Jean-Pierre Chambras est l'un des derniers bouilleurs de cru de Corrèze et du Limousin. Il se déplace au delà de son département pour fabriquer de l’eau de vie et perpétuer cette tradition.
C’est pareil que l’eau, sauf que c’est un peu plus fort, s’exclame jovial Jean-Pierre Chambras, distillateur ambulant depuis 44 ans en Corrèze. Il surveille de près son alambic
50° tout de même… pour cette « eau de vie » 100% locale.
Car depuis des siècles le principe est le même : ce bouilleur de cru professionnel arpente le département et les départements voisins pour installer sa distillerie ambulante sur les places de village dès 6 heures du matin.
Sur place, il récupère les fruits fermentés ou macérés (poires, cidre, mirabelles…) et après plusieurs minutes dans les tuyaux de l’alambic, chauffés à la vapeur, la magie opère :
Plus le fruit est bon, meilleur l’alcool est, explique Jean-Pierre Chambras. Il faut ramasser un fruit bien mûr.
Et à chaque fois, c’est le même rituel sur la place du village : ils amènent leur fruit, on discute, on boit un canon, on casse la croûte (…) c’est la joie d’un pays.
Une joie et une tradition malheureusement de plus en plus rares. Car la fabrication d’alcool en France est de plus en plus taxée.
L’autre raison, c’est la disparition peu à peu des détenteurs « du privilège de bouilleur de cru » : Ce droit qui remonte à Napoléon permet à certains propriétaires, fermiers ou vignerons de distiller ou faire distiller (par un bouilleur de cru professionnel , dont l’alambic est déclaré aux douanes) leur vin, cidres, cerises ou autres prunes. Ils ne payent pas de droit de consommation dans la limite de 10 litres d’alcool pur.
Au-delà, c’est le droit de consommation au taux plein qui s’applique.
En Corrèze désormais, on ne compte plus que 3 bouilleurs ambulants.Ceux qui ont le droit arrivent tous à 95 ans, déplore Jean-Pierre Chambras. D’ici 5 ans, il n’y aura plus de privilège dans les communes, car il n’y aura plus personne.