L'entreprise Sendo basée à Nontron en Dordogne se retrouve avec un stock de 180 000 masques fabriqués au plus fort de la crise sanitaire. Elle avait alors répondu à l'appel des autorités qui en manquaient cruellement. Aujourd'hui en difficulté financière, elle interpelle acteurs publics et privés.
"On nous a applaudi, encouragé, on a eu la visite du Préfet et j'ai même été invité à la cérémonie du 14 juillet" rapporte Philippe Mappas, à la tête de la société Sendo installée à Nontron, au nord de la Dordogne, qui a aujourd'hui le sentiment que les autorités l'ont laissé tombé.
Du jour au lendemain, tout s'est arrêté
Cet entrepreneur périgourdin avait répondu présent le 16 mars dernier quand l'agence de développement économique du département, Périgord Développement, cherchait desespérément à lancer la fabrication de masques en tissu.
A ce moment là, il en manquait pour équiper les personnels soignants et l'ensemble des personnes réquisitionnées pendant le confinement. Philippe Mappas a alors décidé d'adapter son outil de fabrication.
Ses machines à découper des boites isothermes se sont mises à dessiner des masques. Il a fait appel à une dizaine d'entreprises de la région pour les fournitures et la finition. "On a produit jusqu'à 20 000 masques par jour, on a créé 86 emplois, permis à des personnes qui avaient perdu leur activité de travailler et sauvegardé 186 postes" affirme t-il. "Et du jour au lendemain, tout s'est arrêté".
Appel à la solidarité nationale
Au mois de mai, "plus rien, plus aucune demande" se souvient Philippe Mappas alors qu'arrivaient dans l'hexagone les commandes massives passées aux pays asiatiques notamment. Il a alors stoppé la production mais "avant d'arrêter les machines il faut du temps, ça ne se fait pas d'un claquement de doigt. Et c'est 9 jours de production qui nous restent sur les bras, 180 000 masques. Le marché a été étouffé d'u seul coup, il y avait plus de masques que de demandes" déplore t-il.
Le chef d'entrerprise périgourdin ne comprend pas pourquoi les autorités qui l'ont sollicité lui tournent maintenant le dos. Le département a distribué des masques pakistanais aux collégiens.
Un problème de prix ?
Sendo vend un masque 3 euros 80 contre 3 euros 20 pour les produits importés. "L'argent c'est aussi l'argent du contribuable" plaide Pascal Bourdeau, conseiller départemental du canton du nontronnais. "Quand nous, le département, on achète, c'est l'argent du contribuable, on est obligé de faire attention, c'est pour ça qu'on met en concurrence l'ensemble des fournisseurs" explique t-il.
L'élu affirme toutefois qu'il n'y a pas là matière à polémique. "A l'époque, comme toutes les collectivités, on a fait le choix d'aller en chercher un peu partout car il y avait pénurie et on a eu une opportunité sur des masques pakistanais". Mais pour les prochaines commandes il assure que le département se tournera vers les producteurs locaux. "On va privilégier le local comme on l'a toujours fait, pour tous les appels d'offres, à tous les niveaux qu'il s'agisse du bâtiment, de l'agriculture...".
En attendant Philippe Mappas accuse 200 000 euros de pertes et ne peut pas rembourser ses partenaires. Il regrette que les belles paroles entendues pendant le confinement se soient si rapidement envolées. "On ne pourra grandir et réindustrialiser la France que si on achète français, ça va aider les entreprises et créer des emplois. Ce qu'il faut voir c'est l'économie circulaire, à chaque fois qu'un euro est dépensé ici, il est réinjecté dans l'économie locale".
Regardez le reportage réalisé au sein de l'usine nontronnaise par Margaux Dubielh et Pascal Tinon :