARNOIS au commissariat d’Angoulême afin de rencontrer les effectifs qui ont participé à l'intervention hier suite à l'intrusion dans la Mairie d'Angoulême.#Préfet de la Charente pic.twitter.com/2ZmFb1FrCU
— Police Nationale 16 (@PoliceNat16) August 22, 2024
Pour mémoire, et comme toujours en pareille situation, le policier auteur du tir contre l'assaillant fait l'objet d'une procédure judiciaire qui devra établir s'il était bien en état de légitime défense.
En attendant, l'ensemble de la police municipale d'Angoulême reste mobilisé puisque l'accès du public à la mairie passe désormais par un filtrage plus renforcé avec notamment une fouille des sacs.