Élections législatives. Après l'annulation du scrutin, huit candidats pour un siège en Charente

Pour la première circonscription de Charente, 2023 est également une année d’élection. Un petit peu plus de six mois après les législatives, l’élection est annulée et doit donc se rejouer les 22 et 29 janvier prochains. Pour les huit candidats, la campagne est déjà lancée.

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On ne reprend pas tout à fait les mêmes, et on recommence. Suite au recours de René Pilato (Nupes), défait au second tour de l’élection législative de la 1ère circonscription de Charente, le Conseil constitutionnel a annulé l’élection de Thomas Mesnier, candidat de la majorité présidentielle. En cause, les nombreux bulletins "irrégulièrement exprimés" alors que seules 24 voix séparaient les deux candidats du second tour. Les électeurs sont appelés aux urnes les 22 et 29 janvier 2023.

Sur les huit candidats investis, seuls quatre étaient déjà présents en juin 2022. Les deux finalistes, Thomas Mesnier et René Pilato sont de la partie, tout comme Alice Clergeau pour Les Républicains et Olivier Nicolas, le candidat de Lutte Ouvrière. Les deux partis d’extrême-droite, le Rassemblement National et Reconquête ! seront incarnés par deux nouvelles têtes que sont respectivement Florent Bénétreau et Serge Bondon. Mais deux nouveaux postulants sont également présents : Dominique Souchaud (Cap21) et Samuel Cazenave (sans étiquette).

Quatre candidats repartent pour un tour

Quelques mois après le scrutin de juin 2022, les électeurs charentais sont de nouveaux appelés aux urnes. Une situation particulière à laquelle se préparait tout de même certains candidats avec en tête, René Pilato, auteur du recours auprès du Conseil constitutionnel. "C’était une hypothèse sérieuse", avoue de son côté le député sortant Thomas Mesnier, tout en assurant ne "pas y avoir pensé" au cours de ses premiers mois de mandat.

Alice Clergeau également s’y était préparée. "Je reviens avec l’expérience d’avoir déjà mené une campagne", déclare-t-elle. La candidate LR de 24 ans qui avait obtenu 5,24 % des voix au premier tour n’a pas hésité au moment de représenter sa candidature. De son côté, le candidat Lutte Ouvrière, Olivier Nicolas, informaticien de 41 ans, a tout de suite saisi l’opportunité de "faire entendre la voix du camp des travailleurs" à travers cette législative partielle.

Les difficultés des investitures pour l’extrême droite

Pour d’autres, la candidature a été moins naturelle. La candidate du RN en juin 2022, Anna Martinese, n’a pas souhaité se représenter. "Le parti m’a demandé si je voulais y retourner mais après mure réflexion j’ai préféré laisser ma place a quelqu’un de plus jeune", nous raconte-t-elle. À sa place, le RN a choisi de faire confiance à Florent Bénétreau qui mènera à 37 ans sa première campagne électorale. Une nomination taxée directement de parachutage par ses adversaires politiques. Chef d’entreprise à la tête d’une agence de commercialisation hôtelière à Paris Florent Bénétreau assure être revenu en Charente dont il est originaire depuis la pandémie de Covid-19.

Il entend incarner la rupture avec Anna Martinese qui "avait commencé son militantisme sous Jean-Marie Le Pen, à l’époque des déboires du FN". "Je rejoins plutôt le RN sur la ligne sociale incarnée par Marine Le Pen, déclare le nouveau candidat. Je ne cache pas que si j’avais 20 ans de plus, je ne me serai pas engagé au FN. Cette ligne ne me parlait pas du tout."

Malgré la sérénité de façade, l’investiture de Serge Bondon par Reconquête ! n’a pas été tout à fait évidente non plus. "Il n’y a pas de sujet, j’aurais pu y aller mais finalement Serge Bondon, que je vais assister, était le candidat tout naturel et légitime", assure Alain Janot, délégué adjoint de Reconquête ! en Charente.

Pourtant, le candidat présenté par le parti d’Éric Zemmour qui avait obtenu 4,27 % en juin dernier, Dominique de Lorgeril, livre a France 3 une autre version. "Quand on m’a demandé de me représenter, j’ai refusé en disant qu’il ne fallait pas de candidat Reconquête !, raconte-t-il. Je ne me voyais pas essayer d’obtenir 5 % uniquement pour le parti et participer à la division des voix." S’il assure être convaincu par les idées d’Éric Zemmour qu’il soutient toujours, l’ancien candidat regrette l’absence d’alliance avec le RN : "Il vaut mieux être uni et essayer d’avoir quelqu’un au second tour."

À sa place, Reconquête ! sera incarné par Serge Bondon, chef d’entreprise et consultant aujourd’hui retraité. Celui-ci avait déjà tenté d’être candidat au premier scrutin, sans que sa candidature soit retenue par le parti. Trésorier du parti en Charente, l’homme de 72 ans a tout de même participé aux premières campagnes. Mais Reconquête ! ne se fait pas d’illusions sur cette législative partielle. "Si on fait 5 %, pour se faire rembourser la campagne, ce sera déjà pas mal", souffle Alain Janot. Il en va de même pour Serge Bondon qui estime qu’en dehors de la Nupes, de la majorité présidentielle et du RN, "il sera difficile pour les autres partis de tirer leur épingle du jeu".

Des candidatures inédites

Si Corinne Berthelot, candidate Écologie au Centre - qui avait obtenu 3,05 % des voix au 1er tour - ne se représente pas, elle sera suppléante de Dominique Souchaud. L’ancien maire de Saint-Sulpice-de-Cognac n’est autre que le cousin de l’ancienne suppléante. Il se présentera sous la bannière Cap21, le mouvement de Corinne Lepage, ministre de l’environnement sous Jacques Chirac.

"En dehors de ce qu’incarnent certains ‘bobos’, nous sommes les seuls à promouvoir l’écologie avec Corinne Le Page", martèle Dominique Souchaud qui entend se placer au centre de l’échiquier politique. "Nous voulons offrir une autre alternative. Je suis de centre droit mais nous pouvons aussi travailler avec les socialistes non Nupes", continue celui qui se gargarise d’être à l’origine de la candidature de Francis Lalanne sur la 3e circonscription de Charente en juin dernier.

Enfin, un dernier candidat, ancien élu charentais tente de faire son retour dans la région. Après 17 ans passés à la mairie de d’Angoulême, l’adjoint de Xavier Bonnefont avait démissionné en mars 2018 suite à des divergences. Élu également au conseil départemental de 2015 à 2021, il ne s’était pas représenté pour intégrer le cabinet ministériel de Jean-Michel Blanquer. Pourtant, Samuel Cazenave l’assure, il n’est pas un candidat supplémentaire de la majorité présidentielle, ce dont ne se privent pas de l’accuser ses opposants. "J’ai postulé pour une mission au cabinet de Jean-Michel Blanquer portant sur l’éducation et l’écologie qui m’intéressait fortement, se défend-t-il. Il faut pouvoir s’engager sur un projet particulier, sinon comment faire ?"

C’est tout de même grâce à l’échec de l’ancien ministre de l’Éducation nationale aux législatives de juin dernier - qui lui a valu son poste et a ainsi libéré tout son cabinet de ses engagements – que Samuel Cazenave peut se présenter aujourd’hui en Charente. Dans sa position de "centriste de toujours", il souhaite s’engager dans une démarche "hors partis", capable de "travailler avec tout le monde". "Sauf les extrêmes qui ne portent pas les valeurs républicaines", précise-t-il.

Une abstention redoutée

Alors qu’en juin 2022, plus de 50 % des électeurs de la 1ère circonscription de Charente s’était abstenu, le caractère inhabituel de ce scrutin fait craindre le pire aux candidats pour la participation. Interrogés, les candidats ne peuvent que constater un désintérêt pour les élections. "Les gens connaissent même assez peu le périmètre de leur circonscription", constate même Thomas Mesnier.

D’autant plus que le second tour se situe le jour de la clôture de la 50e édition du Festival de la Bande Dessinée d'Angoulême, le 29 janvier. Et cette fois-ci, contrairement à juin, les élections ne seront pas un sujet national. "C’est à nous d’attiser la curiosité des électeurs pour cette législative partielle", considère Alice Clergeau. De son côté, Florent Bénétreau préfère ne "pas imaginer le taux d’abstention dans ces conditions".

Au cours de cette courte campagne, les thématiques devraient être similaires au scrutin initial. À quelques exceptions près, les problématiques énergétiques et de pouvoir d’achat s’étant accentuées depuis. "Il faut arrêter l’écologie punitive", pointe Dominique Souchaud qui entend proposer autre chose. "Les gens en bave réellement et il faut trouver des solutions", lance quant à lui Samuel Cazenave.

Mais l’actualité récente devrait amener son lot de nouveaux sujets. Comme le relève Olivier Nicolas : "On a beaucoup parlé des grèves SNCF en pointant les grévistes mais il va falloir également parler des bénéfices records de la SNCF qui s’élevent à 2,2 milliards d’euros cette année." Mais la campagne va également tomber en plein cœur du débat sur la nouvelle réforme des retraites voulu par le gouvernement. "Cela pourrait nous rapporter des voix", espère René Pilato. Thomas Mesnier attend lui un "débat intéressant".

Les premières offensives sont lancées

Après six mois passés avec le nouveau visage de l’Assemblée nationale, le contexte politique est également bien différent. Ce dont ne se privent pas d’utiliser tous les candidats. "La Nupes ne peut plus jouer la carte de Mélenchon Premier ministre, cela change pas mal de choses", veut croire Alice Clergeau. Si René Pilato avoue que la dynamique n’est pas la même, il rappelle tout de même l’importance de "chaque voix de député" dans l’hémicycle. "Il y a eu dix 49-3, je comprends que ça ne donne pas forcément envie de voter, attaque René Pilato. Mais justement si les gens ne vont pas voter après ce qu’a fait Mme. Borne avec les LR et le RN, je crois qu’on est mal. Avec quelques députés Nupes en plus ça pourrait faire la différence."

Thomas Mesnier lui veut défendre son bilan et reprendre son travail là où il l’avait laissé. Si pour le vice-président du groupe Horizons à l’Assemblée, ne pas être réélu ferait tâche, il se dit "déterminé pas sous pression". "Je n’envisage rien d’autre que la victoire", déclare-t-il, tout en pointant le bilan des oppositions à l’Assemblée nationale qui y font "régner le chaos". Le bilan de ces six premiers mois d’Assemblée nationale assez mouvementée revient dans la bouche comme pour chaque candidat pour dénoncer leurs opposants. Avec comme cible privilégiées la majorité présidentielle et la Nupes, les deux candidatures au second tour de juin 2022.

"Il y a d’une part le blocage systématique, de l’autre l’outrage et l’absence de respect à nos institutions, dénonce Samuel Cazenave. Moi, je veux être dans une radicalité positive." Quand d’un côté on invoque le "déni de démocratie" que représenterait le 49-3, en face on pointe l’absence d’une opposition constructive. "On voit bien avec l’éclatement de la Nupes et tous ses problèmes que ce n’était pas la solution", critique Serge Bondon.

"La Nupes est une opposition qui crie plus qu’autre chose, attaque à son tour Florent Bénétreau. Répondre au 49-3 en faisant des motions de censure pour faire tomber le gouvernement, c’est ne pas respecter le choix des électeurs." Ce à quoi répond directement René Pilato : "Les droites et l’extrême-droite se sont alliées pour bloquer nos propositions de Smic à 1 500 euros, d’impôts sur la fortune, de blocage des prix des loyers,…" Avant même tout débat, chacun se rend coup pour coup. La campagne est bien lancée.

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