Coronavirus : comment le club de rugby du CA Brive envisage son avenir

L'épidémie de Coronavirus a donc eu raison de la saison 2019-2020 de Top 14, en rugby. Mais au-delà du sportif, les conséquences économiques pourraient être nombreuses et fatales à plusieurs clubs de l'élite. Le CA Brive se veut lui serein mais reste plus qu'attentif à la situation.
 

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On le sait depuis ce 30 avril dernier, même si la décision doit encore être entérinée officiellement par le bureau directeur, sans doute dans la semaine à venir : la Ligue Nationale de Rugby (LNR) a décidé d'arrêter purement et simplement la saison 2019-2020 de Top 14. Reste aussi à décider des éventuelles montées/descentes, de l'attribution ou non d'un titre, et de celle des places qualificatives en Coupe d'Europe.

Pour notre seul club limousin concerné, les corréziens du CA Brive, peu importe les trois dernières décisions, elles ne le concernent pas.

Mais alors que chacun attendait l’épilogue sportif, d'aucuns pensaient également aux conséquences économiques et financières de cette crise. Et pour le rugby professionnel français, elles pourraient être importantes, voire fatales à certains !

Rien n'est sûr ni définitif dans ce qui va suivre. L'évolution de l'épidémie dictera in fine les choses.
Mais à cette date, 1er mai, voilà ce que l'on peut déjà dire :

Quid du retour aux stades ?

La LNR veut désormais travailler sur une saison 2020-2021 qui débuterait en septembre prochain.
Septembre, parce que selon les mesures annoncées par le Premier Ministre, Édouard Philippe, le 28 avril, « tous les événements qui regroupent plus de 5.000 participants et font à ce titre l’objet d’une déclaration en préfecture et doivent être organisés longtemps à l’avance, ne pourront se tenir avant le mois de septembre ».
Or bien sûr, des matchs sans spectateur, à huis-clos, seraient désastreux pour les clubs du Top 14.
On a pu lire dans la presse de nombreuses déclarations de présidents de club refusant d'ailleurs une telle éventualité, préférant jusqu'à une saison blanche.

L'impact de stades vides

Au-delà de l'ambiance, ce sont évidemment les absences de billetterie, s'il n'y avait pas de spectateurs, qui inquiètent.
Mais à ce sujet, tous les clubs ne sont pas logés à la même enseigne.

Selon la Direction Nationale d'Aide et de Contrôle de Gestion, la part de la billetterie dans les recettes d'exploitation des clubs de Top 14 s'élève à 13% en moyenne ( billetterie : ventes aux guichets, plus d'autres recettes, comme celles des buvettes par exemple).
Mais elle est plus importante à l'Union Bordeaux-Bègles ou au Stade Rochelais par exemple, qu'au CA Brive, du fait de sa jauge au Stadium plus petite et de ses spectateurs moins nombreux.
Mais même à Brive, les conséquences seraient « catastrophiques », selon le Directeur Général, Xavier Ric, joint par téléphone ce 1er mai.

Toutefois, et là tous les clubs sont égaux, cela impacterait fortement les abonnements (7000 en Corrèze), les recettes liées à ce que l'on nomme désormais « l'hospitalité » (les prestations fournies aux partenaires), et plus encore, le sponsoring qui lui intervient pour moitié (en moyenne) dans les recettes d'exploitation !

À noter, concernant les abonnements, quand le Stade Rochelais prie les siens de ne pas demander de remboursement pour cette saison, le CA Brive, et Xavier Ric, se félicitent de voir leurs six associations de supporters prendrent d'eux-même une telle initiative !
 

Toutefois, comment lancer une campagne d'abonnements, et donc pouvoir l'intégrer à un budget prévisionnel, dans de telles circonstances ?
Pour le sponsoring, les perspectives sont beaucoup plus inquiétantes...

Forte baisse du sponsoring ?

Avec la précieuse aide de Gérard Coudert, du Centre de Droit et d'Économie du Sport de Limoges (CDES), également joint par téléphone ce 1er mai, l'analyse des dernières communications de la DNACG fait froid dans le dos.

Dès le début de la crise liée au Coronavirus, le gendarme financier du rugby a en effet lancé des études de perspectives, en se basant, pour modèle économique, sur la crise financière de 2008-2009.
Pour rappel, à ce moment là, alors que le Produit Intérieur Brut (PIB) français avait chuté de deux points, le sponsoring des clubs de Top 14 (il est vrai moins professionnalisés qu’aujourd’hui, mais tout de même) avait baissé de 27%.
En ce seul mois de mars 2020, il a déjà chuté de 30%. Et on annonce pour l'année une perte de points du PIB comprise entre 6 et 8 ! Assurément, le sponsoring va baisser, et des stades vides ou à moitié pleins ne pourront pas, en plus, attirer sponsors et partenaires, quand ils ne sont pas déjà partis, comme au SU Agen.
Une manne va donc manquer.

Quid des droits télé ?

S'il est moins bien loti que le football, le rugby l'est tout de même plus que d'autres sports, tel le Hand ou le Basket.
Diffuseur historique, Canal + verse près de 100 millions à la LNR chaque année. Un pactole qui rentre dans les recettes d'exploitation des clubs, toujours en moyenne, à hauteur de 23%.
Mais le groupe a fait savoir ce 30 mars qu'il n'était pas disposé à verser les quelques 17 millions d'euros qu'il devait encore au titre de cette saison 2019-2020.
Ou alors, s'il le faisait, cette somme serait déduite des droits courants jusqu'à la saison 2022-2023, terme de son contrat actuel.
Il n'y aura donc pas de bouée de sauvetage de ce côté là.

Des clubs en grand danger, à priori pas le CAB

Le club fait la chasse aux coûts ! [Xavier Ric, Directeur Général du CA Brive]

Le nerf de la guerre étant la trésorerie, les clubs vont donc devoir trouver des moyens et des modèles économiques nouveaux pour survivre.

En Corrèze, Xavier Ric nous a assuré que « le club travaillait depuis plusieurs semaines à la chasse aux coûts, avec le staff, sur la nourriture, l'hébergement, les déplacements, sans que cela ne nuise trop au sportif. Mais même les petits-déjeuners habituellement donnés aux joueurs sont sur la sellette ! ».

Toutefois, même conséquentes, ces économies ne joueront qu'à la marge. Le seul et unique levier, selon Gérard Coudert du CDES, « c'est la masse salariale, adossée aux charges sociales ». Il faut dire, ces deux postes grèvent 63% des budgets des clubs en moyenne (46% pour la masse salariale, 17% pour les charges). C'est d'ailleurs pourquoi le CA Brive a pour l'instant gelé tout mouvement, ou de revalorisation, ou de recrutement.

Mais il y a moins d'un mois, la DNACG préconisait une baisse de la masse salariale pour les clubs (c'est à dire l'acceptation d'une baisse des salaires par les joueurs) à hauteur de 25%. Elle préconise désormais 31% !

La somme des intérêts collectifs n'étant pas égale à celle des interêts particuliers ! [Gérard Coudert, CDES]


Et pour Gérard Coudert, « la somme des intérêts collectifs n'étant pas égale à celle des interêts particuliers, seule une négociation collective, avec la Ligue, l'ensemble des syndicats concernés, de joueurs, de présidents, etc, a une chance d'aboutir à une solution viable. Mais il y a urgence, et ce sera très difficile, il n'y a qu'à voir les déchirements de ces dernières semaines sur les questions sportives ! ».

Or oui il y a urgence, certains clubs, parmi les plus prestigieux, pouvant rapidement se retrouver en dépôt de bilan !
À la mi-avril, sans vouloir communiquer leurs noms, la DNACG avait alerté sur le fait que neufs clubs d'élite (et sept de Pro D2) étaient en situation de « grand danger », situation qui pourrait la conduire à refuser leur engagement en Top 14 pour la prochaine saison, avec les conséquences que l'on imagine.

le CA Brive ne fait pas partie des neufs clubs visés par la DNACG ! [Xavier Ric, Directeur Général du CA Brive]


Mais rassurons les corréziens : Xavier Ric nous a affirmé que « Brive n'en faisait pas partie », et que concernant la baisse des salaires, le club n'y viendrait qu'en dernier recours, ou en cas d'entente et décision collectives, qu'il souhaite à ce sujet.

En ce jour du muguet (oui, symbole d'un club de rade!), le CA Brive et la Corrèze sont donc en vert, et pas que sur la carte provisoire du déconfinement !
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