À Épannes, dans les Deux-Sèvres, le chantier de la future réserve de substitution va débuter. Elle doit être mise en eau cet hiver pour servir aux agriculteurs locaux dès le printemps 2025. Les opposants au projet s'insurgent.
Dans les Deux-Sèvres, le périmètre de la future réserve de substitution d'Épannes est désormais délimité par des barrières de protection, un prérequis avant le début des travaux qui doivent durer environ six mois. D'une capacité de 230 000 mètres cubes, elle doit alimenter en eau une douzaine d'agriculteurs dès le printemps 2025.
CARTE. Les quatre réserves de substitution construites ou en cours de construction dans les Deux-Sèvres
C'est la quatrième construction sur le projet de 16 réserves de substitution dans les Deux-Sèvres, après celles de Mauzé-sur-le-Mignon, de Sainte-Soline et de Priaires.
Alors que le chantier est controversé et fait l'objet d'actions en justice, les travaux vont débuter sous une certaine tension. "Il y a eu des décalages suite à des recours, des oppositions ou des choses comme ça, mais aujourd'hui on continue notre programme, on le met en place progressivement", souffle François Pétorin, administrateur de la Coop de l’eau 79. "Vous n'êtes pas sans avoir qu'il y a eu certaines manifestations un peu violentes", ajoute-t-il, en affirmant que les entreprises impliquées sont sous pression.
Moins d’un an après les affrontements de Sainte-Soline, un épais ruban adhésif occulte les plaques d'immatriculation des engins présents sur place.
Offensives judiciaires en cours
De leur côté, les opposants entendent saisir la justice pour empêcher le début des travaux. La LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux) annonce déposer un recours en référé pour stopper le chantier en urgence, afin de protéger l'outarde canepetière, oiseau emblématique de la lutte anti-bassine. Selon l'association environnementale, il ne reste que 320 couples de cette espèce en Poitou-Charentes.
"Nous considérons que ces ouvrages sont en contradiction avec la présence des outardes et qu'il doit y avoir, pour engager ces travaux, une dérogation pour destruction d'espèce protégée", alerte Dominique Chevillon, vice-président de la LPO. "L'outarde est une espèce protégée, emblématique, donc nous avons toute latitude et surtout, nous avons la responsabilité nous, association nationale, de le faire."
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Un autre recours est actuellement étudié par la cour administrative d'appel de Bordeaux. Le collectif Bassines non merci ! s'étonne que ses conclusions ne soient pas attendues avant de démarrer un nouveau chantier : "Il y a des procédures en cours, il y en a une à Bordeaux qui va dans quelques mois sûrement nous annoncer ce qu'elle a annoncé à chaque fois sur les autres dossiers, ces bassines sont illégales", insiste Jean-Jacques Guillet, porte-parole du collectif.
Argent public et conflits d'intérêts ?
Julien Le Guet, leader de la contestation, a été condamné à un an de prison avec sursis il y a un mois pour vol et dégradation à Sainte-Soline. Il déplore de son côté ce qu'il qualifie de conflits d'intérêts : "Le point commun des six premières bassines de la première tranche financée par l'Agence de l'eau, c'est que systématiquement quand on regarde, il y a toujours un chef de file qui mélange allègrement des casquettes d'élu, des casquettes de représentant dans des coopératives. Cette question de conflit d'intérêts, on va aller au bout de la démarche également sur le plan juridique." L’association Bassines Non Merci ! pourrait elle aussi déposer une nouvelle plainte dans les prochains jours contre le projet.
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En attendant, Julien Le Guet veut alerter sur l'usage d'argent public et les risques de voir ce nouveau chantier invalidé par la justice. "Si la bassine d'Épannes se fait et qu'elle est illégale à terme, ce sera comme les bassines de Charente-Maritime illégales, on exigera la remise en état, et sur les fonds propres des exploitations qu'on n'arrête pas de prévenir de ce risque-là", prévient-il. "Il ne s'agira pas de redonner de la subvention publique pour reboucher un trou qui n'aurait jamais dû être creusé."