Rien ne va plus à Felletin, le dernier cabinet dentaire vient de fermer. Le praticien a cherché en vain un successeur avant de partir à la retraite. Une situation qui se généralise en milieu rural depuis des années.
Pour les felletinois, difficile voire impossible de retrouver un dentiste dans les environs, et même en poussant jusqu'à Guéret, les places sont chères... En Creuse, il n'y a pas que les généralistes qui font défaut, les spécialistes comme les dentistes sont de moins en moins nombreux.
La plaque du dentiste est encore là, sur le pilier de cet immeuble d'une rue de Felletin. Ses patients venaient des alentours, jusqu’à 40 km à la ronde. Mais depuis le 31 octobre, le docteur Dubois a définitivement raccroché les roulettes. Depuis six mois il cherchait un successeur... en vain.
« Les jeunes ne veulent pas s’installer tout seul, parce que c’est une grosse charge et un stress administratif aussi… ils préfèrent être avec des collègues pour s’entraider en cas de problème » souligne Denis Dubois, chirurgien-dentiste
Les patients ne manquaient pas. Aujourd’hui ils s’interrogent et sont dépités. Ils ne savent pas vraiment où aller...
"Les autres cabinets sont bien plus loin, et même eux ne nous prennent pas forcément, si on a vraiment un gros souci, on fait quoi ?" interroge une felletinoise
En France, on compte en moyenne 1 praticien pour 1500 habitant. En Creuse, c'est plutôt 1 pour 3000. Et la situation ne cesse de se dégrader. Si la profession connait une augmentation de 4,8 % de praticiens en activité sur 9 ans, la répartition est inégale et certains départements ont perdu jusqu'à 50% de cabinets. Déjà en 2008, un sénateur de Dordogne attirait l’attention du Sénat sur la pénurie de chirurgiens-dentistes en milieu rural.
Dans ce cabinet aubussonnais, on avait pour habitude de ne refuser aucun patient. Sauf qu’aujourd’hui, l’accueil de nouveaux patients est compliqué. Avec plus de quarante rendez-vous quotidiens, ce n'est plus possible.
« Depuis quelques mois avec l’arrêt de mes confrères du secteur, on est malheureusement obligé de refuser des patients pour satisfaire les nôtres et qui est un fichier plus que conséquent » précise Pierre Adant, chirurgien - dentiste à Aubusson.
Un appel lancé à de nouveaux praticiens en Creuse
D'ici fin 2021, six praticiens vont prendre leur retraite. Il n'en restera qu'une trentaine en Creuse.
Alors comment ramener de nouveaux praticiens en Creuse ?
Les collectivités et l’État déroulent le tapis rouge : un accès au logement facilité, des bourses des régions, une aide à l’installation, des avantages fiscaux. Mais pour Pierre Adant, l'incitation fiscale est un échec. Il y aussi la nécessité de former plus d’étudiants en odontologie. L'autre problématique est la méconnaissance de la qualité de vie hors les villes par les jeunes praticiens, mais là il s'agirait de promouvoir les atouts de la pratique en zone rurale.
"On pratique la vraie dentisterie ici, c'est très intéressant intellectuellement, on touche à toutes les facettes de notre profession" ajoute ce praticien aubussonnais.
Denis Dubois, quant à lui, parle de la solidarité entre confrères qu'il a connue pendant toutes ses années d'exercice, du fait justement que les praticiens ne se sentent pas en concurrence comme en ville.
Reste la solution de la maison médicale. Elle est à l'étude sur Felletin.