En mars 2019, la Commission européenne a mis en demeure la France, pour la deuxième fois, d'ouvrir les concessions hydrauliques à la concurrence. Mais la situation semble figée, comme par exemple au barrage de Bort-les-Orgues, en Corrèze.
A Bort-les-Orgues, en Corrèze, EDF est toujours aux commandes du barrage. Pourtant, depuis 2012, la société détenue en majorité par l'Etat, n'est en théorie plus le gestionnaire de ce géant de béton.
L'année 2012 marque la fin de la concession et le lancement des appels d'offres. Mais dans les faits, rien n'a bougé.
Ce qui n'empêche pas les responsables du barrage de se prétendre prêts à affronter les concurrents.
Plus bas, sur la commune de Liginiac (19), se trouve le barrage de Marèges.Nous ne cragnions pas la mise en concurrence. Quelque soit les décisions de l'Etat, nous serons là et nous ferons des offres en cas de processus ouvert. (Vincent Marmonier, directeur d'EDF hydraulique vallée de la Dordogne)
Il est détenu par l'unique concurrent d'EDF dans cette vallée de la Dordogne : Shem, filiale d'Engie, ex-GDF-Suez. Ici, on commence à trouver le temps long.
Nous n'avons plus de visibilité. Cela impacte nos capacités d'investissement et de développement. (Vincent Pétillon, directeur adjoint à Shem)
Mais la mise en concurrence est loin de faire l'unanimité. Les syndicats notamment, sont vent debout.
Les barrages sont amortis depuis longtemps, payés par le contribuable. Les céder au secteur privé serait, pour les opposants, une aberration.
C'est quand même les utilisateurs de l'électricité depuis 1947 qui ont payé tous ces aménagements... Et pas ceux qui viennent mettre des billes pour juste en tirer les bénéfices ! (Patrick Mignonnet, délégué syndical CGT)
Ces arguments sont relayés et amplifiés par les élus locaux de la vallée. Pour la maire socialiste de Bort-les-Orgues, "des ouvrages comme ceux des barrages de la Dordogne font partie de notre patrimoine national".
"[La France] doit garder sa compétence et surtout son autonomie énergétique et non pas laisser l'exploitation à des prestataires étrangers, qui n'auraient pas du tout les mêmes priorités", poursuit l'édile.
Pour un privé, le premier critère est financier : avoir beaucoup plus de recette et moins de charges. Mais quel sera le poste de baisse des charges ? Est-ce que ce sera la sûreté, la maintenance, l'entretien ou l'investissement ? Ce sont des questions. A ce jour, nous n'avons pas de garantie. (Nathalie Delcouderc-Juillard, maire PS de Borg-les-Orgues)
Mais la Commission européenne n'en démord pas. En mars 2019, elle a une nouvelle fois mis en demeure la France, en lui demandant d'attribuer les marchés publics dans le secteur de l'énergie hydraulique.
Pour le gouvernement, ce dossier est une patate chaude. Se plier aux directives, c'est se mettre à dos une bonne partie de l'opinion public. Résister, c'est prendre le risque de marginaliser la France dans l'espace européen.