Le syndicat des déchets de Creuse Evolis 23 met en place une individualisation de la collecte des déchets, avec pour effet une augmentation du coût de ce service en fonction de la quantité jetée. Pour les petits artisans et commerçants, cela revient à voir la facture augmenter de 300 à 600%.
En hiver, on arrive à remplir un bac complet par semaine, l'été, on est facilement sur 2 bacs/semaine. Passer de 300€ à 2000€, ce n'est pas tolérable !
Restes alimentaires, polystyrènes, emballages, les déchets jusqu'à présent collectés dans les bacs coûtaient 297€ par an à Sébastien Proux, chef de l'Auberge de la Vallée à Crozant en Creuse. Suite au passage d'un agent du syndicat des déchets, le restaurateur sait que la facture va passer à 2200€ pour un passage tous les 15 jours. "C’est le gaz qui augmente, c’est l’EDF qui augmente, c’est les poubelles qui augmentent… On n’arrive plus à payer nos factures, il faut que ça cesse."
L’augmentation de la taxe d’enlèvement des ordures suscite la même indignation du côté de Francis Dallot, boulanger à Dun-Le-Palestel. Sa taxe va plus que tripler. "A répercuter c'est un peu délicat, si on augmente notre pain de 3,5 fois, ça ne durerait pas longtemps !"
La raison de cette augmentation : une individualisation de la tarification, dans le cadre du passage à la taxe incitative, votée en 2016 par les élus du syndicat Evolis 23. Avec cette nouvelle gestion des déchets, en test sur 33 communes de la Creuse, les bacs d’ordure deviennent individuels.
Plus on jette, plus on paye
Avec ce principe, plus on jette, plus on paye. L’objectif est de réduire la production de déchets ménagers, en réponse à l’article 46 de la loi Grenelle 1 de 2009, qui a posé les bases de la généralisation de la tarification incitative de la collecte et du traitement des déchets ménagers.
Des bacs individuels destinés à remplacer les bacs collectifs sont en cours de distribution. Pour les commerçants comme les restaurateurs, le changement implique une hausse des coûts, puisqu’ayant bien plus de déchets que les particuliers, ils payaient avant la même taxe qu’eux, une taxe uniquement basée sur la valeur du foncier bâti et non sur la quantité de déchets produits.
"Pour une grande majorité de petits commerçants ou artisans, ils n'avaient pas été identifiés comme producteurs professionnels...c'est difficile quand on a bénéficié pendant 15 ans d'avantages et qu'ils disparaissent", explique Vincent Fortineau, le directeur d'Evolis 23. En d’autres termes, la tarification précédente était avantageuse, la nouvelle est normale.
Réduire la facture en réduisant ses déchets
Vincent Fortineau précise que la TEOMi (Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères Incitative) ne sera mise en place que progressivement. Pour certains elle ne s’appliquera pour la première fois qu’en 2021. Le syndicat cherche également à développer des solutions pour diminuer encore plus la production de déchets des professionnels (synonyme de facture moins lourde), en développant par exemple le compostage pour les restes alimentaires type pain ou épluchures. Pas sûr que cela suffise toutefois à apaiser la colère dans le contexte actuel hostile à un trop-plein de taxes.
D’autres villes en France se sont mises à la taxe incitative et à l’individualisation de la collecte, une mesure plus ou moins acceptée. A Châteauneuf-sur-Loire par exemple, près d’Orléans, poubelles incendiées et manifestations d’opposants ont accueilli la nouvelle taxe. Plus près de la Creuse, Brive-la-Gaillarde a été particulièrement en avance pour la mise en place de la taxe incitative, instaurée en 2015.
D’après L’Express, seuls 5 millions de Français sont aujourd’hui concernés par la tarification incitative. Mais la loi pour la transition énergétique prévoit de faire passer ce nombre à 25 millions en 2025.