En présentant ce mardi sa réforme du système médical, Emmanuel Macron a établi un plan de lutte contre les déserts médicaux qui devrait avoir de nombreuses répercussions en Dordogne, particulièrement concernée par le sujet.
La Dordogne présente l’une des plus faibles densités de médecins généralistes de Nouvelle-Aquitaine, avec 0,83 généralistes pour 1 000 habitants contre 1,42 régionalement. La réforme du système médical présentée promet de s'attaquer entre autres aux déserts médicaux et au vieillissement de la population (et des médecins en activité). Détails.
400 millions d’euros de rallonge budgétaire et dès l'an prochain, la suppression du redouté numerus clausus en 2020 : la réforme « Ma santé 2022 » veut augmenter l’offre de soins, notamment dans les déserts médicaux en zone rurale pour permettre à tous les Français d’être pris en charge dans la journée en cas de nécessité par la médecine de ville, désengorger des urgences hospitalières saturées, améliorer la qualité de la prise en charge et enfin répondre au malaise de soignants face à la course à l’activité à laquelle ils sont poussés.
Une réduction des efforts d'économie plus qu'un apport d'argent frais
Un bémol tout de même, la Fédération hospitalière de France qui représente les hôpitaux publics rappelle que ces 400 millions d’euros supplémentaires annoncés pour 2019 représentent à peine la moitié de l’effort d’économie demandé en 2018 aux hôpitaux.
Au volet budgétaire sont ajoutées plus d'une cinquantaine de mesures pour qu’il y ait plus de médecins formés demain selon l’Elysée.
Mais la plupart de ces mesures ne porteront pas leur fruit avant plusieurs années, il convenait donc de prendre parallèlement des mesures d'urgence.
4 000 assistants médicaux d'ici 2022
Première mesure, le recrutement d’ici à 2022 en priorité dans les déserts médicaux de 4 000 assistants médicaux sur le modèle des assistants dentaires.
Ils seront chargés des actes administratifs ou médicaux courants, accueil des personnes âgées, suivi de rendez-vous, prise de tension ou de température pour soulager les médecins généralistes ou spécialistes souvent en sous-nombre et débordés. Objectif, gagner 25 % à 30 % de temps médical équivalant à près de 2 000 médecins supplémentaires.
La Dordogne est pleinement concernée par cette pénurie de médecins et la surcharge ou le vieillissement de ceux en activité.
Bémol à ce ballon d'oxygène, les praticiens devront en contrepartie exercer groupés en cabinet commun ou au sein d’une équipe de soins, mais aussi accepter de nouveaux patients et assurer les « urgences de ville », c’est-à-dire des consultations sans rendez-vous en journée. Il est ainsi question d'astreintes.
400 médecins salariés supplémentaires dans les déserts médicaux
400 médecins généralistes vont être salariés par des centres hospitaliers de proximité ou des centres de santé situés dans les « déserts médicaux » ce qui devrait notablement améliorer le sort des patients qui peinaient à accéder à une consultation généraliste. Même si on ignore encore dans quelle proportion cette mesure profitera à la Dordogne.
Hôpitaux réorganisés, privatisation des soins programmée
La Dordogne compte un Centre Hospitalier principal, à Périgueux et 8 hôpitaux périphériques (Centre Hospitalier Intercommunal Riberac Dronne Double à St Privat des Prés, le Centre Hospitalier Jean Leclaire à Sarlat-la-Canéda, le Centre Hospitalier Samuel-Pozzi à Bergerac, le Centre Hospitalier Intercommunal de Ribérac, le Centre Hospitalier de Saint-Astier, le Centre Hospitalier de Belvès, le Centre Hospitalier d'Excideuil et le Centre Hospitalier de Lanmary à Antonne-et-Trigonant).
Tous devront poursuivre les efforts de regroupement, céder certaines activités au privé et, pour les plus petites structures, se consacrer aux tâches d'urgence en laissant les secteurs spécialisés aux structures les plus importantes.
Au menu du gouvernement une privatisation accentuée au profit des cliniques, des regroupements et une hyper-spécialisation. Les établissements seront placés en trois catégories : soins de proximité, soins spécialisés et soins ultra-spécialisés au sein des Groupements Hospitaliers de Territoire créés par la loi Touraine instaurée en janvier 2016. Et les établissements devront s’ouvrir au secteur privé.
Dès l’an prochain les dotations hospitalières atteindront 300 millions d’euros, soit une multiplication par cinq. En contrepartie, une gradation des soins différente est à l'étude. L'an prochain par exemple, les maladies chroniques comme le diabète et l’insuffisance rénale seront financés forfaitairement pour forcer libéraux et hospitaliers à se coordonner sur le parcours de soin du patient.
Chasse aux actes "inutiles" à l'hôpital
Il faudra aussi rogner sur ce que le ministère de la santé estime être des « actes inutiles ». Une pratique qui se serait multipliée à cause du système de rémunération à l'acte, encourageant les hôpitaux à pratiquer et facturer plus d'actes que strictement nécessaire pour être correctement financés.
Les soins spécialisés réservés aux plus grosses structures
Concernant les hôpitaux de proximité, ( Belvès, Domme, Excideuil, Nontron, Ribérac, Saint Astier, Saint Aulaye) leur statut changera, mais on restera là aussi dans la continuité de la politique de Groupement Hospitalier de Territoire.
Les 600 plus petits établissements français continueront à être réorientés sur des priorités telles que la gériatrie, la rééducation, l’imagerie, la biologie ou encore la télémédecine. Blocs chirurgicaux et maternités continueront à être regroupés dans les plus gros établissements pour leur assurer une activité plus importante.
Un point d'achoppement (on se souvient de la mobilisation autour de la fermeture programmée de la chirurgie et la maternité à l'hôpital de Sarlat) qui risque de ne pas passer dans certains territoires.
Le virtuel, solution miracle ?
Enfin, la dématérialisation fait aussi son apparition dans le secteur médical. Par la télémédecine censée permettre les soins spécialisés à distance y compris dans les lieux les plus reculés, mais aussi à travers la prise de rendez-vous systématique en ligne, en ville comme à l’hôpital, pour limiter le nombre de rendez-vous non honorés.
Selon le ministère de la santé, 100 millions de rendez-vous médicaux non honorés chaque année en France équivaudraient à 37 000 emplois temps plein de médecins.