Tous les français ne sont pas prêts à devenir végétarien. Tous ne cautionnent pas l'élevage industriel. Mais tous ne sont pas prêts à payer le prix d'une viande naturelle. Portrait croisé de deux élevages de veaux en Dordogne, deux philosophies... et deux viandes bien différentes
Élevage en batterie : rentable, aseptisé, productif et garanti
Alain Rilievo est un éleveur rationnel. Son élevage de vaches laitières n'était pas rentable. Depuis qu'il est passé au veau sous bâtiment, il a doublé ses revenus. Et dans son étable de 1100 m2, il pratique un élevage intensif, et tout aussi rationnel. 336 veaux sont rassemblés par 6 dans un box d'une dizaine de mètres carrés pendant 6 mois, le temps d'atteindre leur taille optimale.
Il nourrit ses animaux d'un mélange d'eau et de lait en poudre auquel sont ajoutées des céréales, du maïs ainsi que des nutriments tels que de l'huile de palme...
Comme 80 autres éleveurs de Dordogne (et comme 500 éleveurs dans 49 départements), il travaille sous contrat avec l'industriel Sobeval de Boulazac. Un contrat longue durée de 9 ans qui lui garantit un débouché. Ses 336 places lui sont payées 250 €uros et lui garantissent un Chiffre d'Affaire annuel de 80 000 € avant déduction des charges.
La viande des veaux qu'il produit peut même être vendue aux États-Unis, peut-être même la Chine, la Sobeval est l'une des rares sociétés européenne ayant conclu des accords avec ces pays. La Sobeval achète aussi par ailleurs du "Label Rouge", du veau sous la mère.
Alain et Isabelle : le choix du naturel
À Auriac-du-Périgord, dans le Périgord Noir, Isabelle Goémine-Rabeau et son mari Alain exploitent la Ferme du Vignal. Isabelle et son mari ne sont pas qu'éleveurs, ils sont aussi des militants totalement opposés à l'élevage industriel. Dans leurs 50 hectares vallonés agrémenté de forêts, ils élèvent des races bovines rustiques. Salers, Limousines, Blonde d’Aquitaine, Aubrac, Brune des Alpes...
Un élevage extensif, en plein air, à la limite de l'extrême. Ici pas de bâtiments d'élevage, ni de stabulation. Les animaux vivent dans des conditions naturelles, entièrement en extérieur. Un choix qui a un coût, car les revenus de cette méthode d'élevage extensif sont bien moindres que dans les élevages industriels. Mais le plaisir d'Isabelle c'est de voir ses animaux en liberté, et de permettre aux races rustiques de trouver leur place naturelle.
Leurs clients sont des restaurateurs qui apprécient la qualité produite, les particuliers qui visitent l'exploitation et achètent sur place, ou des habitués qui commandent.
Leur combat d'aujourd'hui, c'est l'abattage. Jusque dans les années 80, l'abattage traditionnel se faisait à la ferme. Beaucoup plus respectueux et, même si le résultat reste le même, moins stressant pour l'animal. Aujourd'hui, la pratique est interdite. L'abattage est imposé à l'abattoir de Thiviers, dans des conditions très réglementées.