Très sensible à la question des déserts médicaux et de l'accès aux soins, l’Association des Maires Ruraux de France (AMRF) a commandité une nouvelle étude sur la santé en milieu rural. Celle-ci détaille le manque ou le surplus de médecins par bassins de vie et révèle précisément de très fortes inégalités. Au sein même des départements limousins, il existe des disparités.
Cela saute aux yeux, en parcourant les différents tableaux et cartes de cette étude commandée par l’AMRF : en France, nous ne bénéficions pas du même accès aux soins selon que l’on vit dans la campagne près d’Ussel ou sur la Côte d’Azur.
10 millions de français ont d’ailleurs été recensés comme ayant un accès aux soins de qualité inférieure à la moyenne, et, Paris mis à part, cela concerne essentiellement les habitants des zones rurales.
Dans notre pays, 30% de la population vit en milieu rural, tandis que 25% des médecins généralistes y sont installés.
Des inégalités, à grande comme à petite échelle
L’étude détaille ces données par « bassins de vie », des zones géographiques définies par l’Insee. En dénombrant le nombre de médecins par « bassins de vie », on peut précisément visualiser si les chiffres sont supérieurs ou inférieurs à la moyenne nationale du nombre de médecin généraliste pour 1000 habitants qui est de 0,83.
Les « bassins de vie » les plus touchés dans notre région sont Ussel, en Corrèze et La Souterraine en Creuse. À Ussel et ses alentours, 10 généralistes sont installés, il en faudrait 7 de plus pour atteindre la moyenne nationale et même 4 supplémentaires pour arriver à l’idéal de 1 médecin pour 1000 habitants. La Souterraine et son « bassin de vie » comptent 12 généralistes : là-aussi, il en manque 7. À l’inverse, le bassin de Limoges comptabilise un léger excédent de 74 médecins généralistes.
Pénurie généralisée de spécialistes dans les 3 départements
L’Association des Maires Ruraux de France (AMRF) va plus loin dans son étude. Les chercheurs ont ciblé 11 spécialités médicales parmi les plus sollicitées pour dénombrer minutieusement le nombre de spécialistes manquants par départements. Et pour nos 3 départements du Limousin, le constat est simple : il manque des spécialistes de tous types et partout.
Constat frappant sur toutes les cartes publiées dans l’étude, certaines zones géographiques françaises révèlent de forts excédents de médecins, toutes spécialités confondues. C’est le cas par exemple des agglomérations bordelaises, lyonnaises ou encore du département des Bouches-du-Rhône.
En Gironde, on compte beaucoup plus de psychiatres ou d’ophtalmologistes que la moyenne française par habitants.
C’est cette inégalité criante d’accès aux soins qu’a voulu dénoncer l’AMRF en publiant cette étude. Son représentant corrézien, Philippe Brugère, maire de Meymac, s’insurge :
C’est une rupture fondamentale d’égalité entre citoyens. (…) Le problème dure depuis de nombreuses années et il est alimenté et même presque organisé par les gouvernements successifs et les syndicats de médecins opposés à toute restriction d’installation. Maintenant, la situation est grave, les chiffres le démontrent.
Philippe Brugère, représentant corrézien de l'AMRF
Des propositions pour remédier aux inégalités
Si Philippe Brugère insiste sur les risques que représentent les déserts médicaux pour les populations rurales, il déplore également que ces pénuries contribuent au manque d’attractivité de ces territoires et il ajoute :
Il faut agir par la contrainte et arrêter avec cette sacro-sainte liberté d’installation. D’autant que autres professions sont soumises à ces obligations d’installations, comme les pharmaciens. C’est intolérable. On avait le meilleur système de santé du monde il y a 30 ans et on a tout foutu en l’air, c’est honteux.
Philippe Brugère, représentant corrézien de l'AMRF
Dans sa publication, l’AMRF fait donc une série de propositions pour remédier aux inégalités d’accès aux soins. Philippe Brugère, lui, va plus loin et suggère de refuser à tout jeune médecin qui s’installe dans une zone surdotée d’être conventionné par la sécurité sociale.