Borg Warner à Tulle, c’est fini. Le 1er mars prochain, l’équipementier automobile américain fermera définitivement ses portes, direction la Hongrie. Un coup de massue pour les 368 salariés. Les ¾ ont d’ores et déjà été licenciés. Pour ceux qui restent, ces derniers jours sont très douloureux.
Ce jour-là, le parking est vide, dans un silence pesant Jean-Louis Bouilhac, technicien amélioration continue et secrétaire du CSE chez Borg Warner a du mal à contenir son chagrin. Après trente-neuf ans de maison, ce technicien se désole devant les bleus de travail accrochés sur les grilles de l’entreprise. Un calvaire à la mémoire des 368 salariés licenciés.
Depuis un mois la production s'est arrêtée, pourtant ce technicien porte toujours sa blouse, celle de ses collègues sont là sur ce calvaire symbole des emplois délocalisés.
« On a résisté mais en vain, confie Jean-Louis Bouilhac la gorge serrée. Face à ces grands donneurs d’ordre, malheureusement, on est un peu impuissant. C’est un gâchis total, autant au niveau humain qu’au niveau du département, de la région, c’est quelque chose de terrible. »
Délocalisation
La fin d'une histoire industrielle à Tulle, depuis cent quarante ans, la ville a toujours accueilli des entreprises de mécanique. Installée en 1996, Borg Warner est vite à l'étroit sur le site historique sur les bords de la Corrèze. Pour s’agrandir et rester dans le département, l’équipementier américain obtient dix ans plus tard, la coquette somme de 14 millions d’euros de subvention et déménage à quinze kilomètres.
L’entreprise connait des hauts et des bas lors de la crise de 2008, mais l'annonce de la fermeture en juin 2020 prend tout le monde de court.
« Mes collègues ont toujours donné le maximum d’eux-mêmes, raconte Laurent Blondel, délégué syndical FO. Ils se défoncés pour que cette usine tourne, fasse des bénéfices, mais en arriver à une fin aussi cruelle, après tous les efforts qui ont été faits par les salariés génère beaucoup d’incompréhensions ».
Formations
La production s'est arrêtée le 3 décembre. é15 ouvriers sont partis en Hongrie pour former leurs remplaçants. Reste à l'usine une quarantaine de salariés, la comptabilité, la responsable des ressources humaines et les élus du personnel. En attendant leur licenciement le 15 février, à charge pour eux de vendre les biens du comité d'entreprise en regardant partir leurs collègues les uns après les autres.
« C’est quelque chose qui m’est très pénible parce que moi j’ai un peu d’ancienneté. J’ai connu beaucoup de monde sur l’entreprise, regrette Jean-Louis Bouilhac. C’est plus que des collègues, il y en a certains qui sont des amis, donc c’est vrai que ça fait très très mal ».
Sylvain Domenger lui a retrouvé un emploi en CDD comme une soixantaine d'anciens salariés. Ingénieur chez Borg Warner, il est désormais coach pour les étudiants du campus connecté de Tulle. Sans attendre son licenciement, il a choisi de se reconvertir.
« C’est un exercice que je n’avais pas pratiqué depuis longtemps, se remettre en question, sourit l'ingénieur. Refaire son CV, rédiger des lettres de motivation. Ça demande aussi de bien synthétiser quinze ans d’expérience en entreprise, ce n’est pas simple ».
D'autres cherchent comment se reconvertir, comme ces anciens ouvriers rencontrés ce jour-là en pleine formation. Encore sous le choc après leur licenciement le 1er novembre dernier, ils tentent de se motiver pour suivre un cursus maintenance industrielle.
« Ce n’est pas facile pour eux, cependant j’ai l’intention de les rendre forts pour pouvoir se vendre en entreprise, rassure David Redondo, professeur d’électricité et automatisme au CFAI de Tulle. C’est une formation très courte, qui va leur donner des compétences opérationnelles, utilisables très vite en industrie ».
En attendant le site de Borg Warner est à vendre. Des acheteurs potentiels se sont fait connaitre. De l'espoir, mais à ce jour aucune garantie.