Après le flou législatif des premiers jours, les auto-écoles se retrouvent désormais confrontées à la situation ubuesque de pouvoir continuer à présenter leurs élèves à l’examen du permis de conduire, sans toutefois être autorisés à les former.
Dans le décret du 29 octobre paru au journal officiel, le gouvernement stipulait que les auto-écoles "peuvent accueillir des candidats pour les besoins des épreuves du permis de conduire", sans plus de précisions sur les cours de conduite. Certains établissements, considérant que tout élève est candidat à l’examen, se sont ainsi engouffrés dans la brèche pour continuer leurs activités durant les quelques jours qui ont suivi l’annonce gouvernementale, jusqu’à ce que les contrôles de police chargés de veiller au respect du confinement ne les obligent finalement à fermer boutique.
► Lire l'intégralité du décret du 29 octobre (Journal Officiel)
Ainsi dans la Vienne, l’ECF de Saint-Georges-Lès-Baillargeaux, comme toutes les auto-écoles du groupe, profitait du flou législatif pour continuer de dispenser les leçons de conduite avant de devoir rétropédaler en catastrophe, rappelant tous ses véhicules en interrompant les cours, séance tenante, après qu’un de ses élèves ait été renvoyé chez lui par la gendarmerie (sans toutefois avoir été verbalisé), alors qu’il se rendait à sa leçon de conduite.
Le gouvernement a depuis précisé son dispositif, stipulant que les auto-écoles ne peuvent pas continuer à dispenser les cours de conduite, mais demeurent autorisés à présenter leurs élèves à l’examen.
Sauf que l’épreuve ne peut pas être dissociée de la formation. A part les élèves qui étaient prêts et qui sont passés en début de semaine, on est bloqués pour la suite. La loi impose un minimum de 20h de cours, mais outre le côté règlementaire, il y a le niveau que les élèves doivent avoir atteint pour mettre toutes les chances de leur côté pour passer l’examen. Notre position est claire, c’est soit tout, soit rien. Si les examens se tiennent, on doit pouvoir former nos élèves pour faire du travail correct, ou alors on arrête tout.
Les élèves de leur côté se retrouvent lourdement pénalisés dans leur apprentissage. Vanessa a commencé ses cours de conduite en janvier.
Son moniteur estime que dix heures de conduite seront necéssaire pour remettre Vanessa à niveau, soit un surcoût de 400 €.Avec le confinement du mois de mars, j’ai dû attendre juillet pour reprendre mes leçons. Et là, reconfinement! A chaque interruption, comme je ne peux pas conduire, je perds ce que j’ai appris. Il faut donc recommencer, c’est des heures en plus. Et au-delà de ça, ça me pose aussi des problèmes pour mes transports personnels parce qu’ici on est en zone rurale, y a pas beaucoup de trains. En plus en ce moment y a pas mal de travaux qui entrainent des annulations. Du coup c’est compliqué. C’est pour ça que je voulais avoir mon permis rapidement, parce qu’avec une voiture c’est beaucoup plus simple. En m’y prenant en janvier, même en prenant mon temps, j’aurais dû l’avoir en six mois. Là ça va bientôt faire un an ….
Reportage de Jérôme Deboeuf, Cécile Landais et Alain Bortot