Ce n'est pas encore la saison de la truffe en Corrèze mais sur le Causse, les professionnels se préparent au cavage, à la recherche du précieux diamant noir enfoui sous terre... La question est de savoir si la sécheresse de cet été aura une incidence sur la quantité et la qualité des truffes.
Entre les chênes, Ollia, une Lagotto Romagnolo de 16 mois, flaire la truffe de son museau d'experte. Après avoir cherché un peu partout, elle finit par dénicher une truffe... pourrie. Manque de pot mais rien de plus normal en cette mi-novembre, la saison n'a pas encore débuté.
Ajouté à cela que la sécheresse a été au rendez-vous cet été et risque d'avoir une incidence sur la qualité du diamant noir lors de la récolte 2019. "La croissance de la truffe Tuber melanosporum connaît une phase critique en été au moment où sa croissance est la plus importante. L’arrosage des meilleurs brûlés à truffes (voire de toute la plantation) est indispensable pour sauver de la sécheresse les corps fructifères présents dans le sol", explique la fédératon française de trufficulture."La truffe peut résister à 20 à 30 jours de sécheresse. Il est toutefois recommandé d’apporter 20 mm tous les 8 à 12 jours pendant les mois d’été si la pluviométrie naturelle est absent".
"La truffe, c'est 80% d'eau"
Sur le terrain on garde tout de même le sourire. "Ce qui sauve la saison, c'est qu'il a plu beaucoup en mai et en juin, la période où la truffe née. Du coup, malgré la sécheresse estivale, la truffe profite de cet apport en eau. Moins vite, mais elle en profite un peu", explique Hervé Bruyère, trufficulteur à Meyssac, accroupi aux côtés d'Ollia au milieu de sa truffière.Cependant, tout n'est pas si simple et être optimiste ne suffit pas malheureusement. Cette année, la Tuber Melanosporum, de son nom scientifique, pourrait être de plus petite taille. "La truffe, c'est quand même 80% d'eau. Donc s'il manque de l'eau, la truffe sera plus petite, moins grosse", expose d'entrée Bernard Reyna, le président de la Fédération des Trufficulteurs de Corrèze. Avant de tout de même tempérer "mais la densité de la truffe n'en fait ni la meilleure ni la moins bonne", tempère le président corrézien.
A une dizaine de kilomètres de Meyssac, Georges et Maurice Parlange, qui font eux aussi partis des 700 trufficulteurs de Nouvelle-Aquitaine, ont arrosé par aspersion leurs chênes truffiers, de manière raisonné de mi-août à mi-septembre. C'est en 2016, après avoir subi de plein fouet la sécheresse, que les deux hommes décident de mettre en place ce système d'arrosage. Implantés dans le Causse corrézien, ils font partis des rares cultivateurs sur le territoire à avoir adopté cette pratique.
"Je surveille la terre... Je la prends dans ma main, je la gratte, je regarde comment elle est, si elle est humide ou sèche. Et selon son état, je déclenche l'arrosage", décrit Georges Parlange.
La saison sera-t-elle bonne et le truffes seront-elle présente en grand nombre aux pieds de leurs arbres nourriciers ? Difficile à dire à quelques semaines du début de la récolte, même pour nos amis poilus au flair affûté.
L'an dernier, malgré la sécheresse, 200 kilos de truffes de Corrèze avaient été vendus. Cette année, le cavage (la recherche de truffes) commencera mi-décembre.
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La trufficulture en France en chiffres
Selon les données de la fédération française de trufficulture :- 20 000 trufficulteurs et truffeurs estimés (45- 50% n'ont pas le statut d'agriculteur)
- 6 000 adhérents à la Fédération Française des trufficulteurs donc la moitié d’agriculteurs actifs
- 18 000 hectares sur 40 départements (10 000 d’âge de 10 à 30 ans, 8000 de moins de 10 ans) et 49 000 Ha de plus de 30 ans
- 40 à 70 tonnes de production annuelle
- 500 à 900 €/kg de prix de vente, 1000 euros : variable selon les saisons, les quantités disponibles, la qualité du produit…
- 24 M € (estimation de la valeur de la production) CA estimé : 67.3 M €
- 5 à 10 000 € (achat du terrain non compris) correspondent au montant de l'investissement/ha pour la plantation d’une parcelle agricole
- 1000 - 1500 ha plantés en moyenne par an en France
- 40% de la production est commercialisée sur les marchés de gros, 20% sur les marchés de détails (environ 100 marchés recensés), 30-40 % en direct (consommateurs, restaurateurs, métiers de bouches, pépiniéristes, courtiers..)
- 13 conserveurs de truffes produisant environ 15 T de conserves pour un CA de 10 M euros (membres de la FIAC)
- 30 courtiers environ
- 300 000 plants truffiers vendus en France par 15 pépiniéristes agréés, le contrôle des plants est réalisé par l’INRA et le CTIFL pour assurer aux producteurs de plants la commercialisation d’un matériel de qualité.
- Quatre grandes régions de production : le Centre Ouest (Poitou-Charentes et Centre), le Sud-Ouest (Aquitaine, Midi Pyrénées et Limousin), le Sud Est (Languedoc Roussillon, Paca et Rhône-Alpes), le Centre Est (Bourgogne, Franche Comté, Champagne Ardennes, Lorraine et Auvergne)