Plus de trois mois après le début de la guerre en Ukraine, de nombreux civils ont trouvé refuge en Limousin. En Creuse, un restaurant a embauché plusieurs jeunes Ukrainiens, qui semblent y avoir trouvé leur place.
Dans la cuisine de ce restaurant creusois à Toulx-Sainte-Croix, Darius Shiman s'active en cuisine. Le jeune homme, âgé de 20 ans, était pourtant loin d'imaginer qu'il deviendrait cuisinier un jour. Il a fui le conflit ukrainien et a trouvé refuge en Creuse il y a deux mois. Il explique avoir "toujours aimé la cuisine mais je n‘en avais ni la possibilité ni les moyens en Ukraine. Je travaillais dans le bâtiment et je suis reconnaissant de travailler ici."
Des collègues à part entière
Darius, originaire de Transcarpathie, a trouvé en Creuse un nouvel élan : "je n'ai pas été touché directement par la guerre, car j'habitais loin des zones de combat. Mais j'en rêvais en permanence." Ses collègues saluent d'ailleurs son envie d'apprendre et sa bonne humeur. Pour Didier, un des cuisiniers, "Darius est vraiment un bon garçon, il a appris vite, sur le tas. Je suis fier de lui."
Au comptoir, Olena, originaire du Donbass, trouve elle aussi ses marques peu à peu. "Il n’y a rien de très difficile car je travaillais dans un café en Ukraine. J’ai très vite compris ce que j’avais à faire ici." Notamment grâce à des compétences en anglais et en français, et aussi "par la compréhension des gestes et des habitudes."
L'équipe du restaurant s'est tout de suite engagée dans l'insertion des jeunes Ukrainiens. Darius et Olena sont par exemple logés par leurs collègues. Et pour les démarches administratives, ils peuvent compter sur l'aide de Patrice Bardini. Après des débuts tâtonnants, Darius et Olena font maintenant partie de l'équipe.
Ils donnent beaucoup au travail, donc c’est la moindre des choses de les accompagner dans leurs démarches.
Patrice Bardini, gérant du restaurant
À leur arrivée dans l'établissement, les quatre jeunes Ukrainiens souhaitaient travailler et le restaurant avait besoin de main d'oeuvre. La démarche a donc été lancée immédiatement auprès de la préfecture. "Mon objectif, ce serait de les former et de les garder", récapitule Patrice Bardini. "Les aider à faire ces démarches, c’est ce qui contribue à la bonne ambiance de l’équipe. Ça prend un peu de temps mais c’est payant."
Le défi de la langue
Après le départ des clients, c'est l'heure des cours de français. Wladimir Lasareff, maire de Malleret-Boussac (Creuse), s'est porté volontaire pour enseigner à Darius et Olena. Les progrès sont déjà visibles, malgré la prononciation encore hésitante. Ils doivent apprendre un tout nouvel alphabet.
"Dans alphabet cyrillique, une lettre correspond à un son", résume Wladimir Lasareff. "Dans l’alphabet latin, un son correspond à une composition de plusieurs lettres. En russe, il y a aussi des déclinaisons, les structures de phrases sont donc très différentes d'une langue à l'autre."
Les sessions tournent pour le moment autour de l'alimentaire et de la restauration car "il faut qu'ils soient opérationnels le plus vite possible pour qu’ils se sentent à l’aise dans leur travail."
Pour Darius, c'est dans la maîtrise de la lecture qu'il doit encore progresser. "Je vis avec des Français donc j’ai plutôt des facilités à m’exprimer et à comprendre. En revanche, j’ai plus de mal avec la lecture."
Darius aimerait rester en France, près de sa famille qui l'a rejoint à Aubusson. Il a déjà signé un CAP avec le restaurant pour continuer d'apprendre la cuisine française, "la meilleure du monde" selon lui. Olena, quant à elle, voudrait retourner en Ukraine dès que possible, pour y continuer ses études.