Comme plusieurs autres départements du sud-ouest, la Charente-Maritime est placée en alerte orange pour les pluies et les orages jusqu'à demain lundi 11 mai à 12h. Les cumuls de pluie pourront être importants et les orages de grêle possibles. Les viticulteurs se préparent pour protéger leurs vignes.
En quelques minutes, un orage de grêle qui s'abat sur une vigne peut faire de très gros dégâts et détruire une récolte. Tous les viticulteurs le savent et le craignent. Pour limiter l'impact de ces phénomènes météo, les viticulteurs de Charente et Charente-Maritime disposent d'un réseau de diffuseurs d'iodure d'argent disposés en amont de leurs vignobles.
Des microparticules contre les grêlons
Ces diffuseurs envoient dans l'atmosphère des milliards de particules d'iodure d'argent qui vont saturer les nuages et transformer la grêle en pluie ou au moins réduire la taille des grêlons. Ces microparticules parviennent à dissoudre la glace en petits morceaux nettement moins agressifs pour les cultures que les gros grêlons.Ce système de protection qui compte aujourd'hui une centaine de diffuseurs est jugé efficace à 50%. Il est géré par les groupements de viticulteurs de Charente et Charente-Maritime et repose sur un réseau de bénévoles qui le mettent en action.
C'est le cas de Bernard Georgeon. Il est viticulteur à Segonzac et préside le Syndicat intercommunal de lutte contre les fléaux atmosphériques (SILFA) de Charente. Un générateur est installé dans son jardin et ce dimanche 10 mai, après avoir reçu l'alerte lancée entre 8h30 et 22h, il l'a mis en fonctionnement.
Il diffuse 200 milliards de particules à la seconde. En fait il y a de l'air sous pression dans la bouteille qui pousse le liquide sur le gicleur qui est allumé et ensuite dans la cheminée qui diffuse les particules.
-Bernard Georgeon, viticulteur à Segonzac
Actionner les diffuseurs quatre heures avant l'orage
Ce réseau de protection existe depuis plusieurs années dans les deux départements charentais mais il a été renforcé après les violents orages du 27 mai 2016. 5000 hectares de vignes de l'appellation Cognac avaient alors été ravagés par la grêle .Depuis, le réseau est passé de 60 à une centaine de diffuseurs. Les installations ont même été renforcées sur l'estuaire de la Gironde d'où les orages, venant de la mer, entrent dans les terres. Le maillage du territoire a été établi en collaboration avec des météorologues.
Mais, ces prévisions ne sont bien entendu pas infaillibles et il existe encore des parcelles de vignobles non protégées qui pourraient être victimes de la grêle dans l'avenir. Pour Nicolas Tricoire, ces évènements permettront peut-être de compléter la carte des diffuseurs qui pour être efficaces doivent être placés en amont des terres à protéger et être actionnés quatre heures avant l'arrivée de l'orage.Ils nous ont dit que notamment en Charente-Maritime, les orages suivent en général des flux d'ouest en est. Mais là, ils ont tendance à aller du sud vers l'est donc on a fait installer des diffuseurs de façon à combler ces manques.
Nicolas Tricoire, référent aléas climatiques à l'UGVC (Union Générale des Viticulteurs pour l'AOC Cognac
A l'heure actuelle, certains de ces diffuseurs sont installés en Gironde pour pouvoir protéger les vignobles du sud de la Charente et de la Charente-Maritime dans l'appellation Cognac. Aujourd'hui, le réseau est géré au plan départemental et les viticulteurs charentais souhaiteraient une vraie coopération au niveau régional pour pouvoir prendre en compte tous les différents secteurs des vignobles charentais et bordelais.
Depuis 2016, 200.000 euros ont été investis pour étendre le réseau des diffuseurs d'iodure d'argent sur la plupart des couloirs orageux en Charente.Ceux qui sont en amont protègent ceux qui sont en aval. Tout le monde à l'échelle de la région Nouvelle-Aquitaine est concerné.
-Nicolas Tricoire, référent aléas climatiques à l'UGVC (Union Générale des Viticulteurs pour l'AOC Cognac
Reportage de Jérôme Deboeuf, Pascal Simon et Nadine Pagnoux-Tourret :