Ce n'est pas vraiment une surprise, les mesures sanitaires contre la propagation du Covid modifient nos comportements. Restaurants fermés, parcs ouverts, télétravail, commerces essentiels, les déplacements des Français sont modifiés. Focus sur la Nouvelle-Aquitaine.
Les populations ont-elles modifié leurs habitudes de déplacement lors des précédents confinements ? Le télétravail est-il en hausse ou en baisse ? Les restrictions sont-elles respectées ? Ces indicateurs sont utiles pour déterminer si les mesures sanitaires sont efficaces. A l'échelle d'un pays, d'une région, d'un département, ces données peuvent être intéressantes pour cibler les décisions par exemple. Depuis le début de la crise Covid, en mars 2020, deux géants du web, Google et Apple mettent à la disposition de tous, des données de géolocalisation.
Comment ça marche ?
Tous les possesseurs de smartphone ont la possibilité d'activer la géolocalisation sur leur appareil. C'est notamment utile pour une navigation GPS ou encore pour obtenir des informations ciblées en fonction de l'endroit où l'on se trouve. Google et Apple collectent ces informations. Pour Apple, "ces données sont générées en comptant le nombre de demandes d’itinéraires faites à Plans d’Apple" et pour Google "les renseignements figurant dans ces rapports sont issus d'ensembles de données agrégées et anonymisées provenant d'utilisateurs qui ont activé le paramètre Historique des positions, lequel est désactivé par défaut."
Commerces, loisirs, magasins d'alimentation, parcs et jardins, arrêts de transports en commun, lieux de travail ou de résidence, tels sont les "destinations" retenues dans ces données. C'est un peu comme un jeu de piste virtuel, dans lequel nous sommes des points qui se déplacent sur une carte.
La comparaison
Pour analyser les variations de données, Google s'est appuyé sur celles recueillies entre le 3 janvier et le 6 février 2020, elles servent de base de référence. Tout ce qui est au-dessus marque une fréquentation qui augmente, tout ce qui se trouve en dessous marque une activité qui ralentit. Apple, de son côté, communique sur les déplacements à pied ou en véhicule.
Voyons ce que donnent ces indicateurs en Nouvelle-Aquitaine...
Commerces et Loisirs
Les restaurants et les cafés sont fermés. Les musées et les cinémas également. Dans cette rubrique "Commerces et loisirs", il reste certaines bibliothèques et les centres commerciaux (pas tous). En tout état de cause, en Nouvelle-Aquitaine, la fréquentation de ces lieux est de - 33 % entre le 21 février et le 4 avril 2021 par rapport à la valeur de référence.
A l'échelle des départements :
- Charente : -33 %
- Charente-Maritime : -17 %
- Corrèze : -29 %
- Creuse : -21 %
- Deux-Sèvres : -33 %
- Dordogne : -32 %
- Gironde : -41 %
- Haute-Vienne : -31 %
- Landes : -16 %
- Lot-et-Garonne : -31 %
- Pyrénées-Atlantiques : -36 %
- Vienne : -46 %
►Ce que l'on constate depuis mars 2020 : une forte baisse lors du premier confinement stricte, une reprise à l'été due au déconfinement, une baisse moins importante lors du deuxième confinement à l'automne et un "plateau" en début d'année 2021. Tendance à surveiller pendant les vacances de printemps et le troisième confinement.
Alimentation et pharmacies
Les commerces essentiels restent ouverts. La fréquentation de ces lieux est de +30 % entre le 21 février et le 4 avril 2021 par rapport à la valeur de référence. Commerces étudiés : les marchés alimentaires, les magasins d'alimentation, les marchés de producteurs, les épiceries fines, les parapharmacies et les pharmacies.
A l'échelle des départements :
- Charente : +32 %
- Charente-Maritime : +68 %
- Corrèze : +35%
- Creuse : +27%
- Deux-Sèvres : +20%
- Dordogne : +34%
- Gironde : +19%
- Haute-Vienne : +33%
- Landes : +48%
- Lot-et-Garonne : +28%
- Pyrénées-Atlantiques : +22%
- Vienne : +17%
►Ce que l'on constate depuis mars 2020 : une forte baisse de la fréquentation des commerces essentiels lors du premier confinement stricte que l'on peut interpréter par la crainte des contaminations et la fermeture des marchés, une hausse de fréquentation à l'été lors du déconfinement, une baisse moins importante lors du deuxième confinement à l'automne 2020 et une légère sur-fréquentation, par rapport à la valeur de référence, juste avant le 3e confinement. Les départements néo-aquitains n'étaient soumis qu'au couvre-feu jusqu'à présent. Davantage d'enseignes restent ouvertes comme les coiffeurs par exemple pendant ce 3e confinement. A surveiller.
Travail ou maison ?
L'indicateur étudié est le "déplacement vers les lieux de travail". Il fournit une indication sur les déplacements professionnels. Si on le "couple" avec la présence dans les lieux d'habitations, il donne une indication sur les déplacements professionnels, la baisse d'activité, le télétravail.
En Nouvelle-Aquitaine, entre le 21 février et le 4 avril 2021 par rapport à la valeur de référence, la fréquentation des lieux de travail est en baisse de 9 %, la présence dans les lieux d'habitation en augmentation de 3 %.
►Ce que l'on constate depuis mars 2020 : une corrélation entre la baisse des trajets vers les lieux de travail et une augmentation de présence dans les lieux de résidence. Ce qui ne veut pas dire que lorsque les habitants de la Nouvelle-Aquitaine ne sont pas au boulot, ils sont chez eux, mais ces indicateurs sont révélateurs de changements d'habitudes dans les déplacements quotidiens.
A l'échelle des départements :
- Charente / Travail : -19 % / Maison : +2 %
- Charente-Maritime / Travail : -8 % / Maison : +3 %
- Corrèze / Travail : -20 % / Maison : +0 %
- Creuse / Travail : -13% / Maison : +2 %
- Deux-Sèvres / Travail : -11% / Maison : +2 %
- Dordogne / Travail : -16% / Maison : +0 %
- Gironde / Travail : -14% / Maison : +3 %
- Haute-Vienne / Travail : -6 % / Maison : +2 %
- Landes / Travail : -10% / Maison : +3 %
- Lot-et-Garonne / Travail : -11% / Maison : +0 %
- Pyrénées-Atlantiques / Travail : -16% / Maison : +3 %
- Vienne / Travail : -5% / Maison : +2 %
Transports
Forte baisse des mobilités dans les "lieux de transports" comme les arrêts de bus, les gares routières et les gares ferroviaires. -34 % en Nouvelle-Aquitaine entre le 21 février et le 4 avril. L'indicateur sera très intéressant à surveiller dans les semaines qui viennent.
A l'échelle des départements :
- Charente : -34%
- Charente-Maritime : -12%
- Corrèze : -42%
- Creuse : -29%
- Deux-Sèvres : -18%
- Dordogne : -39%
- Gironde : -40%
- Haute-Vienne : -37%
- Landes : -32%
- Lot-et-Garonne : -31 %
- Pyrénées-Atlantiques : -15%
- Vienne : -46 %
►Ce que l'on constate depuis mars 2020 : une sous-fréquentation dans les "lieux de transports" depuis le premier confinement par rapport à la valeur de référence. Une reprise attendue à l'été 2020, un moins forte baisse lors du confinement d'automne et une légère tendance à la hausse (mais toujours en dessous de la valeur de référence) depuis le début de l'année 2021.
Prudence dans l'interprétation
Il s'agit de données brutes, anonymisées et qui respectent la vie privée (en tout cas autant que le promettent les deux multinationales…). D'ailleurs, les deux géants précisent bien que "ces rapports seront disponibles pendant une durée limitée, tant que les autorités sanitaires les jugeront utiles à la lutte contre la propagation du COVID-19"
Il faut interpréter cette base de données avec prudence : une moindre fréquentation dans les parcs n'est pas forcément imputable au confinement ou au couvre-feu mais simplement à une journée pluvieuse ou à une baisse des températures.
Il ne s'agit pas pour d'outils miraculeux, mais d'indicateurs pouvant aider à la prise de décisions. L'analyse continuera d'être intéressante à mener dans les prochaines semaines, car ces courbes donneront des indications sur l'acceptabilité ou d'adaptabilité des Français à ce troisième confinement, alors que son objectif est de réduire les déplacements et les interactions pour limiter la propagation du virus.
Pas de fonctionnalité de tracking en France
Depuis septembre 2020, Google et Apple sont allés plus loin en intégrant, directement dans le système d'exploitation de leurs smartphones, une fonctionnalité de traçage qui permet de savoir si on a été en contact avec une personne positive. Une vingtaine de pays (Allemagne, Suisse, Irlande, Italie....) et plusieurs États américains ont fait le choix d'utiliser ce protocole dit décentralisé.
La France, elle, n'a pas retenu cette solution. Elle a préféré développer l'application StopCovid, devenue TousAntiCovid, basée sur un protocole centralisé. Le gouvernement avait expliqué alors ne pas vouloir dépendre des GAFA et garder la mains sur les mesures de confidentialités et d'exploitation des données personnelles.
L'application TousAntiCovid fonctionne, comme pour Google et Apple, sur la technologie bluetooth, qui peut servir à mesurer la distance entre deux appareils, mais rencontre un écueil majeur : l'application ne fonctionne pas en arrière plan, contrairement au système des multinationales. Il faut donc lancer l'application manuellement et la laisser ouverte.