Loup : un individu installé en Limousin

En Limousin, ce jeudi 12 janvier 2023, les "cellules de veille loup" deviennent des "comités loup" car la présence permanente d’un animal a été attestée sur le plateau de Millevaches en Corrèze.

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Depuis deux ans, un canis lupus, c’est-à-dire un loup gris européen de souche italienne, se balade en Limousin. Ce jeune mâle, qui aurait deux ans et demi, a élu domicile, au centre du plateau de Millevaches en Corrèze. Un territoire propice à l’animal pour sa faune et sa flore et la faible densité de population. Son terrain de jeu s’étendrait sur une dizaine de communes (Gentioux-Pigerolles, Millevaches…).

Selon Philippe Goursaud, chef de service départemental de l’Office Français de la biodiversité (OFB), un autre loup aurait été vu. Contrairement au premier, celui-ci ne serait pas là en permanence. Il transiterait seulement par le Limousin. "Un loup est capable de faire 30 à 40 kilomètres dans une journée", explique-t-il.

En France, en 2022, ils seraient plus de 900 loups contre 200 en 2010. 

Comment confirmer sa présence ?

Plusieurs indices le confirment selon Gabriel Métégnier, directeur du GMHL (groupe mammalogique et herpétologique du Limousin). En Corrèze, Creuse, Haute-Vienne, des photos prises chaque semaine attestent de la présence de l’individu. "Le canis lupus se différencie du chien par sa une courte queue, des oreilles rondes, un pelage gris et blanc, foncé sur le dos, clair sur le ventre." Deuxième indice : l’espacement des empreintes. "Il en faut sur au moins une vingtaine de mètres pour faire la distinction entre les deux animaux" ajoute le spécialiste. Troisième indice : quand il y a une attaque, l’Office Français de la biodiversité analyse le nombre de morsures, le diamètre de perforation, l’espacement des dents. Enfin, des prélèvements de crotte, d’urine et de poil ont permis de valider son identité. 

La "cellule veille loup" devient le "comité loup"

La présence permanente du loup amène les préfectures des trois départements à créer un "comité loup". En Haute-Vienne, il a été acté ce 10 janvier 2023. En Creuse, c’était en décembre. En Corrèze, il le sera ce vendredi. C’est la suite logique de la "cellule de veille loup" créée en 2018. Elle réunit les services de l’État, l’Office français de la biodiversité, les associations (Limousin Nature Environnement, le groupe mammalogique et herpétologique du Limousin), les organisations agricoles (chambres d’agriculture, syndicats agricoles, fédération des éleveurs ovins).

Il n’y a pas de grandes différences avec la cellule de veille, si ce n’est que le comité va continuer sa surveillance du loup et renforcer la protection pour les éleveurs. Car les attaques de loups deviennent régulières. En Limousin, de 2021 à 2022, on en dénombre une soixantaine. C’est en Corrèze et en Creuse qu’elles sont plus fréquentes. En Corrèze, la dernière attaque remonte au mois de décembre 2022. En Haute-Vienne, c’était en février 2022. La fin de l’hiver et le début du printemps sont favorables aux attaques, car c’est le début des agnelages, donc "comme tous les animaux, le loup va au plus simple" confie le directeur du GMHL. "L’été, il y a moins d’attaques sur les troupeaux parce que les animaux sauvages comme les chevreuils mettent bas." 

Surveiller et protéger les élevages

Plusieurs réglementations européennes et mondiales protègent le loup, c’est le cas de la convention de Berne de 79, transcrite dans le droit français en 1989. Dans chaque département du Limousin, un comité loup existe aujourd’hui. Il permet de faire une réunion annuelle pour faire le point sur la situation, sur la réglementation. L’objectif cette année est de mettre en place un zonage de 0 à 3, soit de déterminer les zones plus ou moins exposées à la prédation (cercle 0 : la prédation est la plus importante, cercle 3 : le loup transite). Ces périmètres pourront faciliter les financements afin de protéger les élevages ou de les indemniser après une attaque.  

Le comité loup veut approfondir la "méthode de reconnaissance de non protégeabilité partielle des troupeaux". Cela signifie que si des moyens suffisants ont été mis en place dans un élevage pour protéger les animaux, mais que le loup continue ses attaques, les éleveurs pourront demander à une personne assermentée de tirer pour effrayer le prédateur ou pour le tuer. En France, 19% des loups peuvent être prélevés, c’est-à-dire tués légalement. En 2022, 163 loups ont été tués (autorisés par l’état). Sachant que la mortalité naturelle estimée du loup est forte et s’élève 45%.

Des éleveurs en colère

Si les services de l’État, l’OFB (Office français de la biodiversité) et les associations se réjouissent de ses discussions, certains éleveurs sont à bout. L’une d’entre eux, Sophie De Boisgrellier se situe dans la zone de prédation du loup, à Ambrugeat. Ses brebis ont été attaquées des dizaines de fois. À 61 ans, elle confie en avoir assez de travailler dans ce contexte. Le loup la pousse à arrêter plus tôt que prévue son activité. "J’ai mis les filets de protection, j’ai deux patous mais il n’y a rien à faire, s’exclame-t-elle. Les filets ça ne sert à rien, n’importe quel chien passe par-dessus, même quand ils font 1,50 mètre de haut."

Aujourd’hui, je rentre mes bêtes tous les soirs avant la nuit. Elles ne sortent pas quand il y a du brouillard. Je les surveille toute la journée. Quand mes brebis ont été attaquées, cela a été pour elles un traumatisme monstrueux. Elles ne mangeaient pas, elles maigrissaient. Ce genre de chose, c’est insupportable pour les éleveurs. Moi, je ne veux plus travailler comme ça.

Sophie De Boisgrellier, éleveuse à Ambrugeat

Sophie avoue être déçue de ces comités et elle déplore ne pas être conviée à participer à la réfllexion. Elle dément les chiffres donnés par l’Office français de la biodiversité (OFB). Pour elles, il y a plusieurs loups sur le territoire. "Chez moi, il y a des tanières, ce qui signifie qu’il y a de la reproduction et l’OFB ne se déplace pas !", s’insurge-t-elle. Comme d’autres éleveurs, résignés à tel point qu’ils ne souhaitent plus s’exprimer publiquement, l’éleveuse dénonce des mesures de protection inefficaces.

 

 

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