Dordogne : G. Peiro appelle la population à la désobéissance, "balance" les châtelains... et le Gouvernement

Lors de la manifestation pro-contournement qui a rassemblé plus de 300 personnes à Beynac, Germinal Peiro a galvanisé la foule, appelant ouvertement à résister à la décision de justice l'obligeant à démolir les travaux. Il accuse le gouvernement d'avoir cédé à trois "châtelains" influents

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"La désobéissance civile est le refus assumé et public de se soumettre à une loi, un règlement, une organisation ou un pouvoir jugé inique par ceux qui le contestent, tout en faisant de ce refus une arme de combat pacifique". La définition est claire. Et elle semble s'appliquer parfaitement à l'appel lancé ce vendredi par le Président du Conseil Départemental de Dordogne aux 300 sympathisants venus contester l'abandon du projet de déviation de Beynac.

Sur place, ils étaient bon nombre a laisser entendre qu'ils s'opposeraient aux travaux de démolition ordonnés par la justice en avril 2019. Les ultimes chances de casser cette décision de justice ayant été épuisées ce 29 juin 2020, l'appel du Président du département équivaut à inciter la population à désobéir à une décision de justice.

Un paradoxe complet selon ses détracteurs. Car celui qui fut maire et qui est élu au Département depuis plus de 30 ans, a également été en charge de proposer et voter des lois en tant que Député pendant 20 ans.  

On a en face de nous quelqu'un qui a occupé des fonctions de député, de législateur [...] et là, il appelle à la désobéissance civile. Appeler à la désobéissance civile c'est grave, c'est très grave ! On n'est pas dans la période 39-45 ! On n'en est pas à s'opposer à Pétain !  

Michel André - Président de la SEPANSO 24

L'ambigüe notion de désobéissance civile

Tout est dans la nuance. Sans violence, la désobéissance civile est plus une absence de coopération qu'un acte délictueux caractérisé. C'est un moyen de résister efficacement et sans trop de risque à une décision imposée. Elle reste illégale, mais collective, publique et pacifique, elle se justifie par un intérêt supérieur auxquels les juges (et la population) peuvent parfois être sensibles. De Gandhi à Martin Luther King, de José Bové aux Gilets Jaunes... et aux zadistes de Beynac, les désobéissances civiles n'ont pas toujours été vouées à l'échec. Et s'il réussit à mobiliser les foules, le Président du Conseil Départemental peut à minima espérer faire durer la polémique en attendant des jours meilleurs.

Morceaux choisis du discours de Germinal Peiro lors de la manifestation du 4 juillet

 

Il y a 37 ans que je suis élu [...] Pendant 37 ans je n'ai jamais ressenti autant de mépris de l'État envers la population, envers les élus, les forces économiques, envers tout un Département, et, finalement, envers le monde rural.  

Cette affaire, c'est un scandale dans le fonctionnement de l'État... l'accord a été confirmé par le Premier Ministre en personne qui nous l'a écrit. Il a été confirmé par le Président de la République, Emmanuel Macron lui-même, le 19 juillet 2018 à Périgueux. [...] Dans quel pays on laisserait une collectivité entamer des travaux, en réaliser 60% et 11 mois après lui retirer les autorisations ? Qui peut comprendre ça, si ce n'est qu'on est dans un pays d'irresponsables et dans un pays de fous !  

Aujourd'hui on n'a pas d'argent pour relever les salaires des soignants. Et l'État organise lui-même le gaspillage de 40 Millions d'€uros ici ? M'enfin !

Le projet a été co-construit par l'État. Nous avons été soutenu par l'État. Et brusquement l'État s'est retourné. Je dis l'État, mais dans ce cas précis je devrais dire le Gouvernement. Et le reste a suivi. Il n'y a aucun argument. Malheureusement il n'y a que des arguments politiques. [...] L'État a soutenu les trois châtelains, ici, autour de nous, qui s'opposent à ce projet depuis longtemps.

Sus aux 3 châtelains conspirateurs ! Et au Gouvernement !

Directement visés, les trois châtelains en question ont eu droit à un rapide portrait au vitriol de la part du Président du département. Propriétaires des châteaux de Fayrac, de Castelnaud et de Beynac, ils seraient ceux qui auraient poussé le Gouvernement à l'abandon du projet.
  1. La famille Newell, propriétaire du château de Fayrac. Les "Texans", comme les appelle Germinal Peiro, sont accusés de "faire la guerre" au département de la Dordogne.
     
  2. Kléber-Rossillon, propriétaire du château de Castelnaud. "L'héritier de la famille Schlumberger-Seydoux" (il est le neveu des frères Seydoux, propriétaires historiques de Gaumont et Pathé Cinéma et de la famille de l'actrice Léa Seydoux NDLR) est celui qui s'est fait extorquer plusieurs millions d'€uros par l'escroc Bernard Madoff.
     
  3. Albéric de Montgolfier, propriétaire du château de Beynac. Sur lui, Germinal Peiro s'est attardé. Il a expliqué que ce sénateur LR et rapporteur général de la commission des Finances du Sénat venait d'être épinglé par le Canard Enchaîné en date du 1er juillet. L'homme aurait œuvré pour le vote au Sénat d'une fiscalité avantageant les tournages de superproductions étrangères. Et parallèlement son château vient de servir de cadre au tournage du dernier film de Ridley Scott "pour 10 000 €uros par mois", précise le Canard. Et, sous les viva, Germinal Peiro de parler de "conflit d'intérêt", de "mettre la main dans le pot de confiture" et de "se sucrer".
Jouant le clivage, le Président ajoute que "ce sont ces gens-là qui sont servis par le pouvoir" et que "l'État a voulu donner raison à ces gens-là contre vous, contre la population de la Dordogne, contre les Élus et contre les finances du Département. Voilà aujourd'hui qui gouverne la France ! ". Face à une foule acquise, il incite alors la population à bloquer la démolition du chantier, inversant les rôles avec les zadistes d'hier. 

Et puis je m'adresse à vous. Vous savez, pour empêcher un chantier, y'a pas besoin d'être 10 000 ! Donc un jour peut-être qu'il vous sera demandé, ou peut-être qu'on ne vous ne demandera rien... on n'aura pas besoin de vous conseiller...  Mais je connais devant moi au moins une centaine de personnes qui iront faire ce qu'ont fait les zadistes, c'est à dire se mettre devant les bulldozers ! Et vous verrez que ça n'avancera pas si vite que ça ! 

Conspué, Philippe Piston d'Eaubonne porte plainte

Germinal Peiro n'a pas été seul à porter la charge. D'autres élus et le Président de l'Association J'aime Beynac et sa Vallée se sont relayés, dénonçant les protagonistes de leur échec. Lors de ces énumérations, le président de l'association Sauvons la Vallée Dordogne Philippe Piston d'Eaubonne a également été conspué. Il en a pris ombrage, au point de porter plainte à la gendarmerie ce lundi pour injures publiques.

Jouer la montre de la lenteur administrative

Pour le reste, Germinal Peiro a ajouté qu'il se conformerait à la décision de justice. C'est à dire qu'il respectera "à la lettre" les 17 pages de préconisations imposées par la Préfecture pour entamer la démolition du chantier. Ajoutant aussitôt que le respect de ces préconisations stricto sensu rendait impossible le délai imposé d'un an. Une stratégie du "pourrissement" qui pourrait faire durer le débat pendant de nombreux mois encore, voire de nombreuses années.
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