À l’hôpital de Niort, un lieu de consultation et d’écoute pour les victimes de violences psychologiques, physiques et sexuelles

Une cellule d’accueil pour les personnes victimes de violences psychologiques, physiques et sexuelles a ouvert ses portes à l’hôpital de Niort (Deux-Sèvres) en mai 2021. Principalement reçues sur réquisition judiciaire, elles sont prises en charge par une médecin et une psychologue. Témoignage.

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Ce jour de novembre 2021, Hortense* pousse les portes de l’hôpital de Niort. Direction le premier étage du service des urgences. Elle patiente quelques instants dans une salle d’attente, vide. Elle a rendez-vous avec le Docteur Dutripon pour faire évaluer les séquelles psychologiques du harcèlement qu’elle subit de son ex-compagnon depuis plusieurs mois. 

"J’avais l’impression d’être un déchet de la société"

Pour Hortense, tout commence en janvier 2020. Cette Niortaise quarantenaire, mère de deux filles, rencontre un homme avec qui elle se met en couple. Tout se passe bien jusqu’à ce qu’il emménage dans le même immeuble qu’elle, six mois plus tard. Très possessif et intrusif, il ne lui laisse "aucune liberté". "Il avait une vraie emprise psychologique sur moi", raconte-t-elle. "Quand je lui faisais comprendre que j’avais besoin de prendre l’air, il y avait des crises de colère, du chantage. Je ne voyais plus mes amis. J’avais l’impression d’être un déchet de la société."

Hortense prend conscience de la manipulation psychologique de cet homme. Elle tente de rompre plusieurs fois avec lui. "Ce n’est que fin septembre 2021, que je réussis à en finir avec cette relation." Une rupture que cet homme n’arrivera pas à accepter. "Il venait sonner chez moi, me laissait constamment des lettres d’amour dans mon courrier, des fleurs sur le paillasson", livre-t-elle. "Comme il habite au rez-de-chaussée, il fait en sorte de me croiser au pied de l’immeuble, sur le parking." Elle décide de bloquer son numéro et son mail. "Mais du coup, il m’attendait sur le palier, dans le hall. C’était très lourd."

Sans trouver le moyen de s’échapper de cette situation, Hortense en parle à son entourage. On lui conseille de se tourner vers la justice pour se faire aider. "Il ne voulait pas entendre mon "NON", je n’avais pas d’autres choix que de lui faire entendre par quelqu’un d’autre." Début novembre, elle rencontre une intervenante sociale au commissariat de Niort, qui la conduit vers l’agent de police. Hortense dépose plainte pour harcèlement moral avec répercussions sur la santé psychologique. "On n’a jamais remis en cause mon témoignage, cela m’a fait du bien."

Évaluer les séquelles psychologiques

Quinze jours plus tard, l’enquêteur lui propose de prendre rendez-vous avec une médecin de l’hôpital de Niort, habilitée à évaluer ses séquelles psychologiques. "Il fallait que j’aille jusqu’au bout de la procédure, c’était l’une des seules solutions pour appuyer mon dépôt de plainte."

Dès le lendemain, elle est reçue au centre de consultation et d’écoute pour les victimes. Pendant une heure, elle livre son témoignage au Dr Dutripon, spécialisée en médecine légale. "Raconter une fois de plus mon histoire, c’était éprouvant, mais nécessaire", se souvient Hortense.

Quelques jours plus tard, son ex-compagnon est convoqué pour un rappel à la loi. "Je continuais à le croiser dans l’immeuble, il disait qu’il était désolé d’en être arrivé là, qu’il avait dit à l’agent de police que ce n’était que de l’amour… Mais on dit aussi que le ‘crime passionnel’ c’est de l’amour, hein !"

La plainte est finalement classée sans suite. "Un peu de déception en me disant que ce n’était pas si important que ça, face à d’autres violences qui auraient été physiques, par exemple." Traumatisée par cette relation, Hortense trouve à la cellule de consultation de l’hôpital une oreille attentive auprès de la psychologue, Anaïs Levêque.

Elle la rencontre pendant cinq séances. "On a évoqué mon enfance, mon passé, et cela m’a permis de passer au-delà des idées négatives", témoigne-t-elle. "J’ai compris énormément de choses, cela m’a fait prendre confiance en moi." Aujourd’hui, Hortense a besoin "d’apprécier cette solitude bienfaisante et réparatrice."

Plus de 220 patientes depus mai

Depuis le 10 mai 2021, 222 personnes, comme Hortense, ont été reçues au centre de consultation et d’écoute pour les victimes de violences psychologiques, physiques et sexuelles de l’hôpital de Niort. Un lieu développé à l'initiative du Dr Farnam Faranpour, chef du service des urgences de Niort. Mais également une volonté du procureur de la République. 

Dès sa nomination au parquet de Niort, Julien Wattebled a affiché sa volonté de demander des moyens pour lutter contre les violences conjugales dans les Deux-Sèvres. Selon le parquet, les défèrements pour violences conjugales ont augmenté de 37% en un an au tribunal de Niort. 

Au vu de ces chiffres, l’équipe de la cellule d'accueil du CH de Niort essaie d’être la plus réactive possible. Le Docteur Dutripon évalue les séquelles psychologiques ou physiques. “Je regarde s’il y a des coups et blessures, je les prends en photo, et je vois si c’est en compatibilité avec les propos de la victime.”

Un maillon essentiel dans la prise en charge de la victime : “Après la consultation, j’envoie un rapport médico-légal. S’il y a des facteurs de risque d’homicide, ou une situation de danger pour les enfants, nous le signalons.”

Comme Hortense, la personne est ensuite envoyée en entretien avec la psychologue. Selon les besoins, entre une et cinq consultations sont assurées. “Ces personnes vivent des situations qui développent chez elles un état de stress post-traumatique”, poursuit le Docteur Dutripon. “Notre rôle est d’évaluer le besoin de suivi psychologique et de réorienter vers d’autres consultations si besoin.”

Le lieu de consultation et d’écoute devrait bientôt permettre aux victimes de déposer une pré-plainte directement à l’hôpital.

* Le prénom a été modifié à la demande de l'intéressée

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