Un pont qui menaçait de s’effondrer en Creuse vient d'être fermé, sans doute définitivement, car sa rénovation coûte trop cher pour les petites communes concernées par les travaux. En France, plusieurs milliers de ponts doivent être rapidement réparés et surveillés. Le vieillissement n'est pas seul en cause. Désormais, les épisodes climatiques violents et leurs effets sont surveillés de près.
Le cas du petit pont des Roudières, appelé pont Maurice Gaumet, qui vient d'être fermé en Creuse, pour raison de sécurité, n'est pas unique en France. Pour autant, les accidents liés aux effondrements sont plutôt rares. Le dernier en date en France remonte à mars 2024, dans le Gard. Un chauffeur de poids lourd avait été blessé.
En France, on compte environ 250 000 ponts routiers. Parmi ces ouvrages, 35 000 sont en mauvais état et 4 000 devaient être réparés immédiatement, selon un rapport du Sénat de 2022.
En Limousin, sur le réseau routier départemental, on dénombre 940 ponts de plus de deux mètres en Haute-Vienne, un peu plus de 850 en Corrèze et près de 800 en Creuse. Pour le moment, pas d’effondrement dans ces ouvrages, mais parfois des limitations de tonnage comme en Haute-Vienne.
Quelle est la durée de vie moyenne d’un pont ?
Aujourd’hui, on estime qu’un pont a une durée de vie de 100 ans. Mais "seuls les ponts construits depuis le début des années 2000 et répondant à des normes européennes" peuvent prétendre atteindre cet objectif, selon un rapport du Sénat en 2022.
En Limousin, certains ouvrages ont dû être fermés à la circulation, comme le pont Maurice-Gaumet en Creuse, évoqué plus tôt, construit en 1937 : ce dernier présente d’importantes fissures.
Mais il y a aussi des ouvrages historiques comme le pont Saint-Martial à Limoges, âgé de plus de 800 ans, qui tient toujours debout. La longévité des ponts plus anciens tient notamment à l’entretien récurrent de ces ouvrages, mais également à leur taille : ils sont plus courts que les longs viaducs et ouvrages plus modernes.
L'entretien reste un point essentiel pour garantir la sécurité de ces ouvrages, afin de faire face à l’usure, aux infiltrations d’eau, à la pollution et la corrosion. En Haute-Vienne, par exemple, chaque pont est inspecté au moins une fois par an.
La météo et ses conséquences
Le trafic des poids lourds et les infiltrations d'eau sont des ennemis redoutables pour les ponts.
Depuis quelques années, un nouveau phénomène est à prendre en compte : avec le dérèglement climatique, la détérioration des ouvrages s’accélère. La chaleur et les phénomènes violents qui s’accentuent fragilisent encore plus les structures. Toujours selon le rapport du Sénat, "ces ouvrages sont conçus pour résister à des amplitudes météorologiques acceptables. Ces événements peuvent fragiliser les ouvrages d'art, en sollicitant notamment les fondations (affouillement). À titre d'exemple, les inondations survenues dans l'Aude en octobre 2018 ont provoqué la destruction de quatre ponts (dans les communes de Villegailhenc, Salsigne, Villardonnel et Aragon), et altéré quatre autres ouvrages d'art."
Ces événements sont amenés à réduire leur durée de vie d’une quinzaine d’années.
Chantier du siècle
La gestion du réseau national des ouvrages est confiée aux préfectures. Le réseau communal fait l'objet d'un inventaire réalisé avec l'aide de la Céréma, expert technique qui conseille les territoires en vue, justement, de faire face aux conséquences de ces changements climatiques. Ces épisodes violents pourraient être à l'origine de nouveaux types de dégradations. Il faut s'y préparer.
La politique de surveillance mise en place prévoit une visite annuelle de tous les ouvrages ainsi que des inspections plus détaillées tous les trois, six et neuf ans. Des visites subaquatiques existent également afin de surveiller l'état du pont sous l'eau.
Pour le gouvernement, il s'agit donc bien d'un "chantier du siècle". L'État a déjà débloqué 55 millions d'euros ces dernières années, mais il en faudrait trois fois plus selon les spécialistes pour réparer et entretenir tous les ponts de France.